Eglises d'Asie

Tout en leur reconnaissant des aspects positifs, les évêques mettent en garde les catholiques con-tre les dangers que peuvent représenter pour leur foi certains mouvements de spiritualité récents

Publié le 18/03/2010




La Commission pour la doctrine de la foi de la Conférence des évêques catholiques de Corée a publié, le 21 avril dernier, un document intitulé : “Mouvements et courants de pensée dangereux pour l’orthodoxie de la foi ». Un document sur le même sujet avait déjà été publié en septembre 1997 (1). Le nouveau document constate l’augmentation récente et rapide du nombre de “lieux où s’enseigne le ‘ki-, les pratiques de respiration abdominale et le zen, qui mêlent mouvements corporels, respiration et concentration mentale”. Il met en garde les chrétiens : “Nous devons être attentifs au fait qu’un certain nombre de groupes religieux utilisent ces méthodes de discipline physique et mentale pour diffuser leur religion.” Le document, long de vingt-trois pages, fait le rapprochement entre ces pratiques et ce que les sociologues et les spécialistes des religions appellent “les mouvements pour une nouvelle spiritualité” qui tendent à aider l’individu à atteindre sa propre perfection grâce à une expérience spirituelle fondée sur la recherche d’une santé mentale et physique et la quête de la paix.

Pour la Commission pour la doctrine de la foi, il faut reconnaître que ces mouvements pour une nouvelle spiritualité contribuent grandement à un plus grand respect de la vie et de l’environnement. “La pratique du ‘ki-en elle-même n’est pas contraire à la foi chrétienne écrivent les évêques, mais si “elle dépasse la simple recherche de santé physique, elle peut avoir sur elle des effets négatifs”.

Le Ki-gong, ou qi-gong en chinois, est une méthode qui intègre exercices physiques et psychiques et méditation. ‘renvoie à l’énergie et ‘à la discipline. Une pratique qui, dans la ligne taoïste, allie respiration abdominale et certaines positions corporelles et cherche à développer un équilibre nerveux autonome. Quant à la méditation, elle s’inspire du bouddhisme zen qui privilégie une pratique de la méditation sensée stimuler la fonction de discernement et faire émerger l’illumination.

Les évêques soulignent pourtant que ces nouveaux mouvements mettent en danger “l’essence du christianisme sa compréhension de Dieu, la christologie et l’ecclésiologie. Ils affirment que ces mouvements rejettent l’appréhension fondamentale de Dieu qu’ont les chrétiens pour lui préférer un “panthéisme” qui tient que Dieu est l’unité du monde et que tout, dans l’univers, est en Dieu.

Selon le P. Basilius Cho Kyu-man, secrétaire du Comité pour la doctrine de la foi, les évêques “ne font pas de différence” entre le panthéisme et le panenthéisme qui présente Dieu non comme une personne mais comme les lois, les forces et les manifestations d’un univers existant par lui-même. Le P. Cho a également expliqué que, si le document de 1997 traitait dans leur “ensemble” des dangers que représentaient différents phénomènes de société, le nouveau document visait “les problèmes auxquels l’Eglise était confrontée et qu’elle se devait de relever”.

Pour le P. Norbert Cha Dong-yeob, directeur de pour une pastorale nouvelle, du diocèse d’Inchon, le document de la Commission est juste. Après avoir pratiqué durant quinze ans le ki-gong et le yoga, il estime que “les catholiques ne doivent pas entrer en contact à un haut niveau avec ces mouvements”. “Si un catholique parvient à un niveau élevé dans la pratique du ki-gong, a-t-il affirmé, il est très probable qu’il sera amené à quitter le catholicisme. Dans une pratique de haut niveau en effet, les notions religieuses (qui étayent ces pratiques) ont beaucoup d’importance.”

Le P. Silvester Chun Hun-Ho, professeur de théologie à l’université catholique de Taegu, reconnaît, quant à lui, que ces mouvements “ont aussi de bons côtés” qu’on retrouve dans la culture de la jeune génération. Il cite leur influence “positive” sur les chrétiens dans la musique, les films, la télévision et les livres. “Tous ces mouvement ne sont pas à dénoncer en bloc affirme le P. Chun, suggérant que l’Eglise “se doit de développer des activités spirituelles capables d’attirer à elle ceux qui recherchent de l’aide auprès de ces mouvements”. De la même façon, le P. Cho fait remarquer que “de nos jours beaucoup essaient d’y trouver un certain réconfort » parce que les religions traditionnelles “ne répondent pas à leur soif de spiritualité”. Les religions établies sont devenues d’importantes institutions, “hiérarchisées et centralisées constate-t-il, qui ne se préoccupent pas outre mesure de répondre aux demandes de spiritualité de leurs fidèles.