Eglises d'Asie

Un responsable communiste en exil dit sa reconnaissance à Mgr Antonio Fortich, ancien évêque de Bacolod, connu pour son engagement auprès des plus pauvres et des paysans sans terre

Publié le 18/03/2010




Mgr Antonio Fortich, ancien évêque du diocèse catholique de Bacolod, situé sur l’île de Negros, au centre des Philippines, a été placé sous assistance respiratoire dès son entrée dans l’unité de soins intensifs d’un hôpital de Bacolod le 28 avril dernier. Agé de 89 ans, diabétique et cardiaque, l’évêque approche sans doute de la fin de sa vie terrestre. C’est dans ce contexte que, le 27 mai dernier, Luis Jalandoni, le représentant international et le négociateur attitré du Front national démocratique, d’obédience communiste, a choisi de s’exprimer sur les ondes d’une radio locale. Des Pays-Bas où il vit en exil avec d’autres dirigeants du mouvement communiste, Luis Jalandoni a en effet enregistré un message où il exprime l’estime que les militants communistes portent à Mgr Fortich. “Si nous pouvions être à vos côtés, nous vous dirions combien nous vous apprécions, vous et tout ce que vous avez fait a notamment déclaré le responsable communiste.

Luis Jalandoni, un ex-prêtre, et son épouse, une ex-religieuse, ne sont pas des inconnus pour Mgr Fortich. En 1969, sur l’île de Negros, Luis Jalandoni, alors prêtre, avait été le premier directeur du Bureau d’action sociale créé par Mgr Fortich à Bacolod. Dans son message radiodiffusé, Luis Jalandoni a dit : “Nous nous souvenons à quel point vous nous avez aidés, nous traitant comme un père le fait avec ses enfants.” Il a notamment rappelé l’engagement de l’évêque pour défendre des paysans sans terre dans leur lutte contre les grands propriétaires terriens à Candoni. Selon Jalandoni, l’action de l’évêque a poussé le clergé et les laïcs à lutter pour la justice sociale dans le diocèse, contribuant à faire de Negros un “volcan social”.

Né dans une famille de propriétaires terriens, Mgr Fortich, durant les vingt-deux années passées à la tête du diocèse de Bacolod, évolua jusqu’à devenir un des plus virulents critiques des barons du sucre et des militaires. Son épiscopat, durant les années de la loi martiale sous la présidence Marcos dans les années 1970 et au début des années 1980, vit le développement des communautés chrétiennes de base. Ce fut aussi durant les années 1970 que Jalandoni, Ledesma et une poignée de prêtres et de religieuses de Negros rejoignirent la rébellion communiste (1). Tenu par le gouvernement et par une partie de ses confrères dans l’épiscopat pour un “évêque rouge Mgr Fortich affirma cependant ne pas accepter la révolution comme moyen de changement de la société. En 1981, Jean-Paul II, en visite aux Philippines, passa par Bacolod où il présida une messe devant une assemblée composée à la fois de propriétaires terriens et de paysans sans terre. “L’injustice règne dès lors que les lois de la croissance économique et du profit toujours plus grand déterminent les relations sociales, laissant dans la pauvreté et la misère ceux qui n’ont que le travail de leurs mains à offrir déclara notamment le pape. En 1985 puis en 1986, la résidence de l’évêque fut à deux reprises l’objet d’attaques à la grenade, actions qui, selon Mgr Fortich, étaient sans doute imputables à des propriétaires terriens alliés à des militaires. En 1987, deux années avant sa retraite, Mgr Fortich fut nommé président de la Commission national de cessez-le-feu, mise sur pied pour mener les négociations avec la rébellion communiste.

Dans son message radiodiffusé, Luis Jalandoni a ajouté : “Je suis sûr que nombreux sont ceux, à Negros, qui sont tristes et prient, espérant en la convalescence (de Mgr Fortich) et saluant son engagement durant de si nombreuses années, particulièrement durant la dictature Marcos.” Le 27 mai dernier, Mgr Vicente Navarra, l’évêque actuel de Bacolod, a appelé à prier pour que Mgr Fortich voit les souffrances dues à sa maladie s’alléger.