Eglises d'Asie

Aceh : le président de la Muhammadiyah réitère son appel à la paix et à l’ouverture de négociations entre le gouvernement et le GAM

Publié le 18/03/2010




Le 23 juin dernier, cinq semaines après le lancement par les forces armées gouvernementales d’une vaste offensive militaire contre le mouvement séparatiste du GAM (Mouvement pour Aceh libre) à Aceh (1), le président de la Muhammadiyah, la seconde plus importante organisation musulmane de masse du pays, a renouvelé son appel au gouvernement à arrêter la guerre et à rouvrir le dialogue avec les dirigeants du GAM. « Il serait mieux pour le gouvernement de ne pas prendre de décision (à propos d’Aceh) de façon unilatérale. Il doit demander à toutes les parties impliquées de s’asseoir à la table des négociations. Et [il devrait] éviter d’évoquer pour l’heure le NKRI car, pour les Acehnais, ces lettres font uniquement référence à l’oppression a déclaré Ahmad Syafii Maarif. NKRI, la République unitaire d’Indonésie, renvoie au modèle d’un Etat centralisé, cet acronyme est principalement utilisé par les militaires.

S’exprimant à Yogyakarta, le président de la Muhammadiyah s’est dit inquiet du nombre des victimes et de la relative inefficacité des opérations militaires à éradiquer les forces du GAM. « Si les opérations militaires peuvent provoquer la mort de 150 membres du GAM en un mois, alors on peut considérer qu’en six mois, moins de 1 000 hommes du GAM seront tués. Or, on dit que le GAM rassemble environ 5 000 combattants. Qu’adviendra-t-il du reste ? s’est-il interrogé devant la presse, en référence à l’annonce initiale du gouvernement selon laquelle la campagne militaire durerait six mois. Tout en renvoyant dos à dos le gouvernement et le GAM, responsables l’un et l’autre de violences sur les populations civiles, Ahmad Syafii Maarif a ajouté que seule une solution négociée peut apporter la paix à Aceh.

« Il est malheureux que le gouvernement n’ait pas su faire usage des bonnes conditions créées » par l’accord de cessation des hostilités, signé par les deux parties le 9 décembre 2002 et rompu depuis par la reprise des combats, a encore estimé le responsable musulman, qui s’est interrogé sur la volonté des autorités de parvenir à une solution négociée. Ahmad Syafii Maarif a en particulier exprimé son inquiétude concernant l’arrestation du président de la section locale de la Muhammadiyah à Aceh. Détenu brièvement par la police peu après le 15 juin dernier, l’imam Suja est connu pour son engagement pour la paix en tant que médiateur entre le GAM et le gouvernement. « Je suggère à la police de ne pas prendre des risques si grands en procédant à des mesures inutiles. Si les personnes de bonne volonté, telle Suja, sont arrêtées les unes après les autres, elles se mettront d’elles-mêmes encore un peu plus en retrait vis-à-vis des efforts entrepris pour mettre un terme au conflit à Aceh a encore ajouté le président de la Muhammadiyah.

Peuplée de quatre millions d’habitants, musulmans à 98 %, Aceh connaît une situation de conflit larvé depuis vingt-six ans (2). Entre 1991 et aujourd’hui, on dénombre 12 000 victimes et d’innombrables atteintes aux droits de l’homme. L’accord signé à Genève entre le gouvernement indonésien et les séparatistes du GAM en décembre 2002 avait soulevé l’espoir que ce conflit touchait à sa fin. Espoir déçu par la reprise des combats en mai dernier. Selon les observateurs, la présidente Megawati Sukarnoputri a laissé la gestion de ce dossier aux militaires, après que Djakarta, qui a toujours refusé la perspective de voir cette province accéder à l’indépendance, eut proposé un statut spécial d’autonomie aux Acehnais. Sur la scène internationale, la cause défendue par le GAM, celle d’un Etat islamique indépendant, ne trouve pas de soutien important et se trouve affaiblie par le contexte créé par la guerre que les Etats-Unis ont déclarée au terrorisme.