Eglises d'Asie

Arrêtés le 4 juin 2003, condamnés le 30 juin à de lourdes peines de prison, deux journalistes européens indépendants et un pasteur américain d’origine H’mong ont été finalement relâchés

Publié le 18/03/2010




Le 9 juillet dernier, les autorités laotiennes ont annoncé la libération de Thierry Falise et Vincent Reynaud, deux journalistes indépendants respectivement belge et français, ainsi que celle du Rév. Naw Karl Mua, pasteur protestant et ressortissant nord-américain d’origine H’mong. Les trois hommes et trois Laotiens avaient été arrêtés le 4 juin dernier dans la province de Xieng Khuang, région montagneuse située au nord-est…

… de la capitale Vientiane. Selon Reporters Sans Frontières (RSF), ils achevaient un reportage sur la situation de la minorité H’mong. Détenus 35 jours dans des conditions qualifiées de “difficiles” par RSF, ils avaient été condamnés à quinze ans de prison par les autorités laotiennes pour “obstruction au travail des forces de l’ordre”. Leur procès avait eu lieu le 30 juin. Après une campagne médiatique et les pressions de différentes instances internationales et gouvernements étrangers, les deux journalistes et le pasteur protestant ont été libérés et immédiatement placés dans un avion pour Bangkok, mais aucune information n’a été donnée quant au sort des trois Laotiens arrêtés en même temps qu’eux. Toujours emprisonnés, les deux guides, Thao Moua et Tha Char Yang, ainsi que Pa Phue Khang, le chauffeur du groupe, avaient été condamnés le 30 juin à des peines de prison allant de 12 à 20 ans. Amnesty International s’est dit très inquiet sur leur sort, estimant qu’ils ont sans doute été torturés.

Dans un pays où la politique religieuse officielle à l’égard des chrétiens hésite entre une répression active et une tolérance inquiète (1), le fait que l’interprète des deux journalistes européens ait été un pasteur américain d’origine H’mong n’est pas anodin. Dans les provinces du nord du pays, en effet, le gouvernement harcèle depuis de nombreuses années les chrétiens des minorités ethniques, que ce soit au sein du peuple H’mong ou Khmu. Les autorités accusent le christianisme d’être “la religion de l’Amérique” et “une religion sans vérité”. Les chrétiens sont décrits comme “les laquais et les mercenaires payés par l’ennemi et lui servant de pieds et de mains” (2), allusion au soutien que la CIA a, au temps de la guerre en Indochine, apporté à la minorité H’mong, et qu’une partie de la diaspora H’mong installée aux Etats-Unis continue de fournir. Toutefois, dans les provinces de Sayabuly, de Luang Prabang et de Xieng Khuang, ce n’est sans doute pas la religion chrétienne qui inquiète le plus les autorités mais l’agitation continue entretenue par les minorités ethniques en rébellion larvée depuis longtemps, des groupes de bandits qui écument la région et aussi le trafic d’opium qui est très important (3).

Catholiques et protestants confondus, la population chrétienne au Laos compte environ 60 000 personnes (42 000 catholiques et un peu moins de 20 000 protestants – baptistes et évangélistes pour la plupart) pour une population totale de cinq millions de personnes. Le bouddhisme du petit véhicule (Theravada) est la religion majoritaire.