Eglises d'Asie

Célèbes : la condamnation à une peine de prison ferme d’un pasteur protestant est dénoncée par les milieux chrétiens comme un verdict politique

Publié le 18/03/2010




Le 16 juin dernier, un tribunal civil de Palu, chef-lieu de la province de Célèbes-Centre, a condamné à une peine de trois ans de prison ferme Rinaldy Damanik, pasteur protestant bien connu dans la région pour son engagement dans les accords de Malino qui ont ramené la paix dans la région de Poso, ravagée par trois années de heurts entre chrétiens et musulmans, de 1999 à 2002 (1). La cour a condamné le pasteur pour détention illégale d’armes à feu. Dès l’annonce du verdict, Rinaldy Damanik s’est dit déçu et a annoncé son intention de faire appel. Les milieux chrétiens de la province ont déclaré qu’ils considéraient que le verdict avait été dicté par des “considérations politiques”.

L’affaire remonte au 17 août dernier lorsque la police a arrêté le pasteur Damanik alors que celui-ci avait pris la tête d’un groupe de personnes parties aider des villageois attaqués par des émeutiers musulmans. Selon la police, des armes et des munitions se trouvaient à ce moment-là dans la voiture du pasteur. Cependant, lors de son arrestation le 17 août, le pasteur affirme qu’il n’a jamais été question de ces armes lors de son arrestation et que ce n’est que le 9 septembre dernier, lors de son inculpation officielle, à Djakarta, que la présence d’armes et de munitions a été mentionnée dans le dossier.

Pour les chrétiens de la région, l’inculpation et la condamnation du pasteur sont politiques. Agé de 43 ans, directeur du Centre de crise des Eglises chrétiennes de Célèbes-Centre, Rinaldy Damanik a été l’un des signataires des accords de Malino. Le pasteur Isaak Lambe, secrétaire général de la Communion des Eglises (chrétiennes) en Indonésie (PGI), a formé un comité interreligieux pour venir en aide au pasteur. Selon lui, le verdict est “injuste et sans fondement”. Pour le P. Alfrits Manus, curé de la paroisse catholique de Saint Paul, à Palu, les juges se montrent beaucoup plus cléments lorsqu’il s’agit de juger des musulmans. “Le droit doit s’appliquer de manière impartiale pour tous a-t-il commenté.

Sur le fond de l’affaire, des responsables locaux de l’Eglise catholique estiment que le procès a été truffé d’irrégularités, la police ayant construit son dossier en intimidant systématiquement les témoins à décharge et en fabriquant les charges dont elle avait besoin. Ces responsables mettent aussi en avant le fait que le tribunal a reporté le procès par trois fois, pour insuffisance de preuves, et n’a finalement accepté de se saisir de l’affaire que lorsque la police a produit un témoin oculaire déclarant avoir vu les armes placées dans la voiture du pasteur. Par ailleurs, le 26 décembre dernier, le pasteur Damanik, alors en détention provisoire, a manqué être empoisonné, de la mort aux rats ayant été introduite dans sa nourriture.