Eglises d'Asie

Timor occidental : l’ensemble des responsables religieux refuse au gouvernement la création de zones géographiques spécialement réservées à la prostitution

Publié le 18/03/2010




Au Timor occidental, région majoritairement chrétienne, les responsables religieux ont rejeté comme contraire à la morale un plan gouvernemental destiné à cantonner la prostitution dans certaines zones réservées. Ces responsables catholiques, protestants et musulmans ont déclaré que chacun d’entre eux avait appelé l’ensemble de leurs communautés à rejeter ce projet de zones réservées à la prostitution comme n’étant rien d’autre qu’une justification officielle d’une pratique immorale.

Marcel Bere, un catholique, chef du district de Belu, a exposé ce projet d’une “localisation” de la prostitution dans une allocution prononcée le 28 mai dernier à Atambua, à l’occasion de la “Soirée indonésienne de réflexion 2003 sur le syndrome du sida”. Le district de Belu se situe à la frontière entre le Timor occidental et le Timor-Oriental. Dans son allocution, Marcel Bere avait demandé à tous, religieux, responsables politiques ou animateurs sociaux, d’unir leurs efforts pour enrayer la propagation du sida. “Pour cette région, le gouvernement veut délimiter une zone réservée afin de pouvoir limiter la pratique de la prostitution et donc la propagation du sida, une zone où les maladies vénériennes pourront mieux être contrôlées par les fonctionnaires du ministère de la Santé a-t-il expliqué aux participants, en majorité des responsables politiques locaux et des chefs religieux.

Devant la presse, Mgr Antonius Pain Ratu, l’évêque d’Atambua, a rappelé que, d’après la morale catholique, la prostitution était un péché. “Si nous, catholiques, observons la loi morale, nous avons déjà accompli notre part de responsabilité dans la lutte contre le sida et les maladies vénériennes.” L’évêque reconnaît les immenses difficultés que peuvent rencontrer les femmes et comment elles peuvent être poussées vers la prostitution. “Mais les pressions économiques ne peuvent servir d’excuse. Les principes de la morale catholique ne justifient pas le recours à n’importe quel expédient pour affronter les nécessités de la vie a-t-il ajouté. Il a donc appelé les catholiques à s’opposer au projet gouvernemental d’une localisation géographique de la prostitution, suggérant en même temps que le gouvernement “mette plutôt sur pied des structures de formation qui permettraient aux femmes en difficulté d’apprendre un métier et d’obtenir du travail”.

M.S. Dethan Messakh, présidente de la Communauté ecclésiale protestante Polycarpe d’Atambua, et Hajj Hasan Muhammad, président du Conseil des oulémas d’Indonésie à Belu, ont affirmé de leur côté que toutes les religions sont opposées à la prostitution. D’après Hasan, “développer ce système de cantonnement de la prostitution dans des zones réservées serait comme une justification du péché”. Dethan Messakh a dit mettre régulièrement en garde sa communauté pour qu’elle se tienne éloignée de la prostitution, “ennemie de la vie familiale”.

Maksi Siri Besin, responsable d’une association locale d’anciens étudiants des universités de Yogyakarta, quant à lui, a expliqué à la presse, que son groupe d’à peine trois ans d’âge, avait organisé un programme d’aide aux prostituées des zones réservées du district de Belu. Les membres du groupe mettent à leur disposition des stages d’apprentissage à certains métiers comme la couture, mais, a-t-il avoué, ils ont beaucoup de difficulté à persuader les prostituées d’abandonner leur profession. “Elles disent devoir continuer leurs activités pour aider leur famille dit-il. Dans ces conditions, les membres du groupe ne peuvent que leur demander de prendre soin de leur santé et de celle de leurs clients.

Selon une source locale, le district de Belu où 94 % des 256 377 habitants sont catholiques, l’augmentation de la prostitution a été significative à partir des années 1970, et surtout à partir de 1975 quand une base militaire s’est ouverte pour les Indonésiens de retour du Timor-Oriental. Plus tard, en 1980, le gouvernement de Belu a autorisé la prostitution dans le village de Sesekoe pour éviter qu’elle ne se répande dans les quartiers résidentiels. Après plusieurs années, suite aux protestations des habitants, le village est devenu zone interdite. Le gouvernement a alors ouvert le village de Lakafehan, lui aussi fermé quelques années plus tard pour les mêmes raisons. La prostitution s’est donc installée dans d’autres villages non autorisés et sur les marchés le long de la frontière. La crainte des autorités de voir une prostitution non contrôlée menacer la santé publique serait à l’origine de cette décision gouvernementale d’une localisation géographique imposée.