Eglises d'Asie

Gujarat : les principaux témoins d’un incendie ayant causé la mort de 14 musulmans ont été menacés de mort par des militants hindouistes

Publié le 18/03/2010




Zahira Shaik, avec sa grande sour Sahira, auraient dû être les principaux témoins à charge dans le procès des 21 militants hindous, accusés d’avoir pris part à l’attaque de la boulangerie “Best Bakery” à Vadodara, qui avait eu lieu le 30 mars 2002, au tout début des troubles du Gujarat de l’année dernière. Quatorze musulmans, réfugiés dans l’établissement, y avaient trouvé la mort, brûlés vifs. Mais les deux sours, filles du propriétaire de la boulangerie, avec 35 autres des 73 témoins convoqués au procès, avaient au dernier moment refusé d’identifier les accusés, alors qu’elles l’avaient fait quelque temps plus tôt. Si bien que, faute de preuves, le tribunal avait relaxé l’ensemble des accusés, à l’issue d’un procès mené tambour battant, qui s’était achevé le 27 juin dernier (1).

C’était pourtant le témoignage de Zahira qui avait servi de fondement à l’ouverture du procès en question. Les 21 accusés avaient été arrêtés sur les déclarations de cette jeune fille de 18 ans qui gardait avec elle des vêtements tachés de sang et avait juré de se venger des meurtriers. Mais soudainement, lors de son apparition à la barre du tribunal au mois de mai, elle avait refusé de procéder à la reconnaissance des accusés. Quelque temps plus tard, elle disparaissait de sa résidence ordinaire pour réapparaître au bout de cinq semaines dans l’Etat voisin de Maharashtra où elle a confié aux médias qu’elle avait refusé de confirmer son premier témoignage pour “sauver sa peau”. Dans une conférence de presse accordée à Bombay au début juillet, elle a, en effet, affirmé avoir reçu des menaces de mort émanant de militants hindouistes qui l’ont forcée à revenir sur ses premières déclarations. Elle a même précisé qu’un député du parti au pouvoir, le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), l’avait menacée de mort si elle maintenait sa première position. Cependant, le 12 juillet suivant, elle a rencontré des membres de la Commission nationale des droits de l’homme pour leur demander de l’aider à porter une nouvelle plainte pour meurtre dans un autre Etat.

Sa grande sour Sahira qui, elle aussi, a quitté son ancien domicile pour une résidence discrète, reste sceptique sur les résultats des efforts déployés par sa sour pour obtenir justice. Jeune mariée, dépourvue d’argent et de pouvoir, elle n’a aucunement l’intention de continuer sa lutte pour la vérité, même si, a-t-elle déclaré, la mémoire du massacre de “Best Bakery” ne s’effacera de son esprit qu’au jour de sa mort.