Eglises d'Asie

Les évêques appellent les écoles catholiques à poursuivre l’accueil d’élèves non catholiques, même si elles doivent pour cela ne pas appliquer la loi sur l’éducation récemment votée

Publié le 18/03/2010




Depuis plusieurs mois, les milieux éducatifs, où l’Eglise catholique est fortement engagée, sont agités par une nouvelle loi sur l’éducation, finalement adoptée le 11 juin dernier et promulguée trente jours plus tard (1). A de nombreuses reprises, les responsables d’établissements chrétiens ont exprimé leur crainte de ne plus pouvoir assumer leur tâche s’ils avaient à satisfaire aux exigences de l’article 13 de cette nouvelle loi, article qui prévoit que les écoles donnent à leurs élèves une éducation religieuse conforme à l’appartenance confessionnelle de ces derniers. Pour les établissements chrétiens, cela signifie l’embauche de professeurs musulmans de religion pour dispenser une instruction religieuse musulmane à leurs élèves musulmans et l’aménagement de lieux de culte adaptés. Tandis que dans plusieurs régions du pays des appels à ne pas appliquer cette loi ont été lancés (2), les évêques, par la voix de la Commission pour l’éducation de la Conférence épiscopale, ont écrit, dès le 12 juin dernier, à tous les diocèses pour leur demander de continuer à fournir des services éducatifs en accord avec les textes en vigueur avant le vote de la nouvelle loi sur l’éducation.

Dans la lettre diffusée le 12 juin, Frère Heribertus Sumarjo, secrétaire exécutif de la Commission pour l’éducation, écrit : « Les droits doivent être compris comme la possibilité de choisir. L’existence du droit des élèves à recevoir une certaine éducation ne doit pas être compris, par les institutions éducatives, comme une obligation à respecter ce droit. » En d’autres termes, a explicité le religieux le 19 juillet dernier à Djakarta lors d’une réunion de responsables éducatifs catholiques, les écoles catholiques, qui, pour la plupart, proposent un enseignement religieux chrétien, ne doivent pas s’empêcher d’accueillir des élèves non catholiques sous prétexte que ces élèves ne pourraient en leur sein recevoir une éducation religieuse conforme à leur appartenance confessionnelle, car « notre caractère catholique est inclusif et développe des valeurs à la fois universelles et spécifiquement chrétiennes a-t-il expliqué.

Pour Yos Rahawadan, député et membre du Parti démocratique catholique, la position de l’Eglise est légitime. Son parti demande aux écoles catholiques de seulement proposer, à titre d’enseignement religieux, une éducation religieuse catholique, à charge pour les parents d’élèves qui ne sont pas catholiques de signer une lettre par laquelle ils reconnaissent et acceptent ce fait. « Nous devons maintenir le niveau de notre éducation et continuer d’accueillir dans nos écoles des élèves d’autres religions a-t-il affirmé.

L’année scolaire commençant en juillet, il est encore trop tôt pour savoir comment les autorités indonésiennes vont appliquer la loi récemment promulguée. Les évêques ne souhaitent pas que leur prise de position soit comprise comme un geste d’hostilité. Pour Mgr Petrus Turang, archevêque de Kupang, diocèse situé au Timor occidental, région majoritairement chrétienne, une application judicieuse de la nouvelle loi aidera à créer « une attitude nouvelle » de solidarité dans une société indonésienne plurielle. Appelant le gouvernement à considérer les écoles privées comme des « partenaires dans la construction de la nation l’évêque a exprimé l’espoir que la nouvelle loi puisse être « un lieu partagé pour favoriser une stabilité nationale où toutes les composantes sociales du pays mettent en commun leurs trésors cachés ». Ignorer le caractère spécifique des écoles privées obérerait à terme la capacité du pays à se doter de ressources humaines qualifiées, a-t-il ajouté.