Eglises d'Asie

Poursuivi devant les tribunaux civils par deux de ses diocésains, un évêque japonais est condamné pour diffamation

Publié le 18/03/2010




Le 25 juin dernier, le président du tribunal de Matsuyama a condamné Mgr Satoshi Fukahori, évêque du diocèse catholique de Takamatsu (île du Shikoku, préfecture de Ehime), à verser un dédommagement de 400 000 yens (3 000 euros) à chacun des deux catholiques qui reprochaient à leur évêque de les avoir diffamés.

Les deux plaignants, Takamitsu Kuribayashi, 42 ans, et Genzo Morioka, 66 ans, deux laïcs catholiques, s’étaient opposés à la construction d’un bâtiment devant abriter le séminaire diocésain Redemptoris Mater (1dirigé depuis douze ans par des prêtres appartenant au Néo-Catéchuménat, mouvement charismatique d’origine espagnole fondé en 1964 et introduit au Japon en 1973. Les deux plaignants avaient exprimé leur opposition à cette nouvelle construction au cours d’une session du Conseil diocésain pour l’apostolat des laïcs. A leur suite, plusieurs conseillers reconnaissaient que cette construction représentait une très grosse charge pour ce petit diocèse d’à peine 5 500 catholiques et surtout que ce bâtiment serait moins à l’usage du diocèse qu’à celui du Néo-Catéchuménat (2). Mgr Fukahori, inquiet de voir ses vingt-huit séminaristes vivre dans des baraques préfabriquées, insista. En juillet 2000 puis en mars 2001, il publia deux lettres pastorales citant nommément Kuribayashi et Morioka non seulement pour leur opposition critique négative mais pour avoir empêché la réalisation d’un reportage télévisé sur le séminaire par la NHK (chaîne publique).

Les deux hommes assignèrent Mgr Fukahori en justice pour diffamation. Pendant les deux ans que dura le procès, la position de l’évêque a toujours été qu’un différend à propos de l’existence ou non d’un séminaire, affaire interne à l’Eglise, ne pouvait relever que d’un tribunal ecclésiastique. Le tribunal, quant à lui, a reconnu le délit de diffamation et l’a sanctionné.

Mgr Fukahori n’était pas présent au moment du verdict, mais Morioka, au cours de la conférence de presse qui a suivi, a déclaré : “Grâce à ce verdict, toute la lumière va être faite à propos de ce séminaire et ce sera une bonne chose”, ajoutant : “Je ne suis pas tellement content d’avoir gagné. Mais j’espère vraiment pouvoir discuter en Eglise et avec l’évêque pour trouver comment arriver à résoudre le problème de ce séminaire.” Quant à son avocat, Shun-ishi Azuma, il a simplement constaté “que tant que le responsable d’une Eglise locale, l’évêque, ne pourra entendre les avis de sa communauté de façon démocratique et administrer son diocèse en toute clarté, l’Eglise aura des ennuis ».

Depuis ce verdict du 25 juin, pas une semaine ne s’écoule sans que le courrier des lecteurs de l’hebdomadaire catholique national Catholic Shinbun ne publie une lettre à ce sujet. Lettres de réprobation sur ce recours à la justice civile pour traiter d’une affaire interne à l’Eglise et lettres, moins nombreuses, il est vrai, pour demander plus de concertation dans l’Eglise.

Mgr Fukahori a déclaré qu’il ne fera pas appel du verdict.