Eglises d'Asie

Bombay : après les explosions du 25 août, des comités interreligieux essaient de désamorcer les passions et d’appeler à la concorde civile

Publié le 18/03/2010




Mumbai, autrefois appelée Bombay, a été, depuis le mois de décembre dernier, le théâtre de six explosions meurtrières. Les deux dernières ont eu lieu le 25 août en deux des lieux les plus fréquentés de l’agglomération, tuant 52 personnes et en blessant de nombreuses autres (1). Alors que le gouvernement régional et la police craignent qu’éclatent des émeutes intercommunautaires, les responsables de la communauté catholique s’efforcent de propager autour d’eux un climat de calme et d’harmonie civile. Le P. D’Souza, qui est directeur de la Commission justice et paix de l’archidiocèse, a déclaré que la population de la plus grande cité de l’Inde devait avoir une conscience aiguë de la nécessité de la concorde communautaire. Pour ce faire, les autorités religieuses comptent largement sur des groupes réunissant des personnes de toutes les religions pratiquées à Bombay, appelés les “Comités Mohalla” (‘de rue’).

Ceux-ci ont déjà joué dans le passé un rôle très important pour le maintien de la paix et du calme dans la ville. Le mouvement des Comités Mohalla avait été fondé en 1993 après qu’une série de bombes eut explosé dans la ville entraînant la mort de quelque 250 personnes. La police et les autorités gouvernementales avaient attribué la responsabilité des explosions à certains militants musulmans qui avaient agi en représailles de la démolition de la mosquée d’Ayodhya en décembre 1992 et des troubles qui avaient eu lieu ensuite, au cours desquels environ 3 000 personnes avaient trouvé la mort, pour la plupart des musulmans (2).

Dix ans plus tard, les Comités Mohalla sont au nombre de vingt-trois et rassemblent plus de quatre cents membres qui se sont donné pour tâche de mobiliser la population autour de l’idée de concorde et d’inculquer aux citoyens la conscience de la nécessité de la paix civile. Chaque comité organise régulièrement des réunions avec la police locale et les résidants du quartier au cours desquelles est analysée la situation présente du quartier. Julio Francis Ribeiro, qui est le président de ce mouvement, a expliqué qu’une des préoccupations des comités est d’empêcher l’arrivée sur place d’éléments négatifs qui pourraient créer la panique en répandant des rumeurs et en excitant des passions communautaristes. Les catholiques qui sont présents dans les comités depuis leur création considèrent que ceux-ci leur permettent d’accomplir une double mission, aider la police et répandre dans le public des idées de concorde civile.

Selon le juge retraité, S.M. Daud, si la population de la ville a gardé son calme après les deux dernières explosions, c’est qu’elle a peu à peu pris conscience que les attentats étaient en réalité des tentatives pour détourner son attention des luttes réelles contre la pauvreté et pour le développement. Il a fait remarquer que les récentes explosions se sont produites dans des centres d’affaires, un marché de la joaillerie et un haut lieu touristique, et non plus dans des lieux de culte ou aux sièges de partis politiques. Il en a conclu que les attentats avaient pour objectif de porter tort à l’économie de la ville. Il a aussi observé que ni les partis pro-hindous, ni d’autres groupes n’avaient appelé à des manifestations de protestation contre ces explosions qui ont fait autant de victimes musulmanes que de victimes hindoues. Les personnes interrogées à la télévision ne pensaient pas que les attentats aient été motivés par des rivalités intercommunautaires. L’ancien juge pense même que ces explosions pourraient être attribuées à deux gangs rivaux.

Au début de septembre dans les quartiers affectés, les activités commerciales reprenaient peu à peu. Aussitôt après les attentats les deux sites avaient été cernés par la police et isolés, mais c’était davantage en raison de la visite du Premier ministre et du leader de l’opposition, Sonia Gandhi.