Eglises d'Asie

Des hauts fonctionnaires de la police et du gouvernement découvrent publiquement l’ampleur du trafic de femmes et d’enfants vietnamiens à destination de l’étranger

Publié le 18/03/2010




Le journal vietnamien diffusé par Internet Viêt Nam Express (1) a rapporté la tenue à Hô Chi Minh-Ville, le 8 septembre dernier, d’une réunion dont l’objectif affiché était de trouver des solutions pour mettre un terme au trafic de femmes et d’enfants à destination de l’étranger, particulièrement actif aussi bien au nord qu’au sud. Le général Lê Thê Tiêm, secrétaire d’Etat à la Sécurité, a d’emblée situé le problème aussi bien en ce qui concerne sa dimension que la difficulté à lui trouver une solution. Il a affirmé qu’il s’agissait là d’un phénomène extrêmement compliqué en apparence insoluble : “Des dizaines de milliers de cas se produisent chaque année : par supercherie, des femmes sont envoyées à l’étranger pour y devenir prostituées ou tenir lieu d’épouses illégales ; des enfants sont adoptés par des familles étrangères.”

Les débats qui ont suivi ont illustré les propos pessimistes du secrétaire d’Etat. Les pays où sont entraînées les malheureuses victimes de ce trafic cynique sont en ordre d’importance la Chine, le Cambodge, Taiwan, Hongkong, la Malaisie et la Thaïlande. Au cours des dix années écoulées, on estime que dans les provinces du Nord-Vietnam, plus de 15 000 femmes et enfants ont été, la plupart du temps par supercherie, quelquefois volontairement amenés en Chine. Pour la seule année 2002, 1 088 femmes et enfants ont été victimes de ce trafic. Sur ce nombre 1 066 étaient des femmes emmenée en Chine pour y être mariées ou livrées à la prostitution. Les vingt-deux autres victimes étaient des enfants de moins de dix ans et de sexe masculin.

Au cours de la réunion, le Cambodge a été pointé du doigt comme l’un des principaux pays où aboutit le sinistre trafic. Selon les estimations de l’Unicef, 45 000 prostituées y exercent leurs activités dont une grande partie vient de l’étranger. Les Vietnamiennes sont au nombre de 4 000 dont une bonne partie (entre 15 et 30 %) est encore mineure. Dans le quartier spécial de Phnom Penh, près de vingt maisons closes abritent plus de trois cents prostituées vietnamiennes, qui ont, pour la plupart, moins de 18 ans. Elles sont originaires de provinces du delta du Mékong, comme An Giang, Dông Thâp, Cân Tho, Kiên Giang…

Un autre pays a été évoqué par Mme Lê Thi Thu, ministre et présidente du Comité de la population, de la famille et des enfants. Il s’agit de Taiwan qui a connu au cours des années récentes un grand afflux de Vietnamiennes conduites dans ce pays par des mariages contractés au Vietnam, des promesses de mariage et des sommes d’argent procurées par des intermédiaires. Au mois de décembre 2002, on comptait 65 000 mariages entre Vietnamiennes et Taïwanais. La plupart, faisait remarquer Mme Lê Thi Thu, comportaient pour l’épouse et sa famille des avantages pécuniaires. Pour beaucoup de ces épouses, il ne s’agissait que d’un faux mariage et certaines se trouvèrent livrées à la prostitution. D’autres furent obligées de recourir au divorce à cause du grossier comportement de leur époux.

L’adoption d’enfants vietnamiens par des étrangers donne également lieu à des pratiques que les représentants du pouvoir judiciaire à la réunion ont qualifiées de préoccupantes. Beaucoup d’individus ou d’organisation étrangères venus au Vietnam s’abouchent avec des intermédiaires vietnamiens qui se font rémunérer pour collecter des enfants, remplir les formalités nécessaires. Les enfants ainsi adoptés sont, pour la plupart abandonnés, nés en dehors du mariage, ou nés dans des campagnes pauvres.

Après avoir évoqué les ruses utilisées par les trafiquants pour piéger leurs victimes ainsi que les difficultés rencontrées par la police pour mettre un terme à ces pratiques déshonorantes, les représentants du ministère de la sécurité ont évoqué un certain nombre de mesures susceptibles d’aider à la solution de ce problème. On a ainsi évoqué l’assistance apportée aux anciennes victimes revenues à une vie ordinaire, l’augmentation du niveau de vie des régions où se recrutent les prostituées, la mise en garde des familles contre les ruses des trafiquants, l’intensification de la collaboration avec les nations concernées.