Eglises d'Asie

Orissa : au procès des présumés assassins d’un pasteur australien et de ses enfants, la sentence est reportée de huit jours à la dernière minute

Publié le 18/03/2010




Il était prévu que, le 8 septembre 2003, le tribunal de l’Etat d’Orissa rende son jugement dans le procès des quatorze auteurs présumés du meurtre du pasteur australien Graham Stuart Staines. Celui-ci avait été brûlé vif en janvier 1999 avec ses deux jeunes enfants de 7 et 9 ans, dans sa voiture incendiée par un groupe de militants hindouistes au cours de la nuit. Les faits avaient eu lieu à Manoharpur, un village isolé du district de Keonjhar, dans l’Etat d’Orissa (1). Cet assassinat odieux avait provoqué une grande émotion à travers tout le pays ainsi qu’à l’étranger.

En prévision des réactions qui seraient suscitées par le verdict attendu avec passion par beaucoup de monde depuis plus de quatre ans, des mesures de protection tout à fait exceptionnelles avaient été prises, des renforts policiers avaient été placés à l’intérieur et autour des bâtiments du tribunal et les entrées soigneusement contrôlées par des détecteurs de métal. Les quatorze accusés avaient été amenés sur les lieux sous haute sécurité alors que plus de 1 500 personnes, se déclarant elles-mêmes membres du “Dara Sena” (‘l’armée de Dara’) s’étaient assemblées près du tribunal. La police les a empêchés d’investir les lieux et a arrêté six d’entre elles.

Or, bien que la séance du tribunal ait effectivement été ouverte le 8 septembre selon les prévisions, quelques moments plus tard, le juge adjoint a annoncé que le verdict de ce procès (2) était reporté à la semaine suivante. Le juge Mahendranath Patnaik qui devait lire la sentence s’est déclaré indisposé et incapable de participer à la session. Cette décision a particulièrement surpris et peiné les chrétiens qui s’étaient réjouis en apprenant que la sentence allait être rendue le 8 septembre et avaient entamé des prières publiques pour que justice soit rendue.

Tout de suite après le meurtre du pasteur Staines, l’enquête avait été confiée à une équipe mixte composée de membres de la police de l’Etat et d’agents du Bureau central fédéral d’enquête. Assez rapidement, l’équipe a dressé une liste de dix-huit personnes jugées coupables. Quatorze d’entre elles ont été arrêtées et devraient connaître leur jugement le 18 septembre. Le principal accusé, impliqué déjà dans de multiples autres affaires, est Ravindra Kumar Pal, plus connu sous le nom de Dara Singh. Dès le début, son nom avait été cité comme l’instigateur principal de l’attaque menée contre le pasteur protestant (3). Il fut arrêté plus d’un an après les faits, le 1er février 2000 (4), alors qu’il se cachait dans la forêt. Identifié par plusieurs témoins (5), sa culpabilité semble assurée. Un juge de la Cour suprême de l’Inde, D.P. Wadhwa, qui a enquêté sur l’affaire sur ordre du gouvernement fédéral, l’avait formellement identifié comme coupable dans un rapport rédigé dès 1999.

Le procès qui s’était ouvert au tribunal de Bhubaneswar, capitale de l’Orissa, vingt mois après les faits, le 1er décembre 2000, était sans conteste le plus important jamais connu dans l’histoire judiciaire de l’Etat. Tandis que plus de 108 témoins de la défense et de l’accusation se succédaient à la barre, coups d’éclat, revirements et volte-face n’ont pas manqué. Le 1er février 2002, l’un des quatorze accusés, Mahendra Hembram, se proclamait le seul coupable du meurtre et déclarait avoir incendié, lui-même, la voiture du pasteur. Deux mois plus tôt, un autre accusé avait avoué à la cour avoir fait partie du groupe commandé par Dara Singh ayant mis le feu au véhicule. Une femme, témoin de la défense, avait prétendu avoir été agressée par le pasteur australien dans une cabane, la veille de sa mort. Un avocat a même soutenu que l’incendie de la voiture avait eu pour cause un court-circuit dû au système électrique défectueux.