Eglises d'Asie – Indonésie
Papouasie occidentale : l’évêque du diocèse catholique de Jayapura demande au gouvernement central de respecter les procédures initialement prévues pour aboutir à la division de la province
Publié le 18/03/2010
La question de la division de la Papouasie occidentale, vaste province de 411 000 km , colonie hollandaise jusqu’en 1963, année de son rattachement à l’Indonésie, est ancienne (3). Peu peuplée – avec un peu moins de trois millions d’habitants – mais riche de ressources minières, pétrolières et gazières considérables, cette province souffre d’un sous-développement important. Les premiers projets de division administrative remontent à vingt ans. Plus récemment, en 1999, le gouvernement Habibie avait fait voter une loi prévoyant la division de la Papouasie en trois provinces. Cette loi fut promptement enterrée, l’action du gouvernement ayant été perçue par les militants de la cause indépendantiste papoue comme une tentative visant à affaiblir leur mouvement. Des manifestations de rue avaient eu lieu dans la province et avaient culminé par l’occupation des bureaux du gouverneur de la province à Jayapura durant trois jours (4). En 2001, le président Abdurrahman Wahid avait donné un certain nombre de signes de bonne volonté en direction des indépendantistes, permettant notamment le changement de nom de la province d’Irian Jaya en Papouasie occidentale (5). La “Loi sur l’autonomie spéciale de la Papouasie” prévoyait alors que “la division de la province de Papouasie (en plusieurs nouvelles provinces) serait menée en accord avec le Conseil des peuples papous (MRP)”. Ce Conseil n’a en fait jamais été réuni et, au début de cette année, la présidente Megawati Sukarnoputri a signé un décret ordonnant que le processus de division soit accéléré. Pour nombre d’observateurs, cette mesure a été influencée par les militaires indonésiens qui voient dans la division de la province un moyen d’affaiblir le Mouvement pour la Papouasie libre (OPM), la principale organisation indépendantiste de la province dont le leader, Theys Hiyo Eluay, a été assassiné en novembre 2001 par les forces spéciales de l’armée (6).
Le 6 février dernier, la proclamation de la création de la province d’Irian Jaya Ouest n’avait pas entraîné de violence. Les responsables locaux des cinq grandes religions avaient cependant protesté sur la politique du fait-accompli de l’exécutif indonésien. Le 23 août dernier, la proclamation de la nouvelle province d’Irian Jaya Central a provoqué des réactions violentes, des groupes armés de lances et d’arcs s’affrontant dans Timika. Ces violences et les morts ont amené le gouvernement à faire marche arrière et à annuler le décret créant la nouvelle province mais, pour Mgr Leo Laba Ladjar, “pour éviter de nouveaux incidents et la mort d’innocents, la division (de la province) doit suivre les procédures prévues (par la loi), à commencer par la convocation du Conseil des peuples papous”. L’évêque catholique a également invité les habitants de la province, qu’ils soient favorables ou opposés à la division de la Papouasie, à se respecter les uns les autres.
A Timika, ville sensible car située dans le district de Mimika où se trouve la plus importante mine d’or et de cuivre du monde, exploitée par la société américaine Freeport McMoran, les heurts ont, semble-t-il, opposé des migrants, originaires d’autres parties de l’Indonésie, à des hommes de la tribu locale des Amunge, les premiers étant favorables à la création de la nouvelle province et les seconds y étant opposés. A de nombreuses reprises par le passé, les Papous ont organisé à Timika des manifestations pour protester contre l’exploitation de la mine et les violations des droits de l’homme auxquelles se livre le personnel de sécurité indonésien de la mine. Selon Tom Beanal, chef coutumier de la tribu des Amunge, les heurts de la fin du mois d’août ont dans un premier temps eu trait à la division de la province avant de tourner, dès les premiers morts, à l’affrontement tribal.
Le 31 août, de nouveaux affrontements ont fait deux morts – deux migrants – et quatre blessés graves à Timika. L’armée a annoncé l’envoi en renfort de 2 000 hommes de troupe. Le 3 septembre, selon le P. Jack Mote, curé de la paroisse catholique des Rois mages à Timika, la situation était redevenue calme. L’Eglise, a-t-il témoigné, s’efforce de persuader les deux camps de ne pas aggraver la situation. “Nous avons rendu visite aux chefs coutumiers et aux chefs de communauté, en faisant du porte-à-porte, dans les villages où les catholiques forment la majorité de la population. Nous leur demandons de ne pas céder aux provocations, de ne pas recourir à la violence et de ne pas chercher à se venger a-t-il précisé.