Eglises d'Asie

Des organisations musulmanes proposent une définition du “musulman modéré” à Singapour

Publié le 18/03/2010




Le 14 septembre dernier, à l’issue de deux journées de débats, la grande majorité des 150 membres de Pergas, l’Association des professeurs de religion et des universitaires musulmans de Singapour, a approuvé une liste de préceptes définissant, selon elle, la façon dont les musulmans de Singapour peuvent mener leur vie en tant qu’adeptes “modérés” de la religion musulmane. Réunis à la mosquée Assyakirin, située dans le quartier de Jurong à Singapour, les délégués étaient assemblés pour débattre du thème de “la modération dans l’islam”.

Selon les responsables de Pergas, association qui s’est trouvée récemment en butte aux autorités de la cité-Etat sur la question du “tudung le foulard islamique (1), les préceptes définis lors des deux journées de débats rejoignent les vues exprimées par le Muis, le Conseil de la religion musulmane de Singapour, organisation contrôlée par le gouvernement et responsable de la direction religieuse de la communauté musulmane de Singapour. Dans son adresse inaugurale, Alami Musa, président du Muis, a dressé le portrait-type du musulman modéré. Selon lui, un tel musulman a suffisamment confiance en lui pour adhérer aux principes et aux valeurs islamiques tout en faisant face aux problèmes posés par la société contemporaine. L’identité musulmane d’une telle personne est “progressiste ce trait de caractère signalant une capacité à aborder sereinement les demandes d’un Etat moderne et compétitif dont la population est formée de plusieurs composantes raciales et religieuses. Selon Alami Musa, les musulmans modérés sont également prêts à apprendre des autres cultures et à accueillir la diversité des points de vue pour autant que ceux-ci n’aillent pas contre les valeurs et les principes de la religion musulmane.

Mohamad Hasbi Hassan, président de Pergas, a pour sa part appelé les Singapouriens musulmans à l’unité. La communauté musulmane de Singapour, a-t-il poursuivi, ne doit pas se laisser dicter son ordre du jour par des non-musulmans, en particulier les universitaires et les écrivains occidentaux critiques de l’islam. Dans cet ordre d’idées, a poursuivi Murat Aris, vice-président de Pergas, les attentats du 11 septembre 2001 commis aux Etats-Unis ont popularisé toute une série de commentaires négatifs sur l’islam et initié une véritable “islamophobie”. Face à l’expression de tels stéréotypes négatifs, a-t-il ajouté, “certains musulmans ici peuvent y succomber et tendre à demander pardon. D’autres peuvent réagir par l’émotion et se laisser séduire par des interprétations de l’islam que des musulmans radicaux cherchent à répandre en propageant la haine de l’autre. Les deux réponses, estimons-nous, ne sont pas constructives.”

Les responsables de Pergas ont annoncé à l’issue des deux journées de débats que les préceptes définis allaient être “finalisés” puis publiés sous forme d’une brochure qui servira de base pour engager un dialogue entre musulmans et non-musulmans afin de “renforcer la compréhension mutuelle” entre communautés.

Selon les observateurs, la discussion et la finalisation d’une telle brochure s’inscrit dans la logique définie au mois de juin dernier à l’occasion de la publication d’une “Déclaration sur l’harmonie religieuse” (2Confrontées à ce qu’elles perçoivent comme une radicalisation d’une partie de la communauté musulmane de la cité-Etat, où les musulmans, principalement d’origine malaise, représentent 17 % de la population totale de Singapour, les autorités gouvernementales font certes appel à l’appareil policier pour démanteler d’éventuelles cellules islamistes clandestines mais comptent aussi sur les responsables religieux pour veiller au maintien de l’ordre social. S’agissant des musulmans, elles en appellent, via le Muis et les organisations satellites de ce dernier, au contrôle interne que les religions peuvent exercer sur leurs adeptes.