Eglises d'Asie

LETTRE PASTORALE DE LA CONFERENCE DES EVEQUES CATHOLIQUES DU VIETNAM POUR L’ANNEE 2003

Publié le 18/03/2010




Aux prêtres, religieux, séminaristes,

à nos frères et soeurs les fidèles,

INTRODUCTION

1 – Nous les cardinaux, archevêques, évêques et administra-teurs participant au Congrès annuel de la Conférence épiscopale du Vietnam, du 6 au 11 octobre 2003 à Bai Dâu, Vung Tau, vous envoyons nos salutations et nos souhaits de paix dans “la grâce de Jésus Christ, Notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père et la communion de l’Esprit Saint” (Missel Romain). Nous vous sommes reconnaissants de l’esprit de communion que vous manifestez à vos pasteurs dans la prière. Que le Seigneur nous garde unis dans son amour, pour que l’Eglise “obtienne toujours la paix et soit conduite vers l’unité parfaite” (Missel romain), comme le veut le Seigneur.

Cette année, à l’occasion du 25e anniversaire du pontificat de Jean-Paul II, le 16 octobre 2003, et dans la perspective du 48e Congrès eucharistique qui aura lieu du 10 au 17 octobre 2004 à Mexico, sur le thème : “L’eucharistie, lumière et vie du nouveau millénaire”, nous vous invitons à répondre à l’appel du Saint Père : “Allez vers le large ! appel qui oriente la prière et les activités de l’Eglise au Vietnam vers l’annonce de l’Evangile.

Frères et sours,

I – L’ANNONCE DE L’EVANGILE EST UNE MISSION

2 – Elle a sa source dans la vie du Dieu trinitaire

L’annonce de l’Evangile est une grâce et une vocation spécia-le de l’Eglise, elle fait partie de la nature profonde d’une Eglise qui est née de l’amour salvateur du Dieu en trois personnes. L’amour trinitaire se manifeste à travers l’envoi du Fils dans le monde par le Père pour le sauver (Jn 3,16) et la venue de l’Esprit saint dans l’Eglise pour continuer et achever la mission du Fils. La Trinité est la source de l’Eglise : c’est pour cela, que l’Eglise est par nature missionnaire (Cf. Ad Gentes 2). A de multiples reprises, Jésus a fait comprendre à ses disciples que leur mission d’annoncer la Bonne nouvelle provenait de lui et que sa propre mission venait du Père : “Comme le Père m’a envoyé dans le monde, je vous envoie dans le monde” (Jn 17,18, Jn 20,21)

3 – L’exemple de Notre Seigneur Jésus Christ

Jésus est le premier et le plus grand des envoyés de l’Evangile. Dès le début il a affirmé que sa mission était la prédication de la Bonne Nouvelle conformément aux directives de Dieu le Père : “L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres” (Lc 4,18)

Dans sa prédication, Jésus n’a pas ménagé ses forces, se ren-dant en tout lieu, prenant contact avec toutes les catégories de personnes, réalisant de très nombreuses ouvres merveilleuses témoignant de la venue du royaume de Dieu.

4 – Fidèles à la tradition léguée par la primitive Eglise

En fondant son Eglise, Jésus lui a confié la mission d’annon-cer l’Evangile (Cf. Mc 16,15, Mt 28,19-20). Ce commande-ment est devenu la mission essentielle de l’Eglise du Christ. Celle-ci n’existe pas pour elle mais pour les hommes et à cause d’eux. L’Eglise existe pour annoncer la Bonne Nouvelle, pour transformer en disciples du Christ ceux qui l’accueillent sincèrement et rassembler en un seul tout pour le Seigneur tous ses enfants dispersés (Jn 11,52).

Obéissante à Jésus-Christ, sous l’effet de l’Esprit Saint, l’Eglise primitive s’est engagée avec ardeur dans l’annonce de l’Evangile, prête à offrir sa vie pour témoigner de la grâce du salut que Jésus a réalisé à travers le mystère de sa passion et de sa résurrection (Ac 2, 37-40, Cor 9,16).

5 – Conformément à l’enseignement de l’Eglise

La prise en compte de l’annonce de l’Evangile appartient à la nature de l’Eglise pèlerinant en ce monde (Cf. Ad Gentes). Elle ne cesse pas de rappeler à ses enfants qu’ils doivent se donner de toutes leurs forces au travail missionnaire et en même temps s’adapter afin d’apporter l’Evangile à l’humanité de notre temps (Cf. Evangelii Nuntiandi, Redemptoris Missio). Au début du nouveau millénaire, Jean-Paul II une fois de plus a appelé toutes les composantes de l’Eglise à s’avancer vers le large de la mission (Cf. Novo Millenio Eunte). C’est une mission qu’il a spécialement confiée, en ce nouveau millénaire, aux Eglises en Asie (Cf. Ecclesia in Asia), parmi lesquelles on compte l’Eglise au Vietnam.

II – ANNONCER L’EVANGILE AUX VIETNAMIENS AUJOURD’HUI

6 – Prolonger la marche en avant de la mission

Répondant à l’invitation du Christ, depuis de nombreux siècles, de nombreuses générations de disciples du Seigneur se sont avancées sur ce chemin. Par groupes entiers, ils ont traversé fleuves et forêts et se sont portés vers le large sur la mer immense. Combien d’entre eux ont sacrifié leur vie dans des régions désolées ! Combien ont abandonné leurs corps au fond de la mer. Mais pour un groupe qui tombait, un autre se relevait, lui succédant pour aller porter l’Evangile jusqu’aux extrémités du monde.

C’est grâce aux missionnaires remplis d’ardeur que notre patrie, le Vietnam a pu accueillir l’Evangile. Grâce à la vie de foi héroïque de nos anciens, la foi n’a cessé de se développer, et nous a été transmise comme un précieux héritage.

Au début du nouveau millénaire, la mission d’annoncer l’Evangile a été remise entre nos mains. Nous devons marcher sur les traces des missionnaires, pleins d’ardeur apostolique, poursuivant la tradition de fermeté de nos ancêtres, ces martyrs héroïques. Le Saint Père nous lance cet appel : le premier millénaire fut celui de la mission en Europe ; le second, celui de mission en Amérique ; le troisième sera celui de la mission en Asie. (Cf. Ecclesia in Asia). Nous répon-drons aux souhaits de l’Eglise en apportant l’Evangile à nos frères sur cet immense territoire. Plus particulièrement, nous l’apporterons à nos frères vivant sur le sol de notre pays, le Vietnam bien aimé.

Pour que notre évangélisation soit efficace, le Saint Père nous encourage à redoubler d’ardeur apostolique, de nous avancer vers les milieux ayant besoin de la lumière de l’Evangile et d’utiliser les moyens adaptés à l’humanité d’aujourd’hui.

7 – Avec une ardeur apostolique renouvelée

Nous devons entamer notre route avec un esprit apostolique, une ardeur animée de la force de l’Esprit Saint, un zèle missionnaire brûlant de sa flamme, des initiatives prenant naissance dans sa lumière.

Tel était en effet l’esprit du Christ Jésus, lui qui est venu “annoncer l’Evangile aux pauvres” (Lc 4,18). Tel était l’esprit des apôtres après le jour de la Pentecôte, quand ils ont ouvert les portes pour sortir à la rencontre de tous, vers tous les horizons, pour rendre témoignage au Christ ressuscité (Ac 2). C’était aussi l’esprit des premières communautés, vivant dans la concorde et l’amour mutuel (Ac 2,44-46) propageant leur foi dans toutes les circonstances de leur vie. Tel a été également l’esprit des missionnaires s’en allant dans tous les pays, quelles que soient leurs langues, leur race, leur culture ou leur religion.

8 – Vers les milieux ayant besoin de la lumière de l’Evangile

Il faut vous aventurer hardiment vers de nouveaux milieux. Ce peut être de nouveaux milieux géographiques n’ayant jamais entendu la prédication de l’Evangile, des terres où les missionnaires n’ont jamais mis les pieds, des milieux culturels, politiques, économiques, scientifiques, techniques. Autant de territoires qui ont besoin de la présence du Christ, du témoignage de l’Eglise et de la lumière de l’Evangile.

Avancez-vous vers les hommes n’ayant jamais entendu la prédication de l’Evangile ou qui l’ayant entendu ne l’ont jamais mis en pratique. Soyez présents dans tous les milieux de l’humanité, car rien de ce qui est humain n’est étranger à l’Eglise (Cf. Gaudium et Spes 1). L’Eglise doit annoncer l’Evangile et faire en sorte que le Christ devienne le tout de tous. L’Evangile doit s’incarner dans tous les territoires humains.

9 – Avec des moyens adaptés à l’humanité d’aujourd’hui

L’évangélisation doit servir de fondation à la prière et à la disponibilité à s’engager sur la route à la suite du Christ sous l’action du Saint Esprit. Cependant pour que la vérité évangélique devienne transparente, facile à comprendre et à accueillir, nous devons utiliser des moyens appropriés à l’humanité d’aujourd’hui. Il nous faut utiliser une langue et un style au diapason de la culture et de la psychologie de nos contemporains. Il s’agit là d’une façon de faire toute impré-gnée de l’Evangile, accompagnée d’humilité, de sincérité et d’affection. C’est encore une attitude respectueuse sachant utiliser le dialogue avec les interlocuteurs. Il s’agit de mettre en ouvre d’une façon inventive les techniques actuelles au service de l’annonce de l’Evangile.

III – DES ACTIONS CONCRETES

Dans le passé, les diocèses, les paroisses, les conseils pasto-raux, les évêques, les prêtres, les religieux, les séminaristes et les laïcs, nos frères et sours ont déjà accompli des tâches missionnaires. Cette année, année missionnaire pour l’Eglise du Vietnam, nous proposons que toutes les composantes du Peuple de Dieu se conforment à leur propre vocation et à leur fonction pour participer d’une façon positive à l’annonce de l’Evangile en accomplissant les tâches concrètes suivantes.

10 – Le point de vue spirituel

– Prier pour la mission : C’est une tâche de première importance. Voyant l’immense moisson et le manque d’ouvriers, Jésus lui-même a demandé à ses disciples de prier : “Priez pour que le maître de la moisson envoie des ouvriers” (Mt 10,38). Prions pour que de nombreux cours généreux sachent s’émouvoir à la vue de ces existences esseulées sans personne pour les guider, pour que de nombreuses âmes de bonne volonté s’engagent avec ardeur dans l’annonce de l’Evangile. De plus, il importe qu’il y ait des messes spéciales, des heures d’adoration du Saint Sacrement, des récitations du rosaire où l’on prie pour la mission. En outre, cette prière se continuera en famille et chaque individu y ajoutera chaque jour des sacrifices et des pénitences personnelles.

– Donner l’exemple vivant d’une conscience religieuse : Avant de prêcher en paroles il faut prêcher par sa vie. Le fidèle laïc s’efforcera de mener avec ses compatriotes un mode de vie honnête dans son quartier ou son village, d’éliminer les maux et les fléaux sociaux. Spécialement, il s’efforcera de montrer l’exemple du respect de la vie, du respect de la vie humaine, en vivant conformément à une conscience droite, témoignant ainsi du royaume de Dieu, un royaume “rempli de vérité et de vie, rempli de grâce et de sainteté, rempli d’amour, de justice et de paix”. (Préface du Christ Roi). Le croyant doit encore montrer l’exemple par une vie charitable et en communion. Il n’existe pas de prédication plus convaincante que la vue de l’unité et de l’amour régnant dans une famille, dans un quartier, dans une paroisse, dans un diocèse, comme le Seigneur l’a déclaré : “C’est en cela que vous êtes mes disciples, si vous vous aimez les uns les autres” (Jn 13,35). “Afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je suis en toi, afin qu’eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m’as envoyé.”

11 – Le point de vue du dialogue

– La visite amicale des membres des religions amies. La vi-site des personnes appartenant à des religions amies et surtout la visite de familles ou d’individus non catholiques sont une illustration concrète de l’Evangile. Les visites ont pour but de partager la joie des autres de les consoler dans la tristesse, de les soutenir lors du malheur. Elles sont autant de pages d’Evangile vivant qui aideront nos frères non-catholiques à connaître plus précisément le portrait de Jésus sauveur et de comprendre avec plus d’exactitude le christianisme.

– Le partage avec des non-catholiques sur des thèmes communs. Nous suivrons l’exemple de Jésus dans le récit du puits de Jacob raconté par l’Evangile de Saint Jean. A partir d’un tout petit élément de la vie, à savoir de l’eau potable, il s’est montré attentif, il a échangé, et éclairé des sujets comme la religion, l’autel, le mystère de la Trinité pour, enfin, con-duire son interlocutrice jusqu’à l’eau de la vie éternelle (Jn 4). Nous reconnaissons ainsi la grande importance du dialogue de nos jours, un dialogue qui nous amène à sympathiser, à nous comprendre et à nous respecter davantage.

12 – Le point de vue de la pratique

– Création de comités missionnaires. Chaque paroisse devrait fonder un comité missionnaire sous la direction du curé et avec la collaboration de tous les milieux et de toutes les associations. Il incitera à la prière, créera des conditions plus favorables aux études et mobilisera toutes les composantes du Peuple de Dieu pour qu’elles participent à l’annonce de l’Evangile.

– Entraide. Pour s’entraider dans la tâche missionnaire, les paroisses crées depuis longtemps devront s’allier avec les paroisses, les chrétientés lointaines et isolées. Chacune des familles catholiques devrait s’associer avec une famille non-catholique sur le territoire où elle habite. Une alliance concrète peut être établie par la prière, les visites, les échanges, le partage matériel.

– Activités charitables. L’esprit de charité peut se manifester par l’assistance aux victimes des catastrophes naturelles, l’aide multiforme aux pauvres. Dans une perspective plus lointaine, la charité doit s’orienter vers le développement intégral. Ainsi, on aidera les pauvres à bénéficier d’une vie digne de l’homme, car “le développement est le nouveau nom de la paix” (Cf. Progressio Populorum). Les activités sociales et caritatives sont une prédication facile à accueillir, car “l’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres – ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins” (Evangelii Nuntiandi 41).

CONCLUSION

Frères et sours,

13 – En ce début de millénaire, nous répondons à l’invitation du Saint Père en vous transmettant le commandement de Jésus Christ : “Allez dans le monde entier et prêchez la Bonne nouvelle à toute la création” (Mc 16,15). Puisse cette directive interpeller votre vie, émouvoir votre âme apostolique et guider la totalité de vos prières et de vos activités. Que plus particulièrement, pour l’Eglise du Vietnam, cette année soit une année de départ.

Que l’Esprit Saint vous accorde la grâce d’une nouvelle Pentecôte “pour que en ce troisième millénaire l’Eglise puisse recueillir une grande moisson de foi sur ce continent si vaste et si vivant” (Ecclesia in Asia 1). C’est sur ce continent que se trouve le Vietnam, notre patrie bien aimée.

Nous prions Notre Dame de La Vang qu’elle nous conduise sur le chemin de la mission. Que les saints martyrs du Vietnam intercèdent pour nous pour que la foi qu’ils nous ont héroïquement transmise se développe, porte beaucoup de fruits pour la gloire de Dieu et contribue à apporter le bonheur à nos chers compatriotes.