Eglises d'Asie

Après la mort de deux Sud-Coréens en Irak, l’opportunité d’envoyer des troupes de combat dans ce pays continue de faire débat au sein de l’épiscopat catholique

Publié le 18/03/2010




Le 30 novembre dernier, deux Sud-Coréens ont été tués en Irak et deux autres blessés. Bien que les victimes aient été des civils, la nouvelle a relancé le débat en Corée du Sud sur l’opportunité pour le pays d’envoyer des troupes de combat, au nombre de plusieurs milliers, en Irak afin d’y épauler l’action de l’armée américaine. Depuis le mois d’avril dernier, environ 450 soldats sud-coréens – des troupes du génie et de santé – sont présents en Irak et, depuis lors, les prises de position, y compris de la part des milieux religieux, n’ont pas manqué (1). L’épiscopat catholique a, en février (2) puis en octobre dernier (3), pris des positions générales condamnant le recours à la guerre comme moyen de régler les conflits internationaux mais n’a pas explicitement condamné l’envoi de troupes en Irak. Le cardinal Kim, ancien archevêque de Séoul, en particulier, a dit que l’appui que la Corée du Sud pouvait apporter aux Etats-Unis en Irak était un geste nécessaire afin que Séoul soit écouté plus attentivement à Washington sur la question des relations avec la Corée du Nord (4). Le 2 décembre dernier, dans le cadre du Dimanche des droits de l’homme, célébré ce 7 décembre, Mgr John Tchoi Young-soo, président de la Commission ‘Justice et paix’ de la Conférence épiscopale, a publié un nouveau message, redisant l’opposition de l’Eglise de Corée à la guerre.

Dans son message, repris dans tous les bulletins diocésains, Mgr Tchoi, évêque auxiliaire de Taegu, remarque que les troupes déjà déployées en Irak ne sont pas des troupes de combat. Il ajoute que l’envoi de troupes combattantes aboutirait inévitablement à des graves violations des droits de l’homme dont seraient victimes tant les civils irakiens que les troupes sud-coréennes concernées. Mgr Tchoi écrit aussi que son message « confirme et soutient une nouvelle fois » ce que les évêques coréens ont dit en février et en octobre dernier. Dans le document de février, intitulé : « Nous voulons la paix, pas la guerre ! la Conférence épiscopale disait ne pouvoir accepter aucune justification morale à l’attaque de l’Irak par les Etats-Unis ; elle appelait par ailleurs la Corée du Nord à mettre fin à son programme nucléaire afin de ne pas aggraver les menaces pesant sur la paix dans la péninsule coréenne. En octobre, la Commission pour les Affaires sociales de la Conférence épiscopale, dans un message intitulé : « Paix sur la péninsule coréenne disait son refus du recours à tout type de guerre mais n’abordait pas directement la question de l’envoi de troupes en Irak.

Pour le P. Paul Lee Chang-young, sous-secrétaire de la Conférence épiscopale, le message de Mgr John Tchoi n’implique pas que le président de la Commission ‘Justice et paix’ approuve l’envoi par le gouvernement de troupes non combattantes en Irak. Il signifie seulement que l’envoi de personnels militaires responsables de tâches humanitaires est préférable à l’engagement de troupes de combat dans ce pays.

A peu près au même moment, un autre évêque, Mgr Vincent Ri Pyung-ho, du diocèse de Chonju, faisait paraître dans Kyeonghyang Magazine, le mensuel de la Conférence épiscopale, un article où la politique militaire des Etats-Unis était qualifiée de « menace majeure » pour la paix dans le monde, notamment du fait de « la stratégie dite des frappes préventives ». Ecrivant que les Etats-Unis et la Corée sont des pays « amis Mgr Vincent Ri précisait que le rôle d’un ami est d’empêcher l’autre de s’engager dans une mauvaise direction.

Ces débats n’ont pas empêché le président sud-coréen de réaffirmer que l’engagement de la Corée du Sud aux côtés des Etats-Unis en Irak était indispensable. Dans les premiers jours de décembre, Roh Moo-hyun a annoncé que des renforts devraient y être déployés « sans délai ». Il a lié le soutien apporté aux Etats-Unis au règlement de la situation dans la péninsule. « L’histoire dira peut-être que nous avons eu tort d’envoyer des troupes en Irak mais nous devons faire face à la réalité d’aujourd’hui : la question nord-coréenne ne peut être résolue sans la coopération des Etats-Unis a-t-il déclaré à la chaîne de télévision SBS.