Eglises d'Asie

L’écrasante défaite du Parti du Congrès lors des dernières élections législatives marque peut-être l’avènement d’un nouvel état d’esprit des électeurs indiens

Publié le 18/03/2010




Les résultats des élections législatives qui se sont déroulées le 1er décembre dernier dans quatre Etats de l’Inde ont été connus dans la journée du 4 décembre. Ils constituent pour le Parti du Congrès un cuisant échec avec la perte des trois grands Etats du Rajasthan, du Madhya Pradesh et du Chattisgarh où il détenait la majorité. Celle-ci désormais passe au Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP). La parti nationaliste hindou détient 166 sièges à l’assemblée du Madhya Pradesh contre 38 au Congrès qui en a perdu 86. Au Rajasthan, 119 sièges ont été obtenus par le BJP tandis que le Congrès n’en conservait que 56. Au Chhattisgarh, le BJP a obtenu 48 mandats contre 37 à ses adversaires. Le Congrès, parti historique fondé en 1884, qui jusqu’ici menait l’ensemble de l’opposition au parti nationaliste hindou au pouvoir et administrait les quatre Etats où se déroulaient les élections, a tout juste eu la consolation de garder le contrôle de l’Assemblée régionale de New Delhi, la capitale fédérale, où il a obtenu, selon les résultats définitifs, 47 sièges de députés contre 20 au BJP, la précédente assemblée comportant 52 sièges pour le Congrès et 15 au BJP. Les membres du Congrès n’ont pas caché leur déception devant cette perte de crédit que leur porte-parole, Ashwini Kumar, a attribué aux déficiences de la campagne électorale. Presque tous les observateurs ont également expliqué la défaite du Congrès par le peu d’attention accordée par lui à une transformation des esprits en train de s’opérer chez les électeurs du centre de l’Inde.

Avant les élections, il été pronostiqué que le Congrès perdrait sans doute le Madhya Pradesh. Mais avec la perte de trois Etats, le Parti du Congrès se trouve éliminé de toute l’Inde centrale, la partie la plus peuplée du pays : le Rajasthan et le Madhya Pradesh abritent chacun quelque 60 millions d’habitants. Les développements politiques de cette région de langue hindi exercent une profonde influence sur les autres Etats de l’Inde. Ces résultats affaiblissent en premier lieu la position de Sonia Gandhi, dirigeante du Parti, et dénoncent la faiblesse de la stratégie électorale adoptée par son parti. Les candidats du Congrès ont fait campagne dans les quatre Etats en s’appuyant surtout sur les problèmes brûlants posés par l’absence d’esprit laïque (secular), dénonçant le fondamentalisme de leurs adversaires.

Or les candidats du BJP, dont les positions en ce domaine sont bien connues et qui avaient enregistré récemment une série de revers électoraux à la suite de campagnes où les passions du communautarisme étaient volontairement échauffées, ont, cette fois-ci, soigneusement évité les problèmes religieux pour s’attacher aux questions de développement local et d’administration régionale. Ainsi, la candidate au poste de ministre-président du Madhya Pradesh, Uma Bharti, qui a fait sa campagne vêtue de la tunique jaune safran des religieux hindous, et avait été inculpée en 1992 pour avoir incité la foule à démolir la mosquée de la ville sainte d’Ayodhya, n’a parlé, durant cette campagne électorale, que de la situation peu reluisante des routes, des coupures d’électricité, des défaillances de l’équipement en eau potable. Cette tactique apparemment a produit ses fruits. Le BJP a opéré ainsi une reconversion totale de son image. Considéré jusque là comme un parti lié à l’intégrisme religieux et aux querelles intercommunautaires, il est apparu dans la campagne comme capable de faire mieux que le Parti du Congrès dans le domaine du développement et de l’administration du pays.

On peut penser que ce succès du BJP correspond à une transformation de la mentalité populaire et à un commencement de déclin de la vogue des thèmes religieux qui, jusque là, avaient fait le succès du parti nationaliste hindou. Il est à remarquer que si le Congrès a réussi à conserver le poste de ministre-président de l’Etat de Delhi pour sa candidate, Sheila Diskhit, c’est grâce aux efforts accomplis par celle-ci, au cours de son mandat, pour améliorer les routes, le réseau électrique, les transports publics, grâce à de nombreuses privatisations.