Eglises d'Asie – Inde
Un ministre du gouvernement fédéral rejette la revendication des Eglises chrétiennes demandant que les dalits chrétiens bénéficient des mêmes avantages que les autres
Publié le 18/03/2010
Depuis que la Constitution indienne est entrée en vigueur en 1950, un certain nombre d’avantages économico-sociaux sont réservés aux dalits et à certains groupes ethniques, avantages destinés à favoriser leur promotion sociale. La notification présidentielle limitant ces privilèges aux hindous a été par deux fois amendée. Les sikhs et les bouddhistes dalits ont été successivement ajoutés à la liste. Au cours des cinquante dernières années, les divers groupes chrétiens n’ont cessé de faire pression sur les autorités pour que les chrétiens dalits soient eux aussi compris parmi les bénéficiaires de ces privilèges. Les gouvernements fédéraux successifs ont toujours rejeté cette revendication, prenant appui sur le fait que le christianisme rejetait le système de castes, un système uniquement établi sur la naissance. Ce même argument a été utilisé pour rejeter les revendications de musulmans désirant eux aussi que les clauses constitutionnelles s’appliquent aux adeptes de l’islam originaires des basses castes.
Cette très ancienne revendication chrétienne, après avoir sommeillé plusieurs années dans les dossiers de l’administration, avait été récemment remise à l’ordre du jour, lors d’un récent congrès chrétien consacré à ce problème. Certains participants y avaient estimé que les dalits constituaient près de 60 % des chrétiens de l’Inde. Dans sa réponse aux revendications chrétiennes, le ministre indien, Satya Narain Jatiya, a mis en garde contre la “controverse internationale” que ne manquerait pas de faire naître l’inscription de chrétiens sur la liste des dalits. En effet, a-t-il dit, la classification des chrétiens selon des catégories de castes serait mal comprise de l’opinion étrangère qui s’indignerait de voir la majorité indienne imposer aux chrétiens son propre système de castes. Il a cité à ce sujet une conclusion de la Commission fédérale pour les dalits et les ethnies minoritaires déclarant que l’inclusion des chrétiens dans la liste des bénéficiaires des divers avantages sociaux n’était ni désirable ni justifiable.
L’intervention du ministre fédéral a suscité de nombreuses réactions dans les milieux chrétiens, à commencer par celle de la Conférence épiscopale de l’Inde qui a désigné la politique suivie par le gouvernement fédéral en ce domaine comme “une ruse subtile pour supprimer et écarter les dalits les plus économiquement démunis de l’Inde” (1Le P. Philomin Raj, secrétaire de la Commission épiscopale pour les dalits et les ethnies minoritaires, a fait remarquer que le refus gouvernemental ne fera qu’ajouter à la misère des dalits chrétiens, déjà tout près d’être les plus pauvres de la société indienne. Il a réfuté l’argumentation du ministre selon laquelle l’octroi des avantages spéciaux aux dalits chrétiens ne ferait que durcir la classification en castes. Il a fait valoir que celle-ci existait déjà et qu’elle se perpétuait. De nombreux arguments ont été avancés de divers côtés invalidant la justification par le ministre de la disparité de traitement entre deux catégories de dalits. Un communiqué du Conseil ocuménique de l’Inde souligne que le bouddhisme et la religion sikh dont les adeptes dalits sont bénéficiaires des avantages socio-économiques, ont, comme le christianisme et l’islam, une conception égalitaire, i.e. sans caste, de la société.