Eglises d'Asie

Un évêque incite les catholiques à prendre conscience de “la nouvelle pauvreté » dans la société

Publié le 18/03/2010




Alarmé par le nombre des Coréens surendettés qui mettent fin à leur jour, un évêque a demandé aux catholiques de travailler à alléger le « fardeau” de leurs frères dans la peine. Dans un message daté du 28 décembre dernier, l’évêque auxiliaire de Séoul, Mgr Lucas Kim Woon-hoe, a affirmé que beaucoup de ces suicides sont le fait de gens désespérés incapables d’échapper à la pauvreté. Le titre de son message était : “Une nouvelle pauvreté dans la société coréenne : que pouvons-nous faire ? D’après un compte-rendu publié le jour de Noël par le quotidien Hankyoreh, sept cents personnes dans la misère se sont suicidées en 2003. Ce chiffre représente 6,8 % des suicides de l’année.

Mgr Kim, également vicaire épiscopal responsable du Service des affaires sociales et de la jeunesse de l’archidiocèse de Séoul, exhorte les plus désemparés à ne pas choisir le suicide, car la vie est “un don de Dieu”, mais à chercher le soutien de « frères chaleureux” capables de partager leur fardeau. Selon l’évêque, trois choses essentielles empêchent les personnes dans le besoin de sortir du cycle de la pauvreté : l’éducation, le logement et les frais médicaux. Il affirme que de nombreux démunis, incapables de rembourser leurs dettes, sont contraints de les transférer au nom de leurs enfants.

Le message de Mgr Kim faisait suite à un symposium organisé le 12 décembre 2003 par l’Eglise et une administration gouvernementale. Le séminaire intitulé : “La nouvelle pauvreté dans la société coréenne : comment la percevoir ?” avait été organisé pour étudier, analyser et trouver une solution à cette “nouvelle pauvreté Selon le P. John Lee Gi-woo, président du Comité de la pastorale sur la pauvreté urbaine, le message de Mgr Kim se veut un appel au gouvernement comme aux catholiques pour attirer leur attention sur la nouvelle pauvreté dans la société coréenne.

Au cours de ce symposium, Chang Se-hoon, professeur de sociologie à l’université Dong-A de Pusan (Busan), a expliqué que la pauvreté d’aujourd’hui différait de celle d’hier. Cette dernière était une “pauvreté d’espoir” car les individus en bas de l’échelle sociale pouvaient espérer gravir les échelons de la société grâce à un surcroît de travail et une meilleure éducation. La nouvelle pauvreté, une “pauvreté du désespoir” selon ses termes, n’offre aucune perspective d’ascension sociale.

Dans une déclaration à la presse le 29 décembre, Chang Se-hoon a indiqué que le cour du problème résidait dans le fait que “la classe moyenne, base de la stabilité sociale, allait s’amenuisant ». La nouvelle pauvreté, a-t-il expliqué, est le reliquat des années 1990, lorsque que la Corée du Sud dépendait du programme de renflouement du Fonds monétaire international. Elle doit être appréhendée en relation avec « le néo-libéralisme et sa fabrication en série de travailleurs à temps partiel grâce à ses très souples marchés du travail», précisant que, “dans ces conditions, les employeurs pouvaient, bien sûr, librement licencier leurs employés”.

Le message de Mgr Kim montre également du doigt certains des points faibles de la situation sociale du pays : “Aujourd’hui notre société compte 14 000 jeunes élèves qui ne peuvent pas prendre leur repas de midi, 6 000 adolescents soutiens de famille, 230 000 handicapés à faible revenu, 64 000 personnes âgées vivant seules et 3,6 millions de personnes incapables de rembourser leurs dettes.” Selon la banque centrale coréenne, en septembre 2003, le pays comptait quinze millions de familles dont l’endettement moyen par foyer s’élevait à trente millions de wons (21 000 euros). A la même date le ministère de la Santé et de l’Assistance publique estimait le seuil de pauvreté à un revenu mensuel inférieur à un million de wons pour une famille de quatre personnes.

Le message de l’évêque précise aussi que “dans la capitale, plus de trois millions de personnes démunies vivent seules dans des chambres louées exiguës” qu’on ne peut décemment qualifier d’habitats dignes d’un être humain. Pourtant à Séoul, “le nombre de propriétaires de plus de deux maisons à travers le pays est de 1,2 million”. L’évêque n’hésite pas à affirmer que posséder plus d’une maison, non pas pour y habiter mais pour s’enrichir aux dépens des pauvres, est “un péché grave» dans une société où la pénurie de logements est de plus en plus aiguë. Pour contrecarrer la tendance actuelle, il demande aux catholiques de vivre simplement et d’être attentifs aux problèmes des nouveaux pauvres. Il demande à chacun, sans exception, “de prendre au sérieux” la situation présente et de privilégier les plus démunis avec “amour et dans la solidarité”.