Eglises d'Asie

Interdit en Malaisie, le film ‘La Passion du Christ’ de Mel Gibson connaît un succès d’audience dans plusieurs pays d’Asie

Publié le 18/03/2010




Interdit en Malaisie, le film ‘La Passion du Christ’ de Mel Gibson connaît un succès d’audience dans plusieurs pays d’Asie où des copies piratées sur DVD ou DC-Rom ont circulé avant même sa sortie officielle sur grand écran.

Le pays de la région où le film semble connaître le plus de succès est les Philippines où, avant même sa sortie officielle le 31 mars dernier, un nombre non négligeable – mais impossible à chiffrer – de personnes a vu le film sur des copies piratées. Selon un vendeur de rue de Manille interrogé le 7 avril dernier par l’agence Ucanews, les chalands ont acheté le film en grand nombre, en prévision du “long pont de la Semaine Sainte” ; un DVD piraté de ‘La Passion’ coûte entre 70 et 100 pesos (1 à 1,35 euros). Aux Philippines, la période chômée va du mercredi de la Semaine Sainte au dimanche de Pâques. L’attrait du film a sans doute été renforcé par le fait que des évêques ont pris publiquement position en sa faveur. Convié à une projection en avant-première du film, Mgr Fernando Capalla, archevêque de Davao et président de la Conférence épiscopale, a invité les personnes “quelle que soit leur confession” à voir le film pour apprendre des souffrances endurées par le Christ. L’archevêque de Manille, Mgr Gaudencio Rosales, et l’archevêque de Cebu, le cardinal Vidal, ont eux aussi recommandé le film dans le cadre de la Semaine Sainte, conseillant cependant aux parents de ne pas laisser les enfants voir ce film.

En Corée du Sud où le film est sorti le 2 avril et est interdit aux moins de 15 ans, le succès a été immédiat. Environ 700 000 spectateurs l’ont vu dans 161 salles lors du week-end du 3-4 avril et, avec 63 %, le taux de réservation était le plus élevé de tous les films sortis à cette date. Invités à une projection en avant-première, le cardinal Stephen Kim Sou-hwan et Mgr Nicholas Cheong Jin-suk, successeur du cardinal à l’archevêché de Séoul, ont apprécié le film, estimant qu’il donnait aux chrétiens une chance de réfléchir à la spiritualité de la Passion et à suivre Jésus. Pour le secrétaire de la Commission pour les communications sociales de la Conférence épiscopale, le P. Ignatius Kim Min-soo, le film représente “un bon matériau pour l’enseignement”. Selon le pasteur Kim Jin, docteur en théologie et spécialiste du dialogue interreligieux, “l’approche négative” du film envers les juifs, si elle ne ressort pas de l’antisémitisme, peut toutefois influencer la manière dont les chrétiens coréens fondamentalistes appréhendent le contact avec les croyants d’autres religions.

En Chine populaire, dans les grandes villes, des copies DVD du film sous-titré en anglais étaient proposées en très grand nombre à la vente. Selon certains témoignages, des acheteurs, désireux de seulement améliorer leur anglais, ont demandé à en savoir plus sur le christianisme après avoir vu le film. A Pékin, à l’église de l’Immaculée Conception, cathédrale du diocèse, plus connue sous le nom de Nantang, des projections du film ont été organisées dans l’église avant la Semaine Sainte. Certains prêtres s’inquiétaient que des jeunes voient le film “sans être accompagnés de personnes formées pour leur expliquer le sens des violences acceptées par amour par le Christ”.

En Malaisie enfin, le film a été interdit au public, le Bureau de censure cinématographique faisant savoir au distributeur pressenti que des projections privées dans les églises étaient également interdites. Les raisons invoquées pour l’interdiction font état des “sensibilités religieuses” des Malaisiens. Pays musulman à près de 60 %, la Malaisie a pour règle d’interdire tout film ou image montrant les prophètes. Jésus étant considéré par le Coran comme un prophète, il était logique que ‘La Passion’ soit interdite, a estimé un responsable d’une importante chaîne de cinémas, tout comme le dessin animé ‘Le Prince d’Egypte’ avait lui aussi été interdit. Moïse, dont il est question dans ce film, est connu des musulmans comme le prophète Musa. Des responsables protestants ainsi que l’archevêque catholique de Kuala Lumpur, Mgr Murphy Pakiam, ont déploré cette décision, sans toutefois la remettre en question. Dans les rues, des copies piratées du film se négocient à pas plus de huit ringgits (1,70 euros).