Eglises d'Asie

Nagaland : les chrétiens des ethnies locales associent leurs anciennes coutumes aux pratiques pascales

Publié le 18/03/2010




Cette année comme d’habitude, les chrétiens des minorités ethniques de l’Etat du Nagaland ont célébré Pâques en associant aux pratiques chrétiennes d’anciennes coutumes populaires. Avant leur christianisation les peuples de cet Etat, durant les fêtes célébrant l’arrivée du printemps, se livraient avec ardeur à la chasse des animaux sauvages, aussi bien pour assurer leur nourriture que pour leur propre plaisir. Voilà maintenant 125 ans que les habitants de cette région ont commencé à se convertir. Aujourd’hui 87 % des habitants de la région, soit deux millions, sont chrétiens, en majorité baptistes. Cependant, malgré leur conversion, les ethnies du Nagaland ont trouvé un moyen pour associer leurs anciennes habitudes aux fêtes de Pâques, en revenant à cette époque vers la nature sauvage.

Les formes varient en fonction des villages, mais invariablement à l’époque de Pâques les habitants se livrent à des activités en rapport avec la nature. C’est ainsi que dans le village de Pfustero situé à la frontière de l’Etat voisin du Manipur, le jeudi avant Pâques, des groupes de jeunes s’en vont planter leurs tentes en forêt sur le bord d’une rivière. Le Vendredi Saint est réservé à une retraite durant laquelle, ils prient et ils jeûnent. Le samedi avant Pâques, les femmes ramassent des escargots, des plantes sauvages et pêchent des petits poissons dans les ruisseaux tandis que les hommes chassent les bêtes sauvages et piègent les oiseaux. Les jeunes cueillent également des fleurs sauvages qui serviront à décorer l’église locale.

Dans d’autres villages, les anciennes coutumes de célébration du printemps sont revivifiées encore plus tôt dans la semaine, puisqu’on les remet en vigueur dès le lundi qui précède Pâques. Il arrive qu’à cette époque, la population invite le pasteur du lieu ou le catéchiste à s’entretenir avec elle. Ces derniers sont même quelquefois invités à se joindre à la partie de chasse en forêt, une chasse qui, un peu partout, a lieu le Samedi Saint.

Le pasteur Hevukhu Sumi, directeur du Mouvement missionnaire baptiste du Nagaland, pense que la pratique de la chasse pascale ne tire pas, à proprement parler, son origine du christianisme. Il s’agit selon lui d’une initiative populaire. Un autre pasteur baptiste ajoute que la chasse de Pâques est moins due à la tradition qu’à la nécessité de se procurer un supplément de viande à ajouter aux poulets habituellement consommés dans les villages. Cependant, les bêtes sauvages devenant de plus en plus rares, les gens se trouvent parfois obligés d’aller chercher ce supplément directement dans les boucheries.

Il existe chez les responsables religieux du Nagaland certains avis défavorables à ces chasses pascales. Ainsi, le P. Alphonsus D’Souza qui travaille dans la région, pense que cette coutume pourrait avoir des retombées négatives en matière d’écologie. Mais de toute façon, ajoute-t-il, il ne reste plus grand chose à chasser dans les forêts de la région. Cette pénurie de gibier a contribué à faire évoluer l’ancienne coutume qui, dans certains villages, est devenue un simple piquenique. Dans le village de Kikruma, près de Pfutsero, désormais la population se regroupe par clans ou par relations de voisinage et s’enfonce dans la forêt après le service du dimanche de Pâques pour consommer ensemble un repas en pleine nature.