Eglises d'Asie

Coécrit par les Eglises catholiques du Japon et de Corée du Sud, un manuel d’histoire commun est proposé aux lycéens catholiques japonais et coréens

Publié le 18/03/2010




Fruit d’une démarche qui a débuté en 1996, un manuel d’histoire à l’attention des écoliers japonais et coréens a été publié le 15 avril dernier. Répondant à la volonté des épiscopats catholiques des deux pays de bâtir des relations fondées non sur la défiance mais sur la confiance et la compréhension mutuelle, ce manuel a été rédigé en coréen ; sa traduction en japonais est en cours et sa publication au Japon devrait suivre dans un proche avenir. Tiré à 2 000 exemplaires dans un premier temps, il est proposé aux évêques, aux directeurs de séminaire et aux proviseurs des écoles catholiques des deux pays, à charge pour eux de l’utiliser – s’ils le souhaitent – comme complément aux manuels d’histoire utilisés par l’Education nationale de l’un et l’autre pays.

Selon le P. Paul Lee Chang-young, sous-secrétaire de la Conférence des évêques coréens, l’objectif des rédacteurs du manuel a été de fournir un outil le plus objectif possible permettant une utilisation par l’un et l’autre peuple. Au vu de l’histoire de ces derniers siècles, en particulier l’invasion de la Corée par le Japon au XVIe siècle et la colonisation de la péninsule coréenne par le Japon de 1910 à 1945, les relations entre les deux pays et plus généralement entre le Japon et ses voisins asiatiques sont encore aujourd’hui un sujet sensible. La mémoire douloureuse d’épisodes tels que l’exploitation sexuelle de “femmes du réconfort” – dont un grand nombre de Coréennes – par l’armée impériale nippone est encore vive, comme en témoigne la polémique surgie en 2001 après que le gouvernement japonais eut approuvé des manuels d’histoire faisant en partie l’impasse sur les atrocités commises par les troupes japonaises et niant la responsabilité du Japon dans la Seconde guerre mondiale.

C’est pour répondre à ces polémiques et ouvrer à la réconciliation entre les deux peuples que les évêques des deux Eglises ont organisé une rencontre annuelle depuis 1996 (1). Selon Eusebius Lee Won-soon, un des trois rédacteurs coréens du manuel d’histoire, chacune de ces rencontres commençait par l’étude d’une page d’histoire des relations entre les deux pays. Au départ, l’idée était que l’Eglise du Japon et l’Eglise de Corée publient chacune leur propre manuel. Puis les évêques japonais ont fait savoir que l’Eglise du Japon n’était pas en mesure de rédiger un tel manuel et demandait à l’Eglise de Corée de proposer un ouvrage qui serait ensuite traduit en japonais. Eusebius Lee, ancien professeur à l’Université national de Séoul, précise que c’est la démarche qui a été finalement retenue bien qu’il n’ait pas été facile de rédiger un manuel accessible tant aux jeunes Coréens qu’aux jeunes Japonais, les deux groupes n’ayant pas les mêmes connaissances de base de l’histoire de l’un et l’autre pays.

Le manuel comporte deux parties. La première a trait à l’histoire générale de la Corée ; la seconde s’intéresse plus spécifiquement aux échanges culturels entre la Corée et le Japon, d’un point de vue historique, et s’ouvre vers les relations à venir entre les deux pays. Les auteurs de l’ouvrage ont voulu montrer que la péninsule coréenne a été plus qu’une simple passerelle entre les cultures chinoise et japonaise ; ils insistent sur le fait que la culture chinoise a été introduite en Corée et qu’elle s’y est ancrée avant de passer au Japon – ce que l’extrême droite japonaise a du mal à accepter.