Eglises d'Asie

La présidente Megawati estime que l’enseignement religieux dans les écoles du pays favorise l’extrémisme musulman

Publié le 18/03/2010




Le 17 mai dernier, la présidente Megawati Sukarnoputri a causé un certain émoi en déclarant devant une assemblée de fonctionnaires du ministère des Affaires religieuses que l’enseignement religieux dans les écoles pays favorisait l’essor du radicalisme. Sans citer nommément la religion musulmane, elle a déclaré que l’enseignement religieux tel qu’il était aujourd’hui dispensé menaçait l’unité du pays parce qu’il produisait des élèves mus par un fanatisme militant. “Nous avons vu comment les enseignements religieux ont nourri le fanatisme – même si on ne faire ici de généralisation – et de l’hostilité envers ceux qui ne partagent pas les mêmes croyances a-t-elle dit, ajoutant que le ministère des Affaires religieuses devait s’atteler à la révision des méthodes et du contenu de l’enseignement religieux aussi bien dans les écoles publiques que dans les écoles privées.

La présidente n’a pas donné de détails ni précisé si elles avaient en tête certaines écoles précises mais tous les commentateurs en Indonésie ont fait le lien entre ses propos et le fait que plusieurs terroristes récemment jugés sont passés par des pesantren, les écoles coraniques. Abu Bakar Bashir, qui est accusé de diriger le réseau terroriste de la Jemaah Islamiah, notamment responsable de l’attentat de Bali, est ainsi le fondateur de la pesantren Al-Mukmin, situé à Ngruki, à Java-Centre.

Les réactions des milieux musulmans ont été immédiates et unanimes pour dire que la présidente s’était livrée là à une généralisation abusive. Pour le MUI, Conseil des oulémas d’Indonésie, il n’est pas nécessaire de réviser le contenu des enseignements religieux car ces derniers ne sont pas à la base du fondamentalisme. “La présidente devrait être capable de faire la différence entre le fanatisme et le radicalisme, a ainsi déclaré le président du MUI, Amidhan. Chaque religion enseigne qu’elle est la plus vraie dans le domaine de la foi. L’islam nous enseigne cela pour faire grandir notre foi.”

De nombreux universitaires et des responsables musulmans ont par ailleurs souligné que les milliers de pesantren de Java-Est et des autres provinces du pays formaient depuis des décennies des étudiants et que ces derniers professaient un islam le plus souvent tolérant et ouvert.

Commentant les propos de la présidente, le ministre des Affaires religieuses, Said Agil Al-Munawar, a dit que le développement de groupes musulmans radicaux était un phénomène récent en Indonésie créé par “des influences externes”. Selon lui, le programme des enseignements, tel qu’il était fixé par son ministère, ne porte pas “au fanatisme et au militantisme”. Ce sont les interprétations de cet enseignement venues de l’extérieur qui mènent à la croyance selon laquelle des gens peuvent tuer ou faire la guerre pour défendre leur religion, a-t-il précisé sans élaborer plus en détail.

L’enseignement de la religion est obligatoire dans les écoles en Indonésie, qu’elles soient publiques ou privées, à caractère religieux ou non. La majeure partie des écoles coraniques sont privées et disposent de leur propre corpus d’enseignement. L’Eglise catholique, très présente dans le domaine éducatif, n’a pas réagi aux propos de la présidente. Ces derniers temps, ses responsables ont lutté contre une loi, adoptée en juin 2003, obligeant les écoles, quelles qu’elles soient, à donner à leurs élèves une éducation religieuse conforme à l’appartenance confessionnelle de ces derniers. Pour les établissements chrétiens, cela signifie l’embauche de professeurs musulmans de religion pour dispenser une instruction religieuse musulmane à ceux de leurs élèves qui sont musulmans et l’aménagement de lieux de culte adaptés (1).