Eglises d'Asie

Hô Chi Minh-Ville : le pasteur responsable de l’Eglise mennonite, exerçant aussi la profession d’avocat, a été arrêté par la police

Publié le 18/03/2010




A une heure de l’après midi, le 8 juin 2004, une troupe d’une centaine d’agents de la Sûreté s’est présentée à la porte de la résidence du pasteur Nguyên Hong Quang, responsable de l’Eglise mennonite au Vietnam. Lecture lui a été faite d’un mandat d’arrêt spécifiant qu’il était incarcéré pour trois mois pour s’être opposé à un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions. Les policiers ont ensuite entrepris la fouille de la maison. Ils ont emporté l’ensemble des documents trouvés dans la maison y compris les dossiers des clients qui avaient confié leur cause au pasteur qui est aussi avocat. Quatre ordinateurs, des sacs et des cartons de documents ont aussi été confisqués. Le pasteur a été ensuite emmené dans un lieu resté quelque temps inconnu, tandis que son assistant, le missionnaire Truong Thi Hiên, était assigné à résidence.

Le 10 juin suivant, les autorités vietnamiennes reconnaissaient officiellement avoir arrêté le pasteur de cette Eglise protestante non reconnue par l’Etat. Le porte-parole des Affaires étrangères, Lê Dung, est cependant resté très discret sur cette affaire : “Selon les autorités compétentes, a-t-il déclaré, Nguyên Hông Quang a été arrêté pour ses actions contre les responsables locaux, pas pour des motifs religieux.” Ce même jour un message électronique émanant de la communauté informait que le pasteur était détenu dans les locaux de la Sûreté du second arrondissement de Hô Chi Minh-Ville. Son épouse était soumise à de fortes pressions de la police qui cherchait à lui faire signer une pièce avalisant les confiscations opérées par la police au siège de l’Eglise mennonite de Saigon.

Le lendemain, un communiqué de presse de Dinah PoKempner, conseillère de l’organisation des droits de l’homme Human Rights Watch, sur un ton vigoureux, admonestait le gouvernement vietnamien : “Le gouvernement vietnamien doit libérer immédiatement le révérend Nguyên Hông Quang, défenseur des droits de l’homme et dirigeant de l’Eglise mennonite, interdite au Vietnam.” Le communiqué présentait le pasteur-avocat comme l’auteur d’un certain nombre d’écrits diffusés sur le réseau Internet, défendant les terres des paysans pauvres, dénonçant les arrestations des dissidents religieux ou politiques et la persécution subie par certaines Eglises chrétiennes. Selon la porte-parole de l’organisation humanitaire américaine, l’arrestation du pasteur ferait partie d’un ensemble de mesures visant à réprimer les militants luttant pour les droits de l’homme et la liberté religieuse.

Le motif allégué par la police lors de l’arrestation du pasteur le 8 mars, à savoir, son opposition à un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions, semble se référer à une altercation ayant eu lieu le 2 mars dernier à Hô Chi Minh-Ville entre des fidèles de l’Eglise mennonite et des membres de la police qui, au nombre d’une centaine avaient cerné l’église. Quelques fidèles avaient photographié la motocyclette d’un policier en civil posté près de l’Eglise, geste qui avait déclenché une bagarre. Quatre fidèles mennonites avaient été arrêtés.

Voilà déjà plusieurs années que le pasteur Nguyên Hông Quang fait parler de lui pour ses interventions publiques en faveur de la liberté religieuse et des droits de l’homme. En tant que responsable de la communauté mennonite au Vietnam, il a réagi avec éclat particulièrement aux persécutions et tracas subis par les fidèles de son Eglise, qui ne fait pas partie des communautés religieuses officiellement reconnues. Dès septembre 2001, grâce à une lettre du pasteur envoyée à l’étranger, on avait pris connaissance des premiers démêlés de la communauté mennonite et de son pasteur avec la police à propos d’une école pour pauvres qu’elle essayait de faire fonctionner (1). En juin 2003, en tant qu’avocat, le pasteur Quang s’était mêlé à la lutte d’une communauté protestante pour construire sa propre église dans le deuxième arrondissement de Hô Chi Minh-Ville, malgré l’interdiction et les interventions musclées de la police (2). A plusieurs reprises, il signalera dans ses lettres des persécutions subies au Vietnam par sa communauté à Kontum, à Hô Chi Minh-Ville (3). C’est lui que les neveux du P. Ly avaient choisi comme avocat pour leur procès, un choix qui n’avait pas été ratifié par les autorités judiciaires.