Eglises d'Asie

Après une vingtaine de projets, la version définitive d’une ordonnance sur la religion a été adoptée par le Bureau permanent de l’Assemblée nationale

Publié le 18/03/2010




Le 18 juin dernier, plusieurs journaux officiels (1) annonçaient que l' »Ordonnance sur la croyance et la religion en préparation depuis déjà plus de six années, avait finalement été approuvée par le Bureau permanent de l’Assemblée nationale et entrerait en vigueur le 15 novembre 2004. Ce nouveau texte législatif est composé de six chapitres et de 41 articles.

Avant son adoption, l’ordonnance avait été examinée et discutée par les membres du Bureau permanent de l’Assemblée nationale dirigé par Nguyên Van An, doyen de l’Assemblée et haut personnage du Bureau politique. C’était la troisième fois que l’ordonnance était soumise à l’examen du Bureau permanent. Son texte avait été examiné une première fois en 2001 lors de la dixième session de la Chambre des députés et une deuxième fois, plus récemment, en mars-avril 2004. Il faut remarquer qu’il s’agit là d’une ordonnance et qu’à ce titre, ce texte n’a pas fait l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale. Selon les comptes-rendus de la presse vietnamienne, les corrections apportées par le Bureau permanent ont visé à éclaircir le texte et à concrétiser les diverses réglementations, en explicitant les termes spécialisés, le type d’activités religieuses et les critères de reconnaissance des diverses organisations religieuses par l’Etat.

Certaines des contributions du Bureau permanent à l’élaboration du texte ont été signalées dans les rapports des médias officiels. C’est ainsi qu’il a été proposé de compléter l’article 3, paragraphe 11, qui définit la superstition comme « une croyance aveugle qui conduit à des actions dommageables en y ajoutant « à l’ordre de la société ». Le Bureau a également demandé que soit corrigé le contenu de l’article interdisant la propagation de la religion en contradiction avec la législation. Il propose aussi que soit précisé l’article interdisant la présidence du culte aux personnes en train de purger une peine de prison. Faut-il inclure dans cette peine les diverses formes de surveillance pénale ? Les qualificatifs « légal » ou « enregistré employés à propos des établissements religieux, des organisations religieuses, du personnel ecclésiastique, des associations et mouvements religieux ont aussi fait l’objet de demandes d’éclaircissements.

L’ordonnance qui vient d’être adoptée avait été annoncée depuis longtemps dans une directive sur la religion émise le 2 juillet 1998 par le Bureau politique du Parti communiste vietnamien (2). Un premier projet d’ordonnance fut publié le 25 décembre 2000 (3). Il ne comportait que peu d’éléments nouveaux par rapport à la multitude de textes de ce type déjà publiés par le gouvernement vietnamien depuis la fondation de la République démocratique du Vietnam en 1954. Ils n’ont, en effet, jamais fait défaut, depuis le premier décret signé en 1954 par Hô Chi Minh, suivi en 1977 du décret 297 CP signé par Pham Van Dông, auquel succéda le décret 69 HDBT, signé le 21 mars 1991 par Dô Muoi. Vint ensuite le décret n° 26/1999/ND-CP du 19 avril 1999, signé du Premier ministre Pham Van Khai, sans compter de multiples lettres d’application, amendements, compléments divers, etc. Le projet d’ordonnance se différenciait des textes précédents par des marques plus formelles qu’essentielles.

Cette première version du projet de décembre 2000 avait suscité un grand nombre de réactions négatives dans le clergé et l’épiscopat. Une critique sévère du projet d’ordonnance avait été publiée par les évêques de la province ecclésiastique de Hô Chi Minh-Ville. On peut résumer l’esprit de cette critique dans une phrase extraite du texte des évêques : « La liberté religieuse comme toutes les libertés est un droit et un droit ne s’accommode pas d’un système fonctionnant par ‘demande d’autorisation et octroi d’autorisation’. » Est-ce à cause de cet accueil négatif, toujours est-il que les projets d’ordonnance se sont succédés depuis celui de décembre 2000. Au mois de juin 2003, on en était déjà au dix-neuvième projet d’ordonnance, un texte ne comportant pas de saillantes différences avec le premier projet (4). Les milieux concernés ne lui ont pas fait meilleur accueil qu’au premier. Invité à donner son avis sur la nouvelle ordonnance, le cardinal Jean-Baptiste Pham Minh Mân, archevêque de Hô Chi Minh-Ville, proposait tout simplement de laisser tomber ce texte pour revenir à la première ordonnance sur ce sujet, signée de Hô Chi Minh, datant de 1955 (5), en apparence tout à fait libérale mais n’ayant jamais été appliquée.

Il ne semble pas que, jusqu’à présent, le texte définitif de l’ordonnance ait été publié dans son intégralité dans la presse vietnamienne. En conséquence, il n’y a pas encore de réactions officielles de la hiérarchie catholique vietnamienne à la version qui vient d’être adoptée par le Bureau permanent de l’Assemblée nationale.