Eglises d'Asie

Maharashtra : réveil d’un vieux conflit opposant l’islam et l’hindouisme à propos de la tombe d’un général moghol décédé au XVIIe siècle

Publié le 18/03/2010




Le dimanche, 12 septembre, près de 890 militants hindous de l’extrême droite ont été arrêtés alors qu’ils marchaient vers la tombe d’un général moghol du XVIIe siècle, située à Maharbaleshwar à 250 km de Bombay, dans l’Etat de Maharashtra, dans l’intention de la détruire. La tombe est située au pied d’un vieux fort aujourd’hui en ruine du roi guerrier hindou Shivaji, qu’un certain nombre d’hindous considèrent comme un dieu à cause de sa résistance à la domination moghol. Selon l’organisation Vishwa Hindu Parishad (Conseil hindou mondial, VHP) qui a conduit cette attaque contre la tombe, soixante militants auraient été blessés par la police au cours de l’opération menée par elle pour dégager la tombe.

Le général enseveli dans la tombe contestée se nommait Afzalkhan et a vécu au XVIIe siècle. Il avait été envoyé en 1625 en ce lieu par l’empereur moghol Aurangzeb en mission de paix auprès du roi hindou Shivashi. Il avait été tué par ce dernier qui, ensuite, l’avait enterré sur place. Beaucoup de musulmans considèrent le tombeau du général comme un lieu sacré et venaient y prier jusqu’à l’an dernier, époque où le site fut isolé par une clôture en raison de la dispute. La veille de l’offensive des militants hindouistes contre la tombe, le samedi, Venkatesh, le secrétaire du VHP local avait affirmé que son organisation s’était engagée à raser la tombe. “Nous allons montrer, avait-il dit, que Afzalkhan était un envahisseur, qu’il a démoli nos temples et qu’il ne peut en rien être appelé un saint.” La tension entre les deux communautés à propos de ce lieu de culte s’est réveillée et s’intensifie au fur et à mesure que l’on se rapproche du mois d’octobre, période où vont avoir lieu les élections législatives du Maharashtra. Pour le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), une victoire dans cet Etat constituerait une étape importante dans son rêve de reconquête du pouvoir perdu, sur le plan national, au mois de mai dernier.

Ces arrestations de militants hindous ont été dictées à la police par la crainte de voir se répéter les événements ayant eu lieu, voilà maintenant douze ans, à Ayodhya. Une mosquée y avait été détruite en 1992 par des fanatiques hindous sur le motif que celle-ci avait été construite au XVIe siècle, sous le règne de l’empereur Baba, sur l’emplacement d’un ancien temple destiné à marquer le lieu de naissance de Ram, un avatar de la divinité hindoue Vishnu. Après la destruction, des troubles sanglants (3 000 morts) avaient suivi. Se référant à cet épisode sanglant du conflit entre hindouisme et islam, le porte-parole du Centre de contrôle de la police à Bombay a déclaré : “Nous avons pris nos précautions et envoyé autour du tombeau des forces spéciales de police.”

Le tombeau du général Afzalkhan fait partie de nombreux sites réclamés en même temps par les deux plus grandes religions de l’Inde. Dispersés sur tout le territoire de l’Inde, ils datent pour la plupart, de l’époque de l’empire moghol (du XVIe au XVIIIe siècle). Dès l’indépendance de l’Inde en 1947, les destructions de mosquée s’étaient multipliées et avaient provoqué des troubles qui coûtèrent la vie à plus de 3 000 Indiens, en majorité des musulmans. La destruction de la mosquée d’Ayodhya en 1992 et ses conséquences sanglantes avaient porté au paroxysme ce type de conflit.

Beaucoup d’hindous tiennent les Moghols pour des envahisseurs du sous-continent indien, une opinion pourtant qui n’est pas unanime. D’autres au contraire pensent que l’Inde des Moghols était entrée dans son âge d’or dans les domaines architectural, littéraire et artistique.