Eglises d'Asie

Timor occidental : malgré l’opposition des autorités civiles et de l’Eglise catholique, le rituel chamaniste de la circoncision est toujours observé

Publié le 18/03/2010




Au Timor occidental, les autorités civiles et l’Eglise catholique reconnaissent que les efforts menés par elles ces dernières années pour éradiquer la pratique rituelle de la circoncision comme “immorale” et dangereuse pour la santé, n’ont pas été vraiment suivis d’effet. “Sifon la circoncision rituelle pour les garçons de 15 ans, est une coutume propre aux habitants de la région du district centre-sud de la province, dont la majeure partie est protestante. Avoir des rapports sexuels avec une femme après la circoncision fait partie du rituel. La circoncision elle-même est effectuée à l’aide d’une lamelle de bambou. La croyance locale est que la circoncision renforce la virilité du jeune homme et chasse le mauvais sort.

Selon le P. Andreas Sika, curé de paroisse à Soe, chef-lieu du district en question, “cette croyance est si fortement ancrée que les jeunes de cette région, même de bonne éducation, vont secrètement rencontrer le chaman local pour se faire circoncire” (1C’est un chaman, homme ou femme, qui pratique la cérémonie au bord d’une rivière au moment de la saison des pluies, explique-t-il. A l’aide d’une lamelle de bambou aiguisée, le chaman coupe le prépuce et le jette dans l’eau de la rivière – ce qui symbolise “la fin des malheurs “La saison des pluies et l’eau de la rivière sont les symboles de la grâce qui apaise la douleur de la blessure” mais, souligne-t-il encore, la stérilité de la lame est loin d’être garantie et l’infection toujours possible.

De son côté, Anton Tateni, un catéchiste catholique de Soe, précise que la tradition pour un jeune d’avoir des relations sexuelles après l’opération est considérée comme une autre manière d’apaiser la brûlure. “Les femmes qui acceptent ce genre de relations avec un nouveau circoncis sont le plus souvent des prostituées ou des veuves. Parfois, le jeune circoncis persuade sa petite amie ou une jeune fille de sa connaissance d’accepter un rapport sexuel avec lui”. Les gens croient que non seulement la virilité de l’adolescent en est renforcée mais que la femme également y gagnera tant physiquement que spirituellement. “Ils croient que, grâce à ces rapports avec un jeune circoncis, le pouvoir des esprits et des âmes des ancêtres ruissellera sur la femme choisie affirme-t-il.

Le P. Sika explique encore que les autorités civiles locales ainsi que l’Eglise catholique ont condamné cette pratique mais il reconnaît que nombre de jeunes à Soe méconnaissent cet interdit : “Ils vont en cachette dans les villages pour se faire circoncire sans craindre les maladies vénériennes. La liberté sexuelle leur est habituelle.” Il raconte ainsi qu’un jour, un des garçons du groupe avec qui il parlait de sexualité lui avait fait remarquer que l’enseignement de l’Eglise sur le sujet était étranger à leur culture. La polygamie en effet est habituelle dans cette région, y compris chez les catholiques et les femmes qui n’ont pas pu donner naissance à un garçon encouragent volontiers leur mari à prendre une autre femme. Le P. Sika rappelle que l’Eglise demande aux catholiques de ne pas recevoir le sacrement de pénitence et la communion sans “se repentir” de ces pratiques mais, dit-il, “ils ne se sentent pas coupables et acceptent volontiers la pénitence que le prêtre leur impose”.

Selon Sonya Amtiran, pasteure de l’Eglise évangélique du Messie à Soe, son Eglise, elle aussi, ne parvient pas à empêcher ces circoncisions rituelles malgré les mises en garde sur ses dangers et les cours de préparation au mariage. “En différentes occasions, nous parlons à nos jeunes de la “sifon” mais nous ne parvenons pas à les convaincre. Nous savons qu’elle est toujours pratiquée en secret et que beaucoup contractent des maladies vénériennes rapporte-t-elle. Elle explique également que son Eglise travaille avec le gouvernement local pour essayer d’éduquer les gens et qu’elle-même conseille à ses chrétiens de se faire circoncire par les médecins des dispensaires plutôt que par les chamans.

Timoteus Talan, responsable du Bureau des Affaires religieuses de ce district, lui-même membre de l’Eglise évangélique du Messie, indique que le gouvernement local a organisé des cours d’hygiène élémentaires pour les chamans. Pourtant, rapporte-t-il, ils continuent d’utiliser leurs instruments traditionnels parce qu’ils n’ont rien d’autre, pas d’instruments chirurgicaux ni désinfectant.