Eglises d'Asie

Les organisations religieuses s’opposent à un projet de loi visant à réformer le mode de fonctionnement de l’enseignement privé

Publié le 18/03/2010




Le 9 septembre dernier, l’Association des fondations pour l’enseignement catholique et trois organisations protestantes impliquées dans l’enseignement ont organisé un colloque pour étudier un projet de loi visant à réformer le mode de fonctionnement de l’enseignement privé. A l’issue du colloque, sept cents professionnels, catholiques et protestants, de l’éducation ont publié un communiqué pour dire leur opposition au projet de loi. Quelques jours auparavant, le 17 août, le Conseil coréen des responsables religieux, organisation réunissant sept religions (1), a critiqué le gouvernement et le parti Uri, majoritaire à la Chambre, pour utiliser “l’excuse de la corruption constatée au sein de quelques établissements scolaires privés” pour faire passer ce projet de loi.

C’est en effet à partir de plusieurs scandales de corruption qui ont éclaté ces derniers temps en lien avec des écoles privées que le parti Uri a, le 6 août dernier, exprimé son intention de voir l’Assemblée nationale débattre d’un amendement à la Loi sur les écoles privées. L’objectif affiché par le parti majoritaire est de rendre plus transparente la gestion des écoles et de mettre fin à la corruption qui y règnerait. Il propose que le pouvoir de nomination et de démission des enseignants soit transféré des organismes de tutelle aux directeurs d’école et que chaque établissement scolaire se dote d’un comité de gestion ayant pouvoir de se saisir des principaux dossiers relatifs à la vie de l’école. Enfin, l’amendement vise à ce que les écoles aient des instances de représentation des parents, des enseignants et des élèves, chacune ayant une personnalité juridique clairement établie.

Pour les responsables religieux, l’amendement proposé est inadmissible dans la mesure où il représente une ingérence inacceptable dans la manière dont les différents groupes religieux gèrent et animent les écoles dont ils ont la tutelle. Frère Jean Vianney Ahn Byeong-cho, secrétaire de l’Association des fondations pour l’enseignement catholique, la réforme proposée constitue “un empiètement sur les droits de la propriété privée”. Il reconnaît qu’il existe “quelques cas avérés de corruption au sein d’écoles privées” mais ajoute que l’enseignement privé n’a pas le monopole de la corruption. Selon lui, les médias et certains groupes de pression exagèrent la gravité de la situation en décrivant les écoles privées comme autant de “foyers de corruption”.

Selon les responsables de l’enseignement privé sous tutelle catholique ou protestante, le rôle dévolu à un éventuel comité de gestion ne peut être que “consultatif” au risque de voir certains parents interférer dans la vie des écoles et compromettre l’esprit dans lequel l’enseignement y est dispensé. Quant à donner, au nom de la transparence et de la démocratie, une personnalité juridique aux groupes chargés de représenter les parents, les enseignants et les élèves, c’est la porte ouverte à des conflits paralysant le fonctionnement des écoles.

Le Conseil coréen des responsables religieux a fait valoir, de son côté, que “le développement de la nation” doit beaucoup à “la formation d’un personnel de qualité au sein des écoles privées” et que la réforme proposée aboutira à “miner les fondations de l’enseignement privé”. Selon le pasteur Park Chun-yill, du Conseil chrétien de Corée, des organismes de tutelle réfléchissent à la possibilité de se désengager du secteur éducatif au cas où l’amendement serait voté. L’Eglise presbytérienne de Corée estime pour sa part que les libertés de religion et d’éducation religieuse sont en jeu.

Du côté des partisans de l’amendement, le Syndicat des enseignants et des personnels éducatifs a déclaré que, dans la mesure où près de la moitié des écoles secondaires et plus de 80 % des universités appartiennent au secteur privé, “il ne peut être affirmé que l’enseignement privé est une affaire privée”.

Selon les données publiées en 2003, l’Eglise catholique assume la tutelle de 312 écoles primaires et secondaires. Pour les Eglises protestantes, la Fédération coréenne des écoles chrétiennes regroupe 363 établissements. Le ministère de l’Education compte quant à lui un total de 19 258 écoles dans le pays, dont 32 % sont des établissements privés. Sur les 2 031 écoles secondaires, 46 % relèvent du privé. Pour les universités, ce pourcentage passe à 85 %.