Eglises d'Asie

Une brusque augmentation de la croissance démographique inquiète les autorités vietnamiennes qui en recherchent les causes

Publié le 18/03/2010




Sous le titre : “La population du Vietnam augmente subitement le journal des syndicats Lao Dông (‘Le travail’) du 20 septembre dernier rapporte le cri d’alarme lancé par la très officielle Commission de la population, de la famille et de l’enfance, qui depuis des années est chargée de faire appliquer la politique de la planification des naissances et d’en vérifier les résultats à partir de l’évolution du taux de croissance démographique du Vietnam. L’illustration du dérèglement actuel est fournie par le nombre de naissances enregistrées pour les six premiers mois de l’année 2004. Durant cette période, il y a eu plus d’un demi million de naissances (514 391), soit 7 434 de plus que l’année précédente pour la même période. Les responsables de la démographie vietnamienne n’hésitent pas à dire que le risque d’explosion démographique qui avait été signalé déjà depuis l’an dernier est aujourd’hui devenu une chose réelle, réduisant à néant tous les efforts accomplis par le puissant appareil étatique de contrôle de la population.

Selon Mme Trân Thi Thanh Mai, porte-parole de la Commission et haut responsable de la politique gouvernemental en matière de contrôle des naissances, la politique volontariste du gouvernement, dans les années récentes, aurait permis de réaliser un ralentissement remarquable de la croissance démographique. Au cours des dix dernières années (1994-2003), le taux annuel de croissance de la population aurait été ramené à 1,2 % alors qu’il était encore de 2 % dans la précédente décennie. En ce qui concerne le nombre d’enfants par famille qui, selon les directives du planning familial, ne devrait pas dépasser deux, il était passé de 3,1 en 1994 à 2,1 aux alentours de l’an 2000. Une heureuse évolution avait été constatée dans l’augmentation annuelle de la population (aujourd’hui 80 millions) : elle était de 1,5 million dans la décennie précédente et se situait aux environs de 1,1 – 1,2 million dans les premières années du troisième millénaire.

Selon la responsable de la Commission de la population, la situation a commencé à se dégrader dans les années qui ont suivi l’an 2000. Particulièrement en 2003, année où a pourtant été publiée une ordonnance sur la population. Le taux de croissance de la population était passé cette année-là à 1,47 % après avoir régulièrement augmenté depuis l’an 2000, année où la conjonction de l’année du dragon et le commencement du millénaire avait favorisé l’augmentation des naissances. Particulièrement inquiétant pour les responsables de la Commission de la population a été le nombre de troisièmes ou quatrièmes enfants naissant dans les familles. Pour la première moitié de 2004, ce chiffre est de 66 396, en augmentation de 1 989 par rapport à l’année précédente.

Mme Trân Thi Thanh Mai fait remarquer que cette augmentation subite de la pression démographique n’est pas le fait des régions traditionnellement connues pour leur taux élevé de croissance démographique, à savoir les régions pauvres, isolées ou montagneuses. Au contraire, le nombre de naissances bien qu’encore élevé y diminue régulièrement. L’élévation de la croissance démographique dans tout le pays est surtout due aux naissance devenues plus nombreuses dans les provinces et les villes dont la population dépasse le million d’habitants, à savoir Hanoi, Ha Tay, Thai Binh, Thanh Hoa, Nghê An, An Giang, Hô Chi Minh-Ville, Tra Vinh, Cân Tho, Ca Mau. Cette croissance démographique est sociologiquement très étonnante. Selon les statistiques actuelles, ce n’est plus à la campagne que l’on trouve des familles de plus de deux enfants mais dans les milieux de fonctionnaires et de cadres où elles se multiplient rapidement. Dans une commune de la province de Thai Binh, au Nord-Vietnam, 74 % des cadres du Parti ont trois enfants et plus.

Un certain nombre de déficiences affectant l’action du Comité de la population et des services qui lui sont rattachés dans les provinces seraient, selon l’article du Lao Dông, à l’origine de cette poussée démographique. Les cadres locaux du planning familial auraient relâché leur pression, les fonds destinés à financer la politique démographique auraient été utilisés à d’autres tâches. Cependant, la raison principale serait à chercher dans la parution, en mai 2003, de l’ordonnance sur la Population dont l’article 10, paragraphe a, déclare : “Les couples ont le droit de décider du nombre d’enfants et du moment où il les mettent au monde.” Cette déclaration aurait désorienté l’opinion de la population qui s’est imaginé jouir de la pleine liberté en ce domaine. A tel point, qu’au mois de septembre, la Commission de la population a été obligée de préparer un décret d’application de l’ordonnance, précisant clairement : “Chaque famille n’aura qu’un ou deux enfants.” Selon Mme Mai, le décret a été diffusé dans tout le pays grâce au réseau des comités locaux du Parti. “Mais, se demande-t-elle, sera-t-il entendu et mis en pratique par la population ? C’est un autre problème !”

Le constat de cette brusque augmentation démographique a provoqué une réunion d’urgence de la Commission de la population à Hô Chi Minh-Ville, qui s’est déroulé du 20 au 22 septembre. Elle a traité des diverses mesures susceptibles de remédier à la situation actuelle et a fixé les objectifs à atteindre en 2005.