Eglises d'Asie

Kerala : les religieuses Missionnaires de la Charité ne porteront pas plainte contre leurs agresseurs

Publié le 18/03/2010




A l’issue de l’enquête sur l’attaque des sours et des frères Missionnaires de la Charité (1), la police de l’Etat du Kerala a procédé à l’arrestation de douze militants hindouistes. Les faits qui leur sont reprochés remontent au 26 septembre dernier. Ce jour-là, un premier groupe d’assaillants, armés de barres métalliques et de chaînes, avaient attaqué et frappé quatre religieuses et trois frères en visite de routine dans un village près de Kozhikode (Calicut). Un peu plus tard, un deuxième groupe, plus nombreux, s’en était pris à d’autres religieuses et frères venus au secours des premières victimes. Les agresseurs proféraient des slogans hindouistes. Certains ont conseillé aux religieuses de quitter ce village, leur reprochant de vouloir convertir les paysans hindous.

L’inspecteur général de police pour la région du Nord-Kerala, Aravind Ranjan, a annoncé dans une conférence de presse avoir arrêté douze personnes, membres de diverses organisations nationalistes hindoues, telles que le Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps national de volontaires, RSS) et le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), considéré généralement comme la branche politique du premier, en tête de la coalition détenant le pouvoir fédéral jusqu’aux dernières élections. Le responsable de la police a déclaré qu’ils étaient accusés de rassemblement illégal, d’incitation à la violence intercommunautaire, d’insulte délibérée à l’égard de femmes et de tentative de meurtre. La police a ajouté qu’elle recherchait activement d’autres éventuels coupables.

L’évêque de Calicut, Mgr Joseph Kalathiparambil, s’est félicité de l’arrestation des coupables, preuve, a-t-il dit, que la police accomplit son métier. Selon lui, les groupes hindouistes ont voulu, par cet incident, créer des troubles à l’intérieur de la région. L’évêque a également démenti les accusations de tentative de conversion portées contre les religieuses de la congrégation fondée en 1950 par Mère Teresa. “Jamais, a-t-il dit, un seul habitant du village ne s’est converti au christianisme.” Cette affirmation a été confirmée par la supérieure locale des Missionnaires de la Charité, sour Kusuman, une des victimes de l’attaque du 26 septembre. Elle a affirmé que sa communauté n’avait jamais converti une seule personne du village : “Nous y venons pour servir les pauvres et les nécessiteux sans tenir compte de leur religion ou de leur croyance. Nous sommes ici, non pas pour convertir les pauvres mais pour les nourrir.” Par ailleurs, les religieuses ont refusé de porter plainte contre les auteurs de l’agression et ont expliqué que leur mission était d’être au service de la population et non pas d’intenter des procès contre ceux qui les attaquaient.

Les organisations hindouistes n’ont pas accepté la mise en cause de leurs militants. Un dirigeant du Vishwa Hindu Parishad (Conseil hindou mondial, VHP), Rajasekharan Kummanam, parle d’une coalition de la police et de l’Eglise visant à déconsidérer leur mouvement. Selon lui, la police a négligé d’enquêter pour découvrir si l’accusation portée contre les religieuses, à savoir tenter de convertir des hindous, était vraie ou non. Les mêmes convictions sont partagées par le président local du BJP. Celui-ci a réclamé de la police une preuve certaine de l’implication des groupes hindous dans cette affaire. Selon lui, arrêter des hindous pour des attaques sur des minorités religieuses est devenu aujourd’hui une mode. Il a ajouté qu’il était en possession d’une liste de trois familles du village où a eu lieu l’incident, qui se sont converties au christianisme. Il a cependant précisé qu’il ne savait pas si les religieuses y étaient mêlées.

L’incident aura eu des retombées heureuses pour le village où il a eu lieu. L’administration de l’Etat a, en effet, par la suite, apporté un certain nombre d’aménagements à la situation déplorable des quelque deux cents familles qui y habitent. En inaugurant un programme d’électrification dans le village qui sera suivi par d’autres améliorations, le ministre responsable a déclaré que l’attaque des religieuses a aidé à mettre en lumière le dénuement des habitants du village.