Eglises d'Asie

A Java, l’école catholique empêchée de fonctionner par de jeunes islamistes a rouvert ses portes mais la tension demeure vive

Publié le 18/03/2010




Le 25 octobre dernier, le mur de deux mètres de haut et sept mètres de long qui obturait depuis le 3 octobre dernier l’entrée principale de l’école catholique Sang Timur (‘l’Enfant Jésus’), à Ciledug, à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Djakarta (1), a été abattu par les services municipaux locaux, permettant ainsi à ses quelque 3 000 élèves de reprendre le chemin des salles de classe. Selon le Jakarta Post du 26 octobre, l’incident ouvert par de jeunes islamistes se réclamant du Front de la jeunesse islamique et du Forum de communication islamique de Karang Tengah (du nom du village où se trouve l’école catholique) a donc été clos dans un calme relatif – la police a procédé à l’arrestation de trois de ces militants islamistes -, bien que la tension reste vive dans la localité où les militants islamistes accusent la communauté catholique de prosélytisme.

Dans ce conflit où les militants islamistes reprochaient à la paroisse catholique locale, la paroisse Sainte Bernadette, d’utiliser des locaux de l’école pour y célébrer la messe dominicale, l’intervention des autorités locales et l’ordre donné de détruire le mur ne sont venus que quelques heures avant que l’ancien président de la République Abdurrahman Wahid eut annoncé son intervention dans cette affaire. Le 25 octobre en effet, l’ancien président de la République, qui est aussi l’ancien président de la Nahdlatul Ulama, la plus importante organisation musulmane de masse du pays, est allé à la rencontre des parents d’élèves et des élèves de l’école pour les assurer de son soutien. Il a déploré que les autorités civiles refusent depuis dix ans à la paroisse Sainte Bernadette un permis de construire pour bâtir une église paroissiale, obligeant ainsi la communauté catholique locale à emprunter des locaux de l’école Sang Timur.

Plus tard, dans la journée du 25 octobre, lorsque Abdurrahman Wahid s’est rendu à la mosquée du village pour y rencontrer la communauté musulmane locale, l’accueil n’a pas été enthousiaste, des musulmans critiquant la destruction du mur. L’ancien président a alors affirmé que la République d’Indonésie n’était pas un Etat islamique et que le dialogue et la tolérance devaient prévaloir. “Là où les musulmans sont la majorité, ils doivent protéger les droits des groupes minoritaires a-t-il déclaré, ajoutant qu’il n’hésiterait pas à déployer les Banser (Barisan Serba Guna), le mouvement de jeunesse de la Nahdlatul Ulama, au cas où la force serait à nouveau employée contre l’école. Il a aussi promis de porter l’affaire devant la justice au cas où le conflit viendrait à s’envenimer.

L’école catholique Sang Timur compte parmi ses élèves un grand nombre de musulmans et dispose d’une classe pour enfants handicapés ou autistes. Dès le 25 octobre, les cours y ont repris normalement, même si un portail secondaire de l’établissement est resté bloqué par un second mur érigé par les militants islamistes. Le même jour, à Djakarta, le ministre des Affaires sociales, Alwi Shihab, a appelé à un règlement pacifique du problème, déclarant que “ceux qui ont construit le mur doivent comprendre que leurs actions ont perturbé l’harmonie religieuse”.