Eglises d'Asie

Un haut dignitaire bouddhiste placé en résidence surveillée a écrit une lettre de protestation aux autorités civiles

Publié le 18/03/2010




Le vénérable Thich Quang Dô, second dans la hiérarchie du bouddhisme unifié, vient d’envoyer une lettre aux plus hautes autorités civiles du pays pour protester contre son maintien en résidence surveillée qui est infligé sans raison depuis plus d’un an, à lui ainsi qu’au patriarche de l’Eglise, détenu dans une pagode du Centre-Vietnam. Cette lettre fait suite à d’autres lettres envoyées par d’autres religieux aux mêmes destinataires – sans résultats.

La lettre envoyée par le vénérable Thich Quang Dô (1), au titre de sa charge de recteur de l’Institut de propagation du dharma, contient en particulier les passages suivants : “Depuis l’arrestation sans raison, le 9 octobre 2003, à Luong Son, près de Nha Trang (2de membres de la hiérarchie de l’Eglise bouddhiste unifiée du Vietnam, parmi lesquels notre patriarche, le vénérable Thich Huyên Quang et moi-même, Thich Quang Dô, 378 jours se sont écoulés durant lesquels je suis maintenu en détention administrative dans le monastère de Thanh Minh Thiên, en vertu d’un ordre oral de la Sûreté urbaine de Hô Chi Minh-Ville. Dans le monde, il n’y a pas de nation civilisée pour détenir ainsi ses citoyens “en vertu d’un ordre oral” ! Quant au patriarche Thich Huyên Quang, c’est également en vertu d’un ordre oral qu’il a été conduit en détention au couvent Nguyên Thiêu, dans la province de Binh Dinh. Nous ne savons absolument pas pour quel crime nous sommes mis sous surveillance. En effet, nous n’avons jamais été jugés et, par conséquent, jamais condamnés. Voilà cinq ans que mon téléphone est coupé, la police monte la garde devant ma porte et personne n’est libre de me rendre visite.”

Le religieux énumère ensuite les deux raisons pour lesquelles cette mesure de résidence surveillée à laquelle il est soumis est illégale. D’abord parce qu’elle est portée sans aucune motivation. Ensuite parce que selon l’article 10 du Code pénal, personne ne peut être considéré comme ayant commis un crime et devant encourir une peine avant qu’une sentence ne soit portée par un tribunal. L’article 71 du même Code pénal spécifie encore que la détention provisoire ne pourra dépasser deux mois en cas de fautes légères et quatre mois en cas de fautes graves.

Dans sa lettre, le vénérable Thich Quang Dô rappelle que le porte-parole des Affaires étrangères, Lê Dung, avait déclaré à la presse internationale que les deux religieux bouddhistes, Thich Huyên Quang et Thich Quang Dô, avaient été arrêtés pour détention de secrets d’Etat. Le religieux réfute cette accusation en disant que, si elle avait été justifiée, les accusateurs se seraient hâtés de désigner quels types de documents étaient en possession des religieux. En outre, le religieux, en épluchant le Code pénal, n’a pas trouvé d’articles où l’on parle de détention de secrets d’Etat. Il se demande ensuite si cette accusation calomnieuse n’a pas été tout simplement inventée pour permettre d’impliquer les deux religieux dans une affaire d’espionnage, un crime qui est puni de vingt ans de prison, de détention à perpétuité ou par la peine de mort. Il s’agit donc de terroriser, autant que possible, deux innocents en leur suggérant à quelle issue fatale ils s’exposent.

A la fin de sa lettre, le vénérable Thich Quang Dô rappelle que, depuis le mois de septembre 2003, le Parti et l’Etat vietnamiens se sont engagés dans une réforme législative appelée : “Stratégie de développement du système législatif vietnamien réforme qui devrait être réalisée en sept ans. Le Parti et l’Etat vietnamiens auraient reçu de l’étranger une somme de cinq millions de dollars pour les quatre premières années de la mise en ouvre de cette réforme. Le religieux estime que, grâce à cette réforme et à l’importante somme d’argent reçue pour la mener à bien, seront dévoilées les raisons de l’arrestation des deux religieux, de leur détention depuis plus d’un an et surtout de l’accusation calomnieuse dont ils sont l’objet, à savoir être en possession de secrets d’Etat.

Après une période où le pouvoir avait semblé vouloir se rapprocher du bouddhisme unifié, au début de l’année 2003, il avait ensuite opéré un revirement spectaculaire. Après s’être opposées par divers moyens – mais sans résultats – à la tenue d’une assemblée extraordinaire de divers membres responsables du bouddhisme unifié dans la pagode Nguyên Thiêu, au Binh Dinh (3), les autorités policières avaient arrêté un certain nombre de religieux près de Nha Trang lors de leur retour vers Hô Chi Minh-Ville. C’est depuis cette date, le 9 octobre 2003, que les deux plus hauts dignitaires du bouddhisme unifié sont, chacun de leur côté, soigneusement gardés en résidence surveillée.