Eglises d'Asie

Mindanao : au milieu d’une région dévastée par la guerre, une zone de paix a été créée et va en s’élargissant

Publié le 18/03/2010




Des musulmans et des chrétiens soutenus par l’Eglise et des associations issues de la société civile ont su s’entendre dans le sud philippin, ravagé par des années de conflits armés opposant les forces gouvernementales aux séparatistes musulmans. Le 29 novembre dernier, dans la région de Pikit, localité située dans la province de Cotabato-Nord, environ 2 000 habitants, musulmans et chrétiens confondus, se sont réunis pour signifier officiellement que la région où ils vivent est une “zone de paix”.

L’initiative remonte à juin 2002 lorsque plusieurs secteurs autour de Panicupam ont déclaré s’ériger en zone de paix, un programme lancé par la paroisse catholique de Pikit. L’idée était de créer une zone dans laquelle ni les séparatistes musulmans ni les forces gouvernementales, y compris les groupes paramilitaires, n’auraient le droit de pénétrer, ou à tout le moins s’engageraient à ne pas y faire usage de leurs armes. De plus, la vente d’alcool et d’armes était déclarée interdite dans la zone. Contre toute attente, les forces en présence, que ce soit le MILF (Front moro de libération islamique) ou l’armée, ont joué le jeu et la paix a régné dans ce district depuis lors. Le 29 novembre, de nouveaux districts, ceux de Panicupam, Ginatilan, Palapaan, Lagundi, Dalingoen, Takepan et Kalakakan, ont déclaré adhérer aux principes de la “zone de paix l’élargissant d’autant.

Pour le Malaisien Dato Zulkifeli bin Mohamad Zin, général de division responsable de la commission internationale chargée de surveiller l’application du cessez-le-feu conclu en juin 2003 entre le MILF et Manille, l’accord conclu à l’initiative de la paroisse de Pikit doit servir d’exemple pour d’autres communautés déjà engagées dans ce même processus de paix. De telles zones de paix, a-t-il déclaré, sont “importantes” pour préparer le chemin vers la création de plus grands espaces pacifiés où pourra vivre en paix la population. “C’est très important pour nous de travailler ensemble a-t-il insisté. Le général a tout particulièrement remercié le P. Roberto Layson, le curé de la paroisse de Pikit : “Un homme petit par la taille mais grand par le cour, un cour voué à la paix a-t-il dit (1

Pour sa part, le P. Layson a rappelé que le travail accompli l’avait été avec des bénévoles aussi bien musulmans que chrétiens, dans un contexte pourtant difficile. En l’espace de cinq ans, plus de la moitié des près de 69 000 habitants de la région de Pikit ont en effet été contraints de fuir les combats à quatre reprises.

Le 29 novembre, lors de la cérémonie entérinant l’extension de la zone de paix, Mgr Orlando Quevedo, archevêque de Cotabato, diocèse où est situé Pikit, a signé un document par lequel l’archidiocèse s’engage à soutenir ce mouvement pour la paix et le développement. L’archevêque a expliqué que cette zone de paix avait pu être mise sur pied grâce à l’ensemble des habitants, chrétiens, musulmans, et avec les responsables civils locaux de la région. Du côté des forces militaires en présence, l’accord a été entériné aussi bien au niveau des états-majors, que ce soit celui du MILF ou de l’armée gouvernementale, qu’au niveau des commandants locaux. Mgr Cotabato a souligné que ces zones de paix nécessitaient l’existence « d’un processus de dialogue et de réconciliation” entre chrétiens et musulmans, approuvé par tous les habitants et en dehors de toute intervention des autorités. Ensuite, “c’est évident que les projets d’aide à la réinsertion et au développement du gouvernement et des ONG sont les bienvenus pour améliorer la vie des gens et organiser l’avenir a-t-il ajouté.

Des représentants de différentes organisations et agences au service de la paix et du développement étaient présents le 29 novembre à Pikit. Entre autres, Catholic Relief Services, le service caritatif de la Conférence épiscopale américaine, était représenté.