Eglises d'Asie

Pour leur première lettre pastorale commune sur une question sociale, les évêques reconnaissent que l’Eglise peine à répondre à la crise de la famille contemporaine

Publié le 18/03/2010




Le 28 novembre dernier, à l’occasion du 1er dimanche de l’Avent, les évêques de l’Eglise catholique en Corée ont publié une lettre pastorale. Première lettre pastorale commune consacrée à une question de société, le texte aborde la question de la famille dans la société contemporaine. Tenant compte du fait que de nombreuses nouvelles tendances sociales posent de sérieuses menaces à la famille en Corée, les évêques suggèrent que les premiers acteurs de la pastorale familiale soient les familles catholiques elles-mêmes, des familles appelées à renouveler et transformer la société toute entière.

Intitulé : « La famille, lieu de l’amour et de la vie le texte des évêques est précédé d’une préface signée de Mgr Andrew Choi, archevêque de Kwangju et président de la Conférence épiscopale. Selon Mgr Choi, la famille en tant qu’institution traverse aujourd’hui une crise grave : divorce, homosexualité, avortement, violence domestique menacent le « système du mariage ». Face à cet état de fait, poursuit Mgr Choi, les évêques ont rédigé cette lettre pour ne pas laisser un « problème grave » sans solution, « sinon il n’y a pas d’avenir ». Pour le président de la Conférence épiscopale, accorder un statut marital à des couples d’un même sexe et leur permettre d’adopter des enfants non seulement va contre la volonté du Créateur, mais prive aussi les enfants de leur droit à être élevés par deux parents de sexe différent.

Le P. Timothy Jung Yeon-jung, secrétaire du Comité pour la pastorale familiale de la Conférence épiscopale, a précisé que les évêques avaient décidé de s’engager collectivement derrière cette lettre car « la famille est devenue une question brûlante dans et au-dehors de l’Eglise et c’est pour cela que les évêques se sont efforcés de cerner ces problèmes et de proposer leurs propres solutions ». S’inspirant pour partie de la réflexion menée lors de l’assemblée plénière de la Fédération des Conférences épiscopales d’Asie (FABC), qui s’est tenue en Corée du Sud en août dernier sur le thème de la famille, la lettre a été envoyée par trois fois – en juin, en juillet puis en septembre – aux évêques et aux prêtres responsables de la pastorale familiale avant d’être finalisée. Elle comporte trois chapitres, sur l’enseignement de l’Eglise sur la famille, sur l’effondrement de la famille en Corée et enfin sur les propositions pastorales des évêques.

Le premier chapitre reprend classiquement l’enseignement de l’Eglise sur la famille et insiste notamment sur la famille en tant que communauté respectueuse de la vie, du dialogue et la famille comme cellule d’évangélisation. Le second chapitre détaille les changements d’attitude des Coréens d’aujourd’hui vis-à-vis du mariage. L’affaiblissement du rôle du père dans la famille, dû entre autres au chômage et au travail des femmes, est étudié, ainsi que l’essor de l’homosexualité ou le vieillissement de la population. Enfin, le troisième chapitre s’intéresse à la nécessaire adaptation de la pastorale de la famille, notamment dans les domaines de l’éducation à la sexualité, de la préparation au mariage et de la vie de famille. L’expérience vécue dans les Communautés chrétiennes de base est mise en avant, de même que sont étudiés les différents programmes de la pastorale de la famille. L’attention à accorder aux « familles particulières un terme qui inclut les familles monoparentales, les divorcés remariés, les personne âgées vivant seules, les alcooliques et les drogués, est soulignée.

Au sujet des divorcés remariés, la lettre reconnaît que l’Eglise n’a pas su se donner une approche pastorale concrète mais insiste pour dire que, bien que ces couples ne peuvent pas être admis à la communion, l’Eglise doit les conduire à rejoindre le « mystère des sacrements » par la prière et les partages bibliques dans le cadre des paroisses. Plus généralement, les évêques recommandent que la pastorale familiale ne soit pas assumée directement et uniquement par des pasteurs, mais par des couples laïcs mariés qui s’efforcent de mener une vie familiale exemplaire, tout en portant un regard critique sur leur environnement social. La lettre dit en effet : « La famille doit dépasser ses rôles de base, comme la naissance et l’éducation des enfants, pour porter une attention spéciale aux pauvres et aux personnes abandonnées. » Elle souligne aussi que les familles devraient rejeter les tendances sociales contraires à la morale chrétienne et se joindre aux mouvements sociaux qui les combattent, car « chaque famille porte la responsabilité de réformer la société ».

Enfin, sur un plan institutionnel, les évêques proposent d’établir un Institut pastoral de la famille pour soutenir la pastorale de la famille. Une activité de réflexion et de formation devra y être menée en coopération avec les universités catholiques.