Eglises d'Asie

A Thai Binh, l’évêque inaugure les cérémonies du Jubilé du diocèse en demandant pardon pour les erreurs commises par les catholiques dans le passé

Publié le 18/03/2010




Le 1er janvier dernier, Mgr François-Xavier Nguyên Van Sang, évêque du diocèse de Thai Binh, a inauguré par une messe solennelle les cérémonies du Jubilé de son diocèse, qui s’étaleront sur une période de trois ans, de 2005 à 2007. Demandant pardon pour les erreurs commises dans le passé par des catholiques, que ce soit à l’égard de la nation vietnamienne ou de non-catholiques, l’évêque a placé ce jubilé sous le signe du renouveau et de la réconciliation.

Les célébrations marquent le 70e anniversaire de l’érection du diocèse et le 100e anniversaire de la construction de son ancienne cathédrale. Elles fêtent également le jubilé d’argent de l’ordination épiscopale de Mgr Sang et se termineront par la consécration de la nouvelle cathédrale, actuellement en construction. Le 1er janvier, la messe a été célébrée dans l’église paroissiale de Sa Cat, située à Thai Binh, en présence d’une foule imposante de 10 000 personnes, une soixantaine de prêtres et des évêques des diocèses de Thanh Hoa et de Phat Diem.

Dans son homélie, Mgr Sang, âgé de 73 ans, a dit que l’histoire, que ce soit l’histoire de l’Eglise ou celle de la société, étant faite de réalisations formidables et d’erreurs tragiques, comportait nécessairement des aspects brillants et des points noirs. “Nous célébrons l’année 2005 en tant qu’année jubilaire autour du thème : ‘Renouveau et réconciliation’ afin que nous puissions reconnaître nos erreurs et nos échecs et qu’avec la grâce de Dieu, nous puissions renouveler nos vies et nous réconcilier avec la nation et avec tous, quels que soient leur religion ou leur athéisme a-t-il déclaré. Le thème des deux autres prochaines années, 2006 et 2007, sera, respectivement “Reconstruction et construction” et “Action de grâce et consolidation”.

Devant une assistance très majoritairement catholique où l’on pouvait remarquer la présence de responsables des autorités locales et celle de représentants des communautés protestante et bouddhiste, Mgr Sang a évoqué certains catholiques ou groupes de catholiques qui ont, par le passé, pris des initiatives qui ont causé du tort ou qui ont été mal comprises par les non-catholiques. “Dans les faits, accidentellement ou intentionnellement, ces personnes ont nui à la réputation, ainsi qu’aux intérêts matériels ou spirituels du pays, de la nation et de nos compatriotes. Nous en sommes sincèrement désolés et nous voudrions en demander pardon a-t-il ajouté.

A l’attention des représentants des communautés religieuses non catholiques présents ce jour-là, Mgr Sang a également demandé pardon. Mus par un enthousiasme démesuré pour la religion catholique, “certains catholiques ou associations catholiques dans le diocèse ont autrefois abusé de leur pouvoir pour dédaigner, refuser de comprendre et nuire à la réputation, aux intérêts matériels et spirituels et aux biens d’autres religions a-t-il poursuivi.

L’évêque a demandé pardon pour les prêtres, les religieux et les laïcs de son diocèse qui “n’ont pas su refléter le bon exemple de Jésus qui n’est pas venu pour être servi mais pour servir”. Il a dit que lui-même, en tant qu’évêque, avait parfois donné le mauvais exemple et dirigé son diocèse par l’autorité plutôt que par l’amour. Mgr Sang s’est dit déterminé “à renouveler sa vie et à se réconcilier avec chacun pour construire une vie heureuse et harmonieuse”.

Pour nombre de catholiques, entendre et voir leur évêque faire acte d’humilité et de repentance a été une expérience inédite. Beaucoup ont été touchés par le fait de le voir porter la croix et s’incliner devant l’assemblée pour demander pardon. Selon Vu Ngoc Bien, un catholique local âgé de 49 ans, “la confession et les excuses n’affaiblissent pas la réputation et l’autorité de Mgr Sang, mais rendent la religion catholique plus crédible et la rehaussent peut-être dans l’estime des autorités et des adeptes des autres religions”. Pour une bouddhiste, interrogée après la cérémonie, “le fossé entre les religions” se trouve en partie comblé par l’attitude adoptée par l’évêque catholique. “Nous devrions reconnaître nos propres fautes et nous demander pardon les uns aux autres, afin que la solidarité entre les religions dans cette région aille en grandissant a-t-elle estimé.

Situé à une centaine de kilomètres au sud-est de Hanoi, le vicariat apostolique de Thai Binh a été créé le 9 mars 1936. Composé de la province de Thai Binh ainsi que d’une partie de celle de Hung Yên, il a été érigé en diocèse le 24 novembre 1960. Son ancienne cathédrale, édifiée en 1906, a été démolie en août de l’année dernière, trop abîmée par les ans et un bombardement américain en 1967. La première pierre de la nouvelle cathédrale a été posée ce 5 janvier et l’édifice devrait être achevé l’an prochain.

Sur une population de 2,85 millions d’habitants, le diocèse compte un peu moins de 120 000 fidèles, une proportion relativement faible, due notamment aux départs consécutifs à la signature des accords de Genève, en 1954. Pour le diocèse de Thai Binh, situé dans une région où l’emprise des communistes était forte, l’exode de 1954 a vu le départ vers le Sud-Vietnam de plus de 80 000 fidèles, accompagnés de 79 prêtres. Aujourd’hui, après un renouveau certain, le nombre des prêtres est remonté à 48, celui des religieuses à 79, celui des séminaristes à 18 et celui des candidats au séminaire à 60. On compte par ailleurs 628 catéchistes. Au jour le jour, les relations entre l’Eglise locale et les autorités restent toutefois difficiles. En dépit de certaines marques d’ouverture de la part des autorités, la nomination et le déplacement des prêtres au sein du diocèse restent des questions délicates (1).