Eglises d'Asie – Inde
Tamil Nadu : grâce à l’aide d’une organisation catholique, un village hindou se reconstruit sur de nouvelles bases après avoir été dévasté par le tsunami du 26 décembre 2004
Publié le 18/03/2010
Pêcheurs les habitants du village étaient, pêcheurs ils sont restés. Mais la différence entre avant et après le 26 décembre, c’est qu’aujourd’hui les bateaux et le matériel de pêche sont devenus des propriétés “partagées”. Gagansingh Bedi, le responsable administratif du district de Cuddalore, témoigne pour sa part que les pêcheurs de Madhuvapallam sont les premiers à avoir repris la mer depuis la catastrophe du 26 décembre. Dans la région de Cuddalore, un millier de personnes ont péri, 9 000 personnes ont perdu leur toit et cinquante et un villages ont été affectés.
Dès le lendemain du tsunami, une équipe de secours catholique est arrivée à Madhuvapallam, un village hindou de 59 foyers. “Au départ, nous nous sommes montrés sceptiques face à un groupe catholique désireux de s’impliquer dans nos problèmes internes rapporte Narayana Swamy, mais, poursuit-il, “nous avons peu à peu compris que ces catholiques étaient véritablement concernés par notre bien-être”.
Le groupe catholique en question appartient à “Sumanahalli” (‘Village de bonne volonté’), une organisation caritative de l’archidiocèse de Bangalore, dans l’Etat voisin du Karnataka. Le groupe a financé l’achat de dix nouveaux bateaux pour les pêcheurs de Madhuvapallam, à la seule condition que les embarcations et le matériel de pêche soient désormais considérés comme des biens collectifs. “Avant le tsunami, nous étions de la main-d’ouvre payée pour travailler sur des bateaux qui ne nous appartenaient pas. Désormais, nous sommes propriétaires de nos embarcations souligne Narayana Swamy, notant que les pêcheurs de son village sont repartis en mer, tandis que les pêcheurs des villages voisins en étaient encore à se lamenter sur leurs morts.
Pour l’équipe de Sumanahalli, un des sept groupes catholiques, indépendants les uns des autres, présents sur le district de Cuddalore, la phase la plus cruciale et la plus délicate a été de convaincre les villageois de partager la propriété des bateaux et de s’entendre sur les modalités de ce partage. Les villageois ont fini par décider d’un système où ils sont répartis en dix groupes, chaque groupe comprenant au moins une famille avec une veuve ou un handicapé. Neuf groupes de six foyers ont été formés, le dixième groupe ne comptant que cinq foyers. Chacun de ces groupes a reçu la propriété d’une embarcation.
Pour la répartition des pêches à venir, les villageois se sont aussi entendus : 50 % de la recette à ceux qui vont en mer, les cinquante autres pour cents étant divisés en six – une part pour chacune des six familles propriétaires. Pour le groupe comptant cinq familles, il a été décidé que la sixième part irait financer l’entretien du temple du village, lequel n’a pas été épargné par le tsunami.
Selon Gowramma, une villageoise âgée, le système de répartition des recettes de la pêche a surpris les villageois. Ils s’attendaient à ce que le groupe catholique demande qu’une église ou un lieu de culte chrétien soit édifié dans le village ou encore que les profits tirés de la pêche aillent à l’Eglise, “mais, au lieu de cela, ils nous ont demandé de reconstruire notre temple”.
Après le premier retour à terre des bateaux, les villageois ont déclaré que leur vie était revenue à la normale et un banquet a été organisé pour fêter cela le 18 janvier. Au menu, le poisson était à l’honneur et environ quatre cents personnes y ont pris part. Parmi les invités, il y avait des prêtres et des religieuses catholiques ainsi que des officiels locaux. Gagansingh Bedi a déclaré que “le système de propriété collective” mis au point avec l’aide du groupe catholique devait servir de modèle pour l’administration et les autres villages de la côte.
Au-delà de cette action de réhabilitation, les responsables de Sumanahalli ont dit penser à l’implantation d’ateliers de confection textile dans la région de façon à donner du travail aux jeunes femmes des villages côtiers. A plus court terme, avec le soutien financier d’une entreprise de Bangalore, propriété d’un hindou, ils ont financé la construction d’habitations pour les sans-abri et la mise en place d’un système d’assurance contre les catastrophes naturelles. Avec cette assurance, les familles sont certaines de pouvoir financer la scolarité de leurs enfants et le versement d’un petit capital une fois que ceux-ci parviendront à l’âge de la majorité.