Eglises d'Asie

Un amendement au Code pénal est perçu comme un signe encourageant par certains partisans de l’abolition de la peine de mort

Publié le 18/03/2010




Le 7 janvier dernier, les députés du Parlement, le Yuan législatif, ont adopté un amendement au Code pénal pour exclure du champ d’application de la peine de mort les mineurs et les personnes âgées de plus de 80 ans. Parallèlement, la période au cours de laquelle une personne purgeant une peine de prison à vie ne peut pas être remise en liberté a été portée de quinze à vingt-cinq ans. Pour le P. John Chen Kun-chen, secrétaire général de la Conférence des évêques catholiques de Taiwan, cet amendement, qui entrera en vigueur le 1er juillet 2006, représente un pas vers l’abolition de la peine de mort et il est le signe d’un respect croissant des droits de l’homme à Taiwan. “Les gens commencent à comprendre, a-t-il expliqué, que les droits l’homme doivent être respectés et défendus.” Pour un certain nombre de milieux, notamment chrétiens, si l’amendement en question va dans le bon sens, il ne représente toutefois qu’un pas timide en direction de l’abolition. De fait, l’opinion publique ne paraît pas prête à accepter une réforme plus radicale.

Commentant le vote de l’amendement, le P. John Chen Kun-chen a rappelé que la position de l’Eglise est de ne désespérer d’aucun criminel et que, la vie étant un don de Dieu, aucune personne ni aucun groupe ne peut se donner le droit de donner la mort. “L’Eglise encourage les législateurs catholiques à abolir la peine de mort a-t-il ajouté.

Pour le P. Francisco Carin, coordinateur du Comité ‘Justice et paix’ de la Conférence des religieux à Taiwan, il est difficile d’aller, pour l’heure au-delà de cet amendement, car le camp des abolitionnistes est ténu à Taiwan. Comme dans d’autres pays asiatiques, le mouvement pour l’abolition de la peine de mort est en grande partie due à une influence occidentale, a-t-il encore noté.

Le P. John Hung Shan-chuan, coordinateur de l’Association des aumôniers catholiques de prison, explique cette situation par le fait que le principe en vigueur est celui de la dissuasion fondée sur la sanction, celle-ci pouvant aller jusqu’à la peine capitale. L’idée de fournir une aide aux détenus pour que ceux-ci parviennent à se réformer, en vue d’une réinsertion dans la société, n’est pas présente dans le système judiciaire et pénal.

Selon le P. Hung, ce sont les Eglises catholique et protestantes qui, aujourd’hui à Taiwan, sont les plus actives dans le domaine de l’aide aux détenus, même si elles manquent cruellement, en ce domaine, de personnels qualifiés (1). Ainsi, a-t-il remarqué, pour l’Eglise catholique, il n’existe qu’un seul assistant formé au conseil en milieu carcéral.

Sur le fond, Wu Chih-kuang, directeur de l’Institut Jean-Paul II pour la paix de l’université catholique Fu Jen, estime que le récent amendement rétrécit certes le champ d’application de la peine de mort, mais reste insuffisant parce qu’il ne s’attaque pas directement au cour du problème. “Ce que le corps législatif a amendé, c’est le Code pénal. Il élude la question de la peine de mort. Rien n’a été vraiment fait pour abolir la peine de mort a-t-il déclaré. “La raison en est que la société n’a pas encore accepté l’idée [de l’abolition] a-t-il expliqué. Wu Chih-kuang est président de l’Alliance pour une alternative à la peine de mort, association formée en 2003 regroupant des groupes catholiques, protestants et bouddhiques ainsi que des ONG de la société civile (2).

Citant un sondage faisant apparaître que 80 % de la population de Taiwan sont opposés à l’abolition de la peine de mort, Wu Chih-kuang estime que, si le gouvernement mettait en place un programme visant à réinsérer les détenus – et non seulement à les punir -, ce pourcentage pourrait descendre vers les 50 %.

Au sein des milieux abolitionnistes, diverses initiatives ont été prises ces derniers temps, avec pour objectif de montrer à la fois la réalité de la peine de mort et de stimuler un débat sur son efficacité. Taiwan est un des vingt-huit pays de par le monde à maintenir la peine de mort dans son Code pénal. En 2000, le pays a connu dix-sept exécutions capitales, un chiffre tombé à trois en 2004.