Eglises d'Asie

La politique officielle de contrôle des naissances perd son pouvoir régulateur et la croissance démographique s’accélère

Publié le 18/03/2010




Plusieurs déclarations et communiqués des responsables de la démographie au Vietnam avaient déjà laissé entendre que les diverses mesures de contrôle des naissances soigneusement mises en place par un puissant appareil étatique depuis plusieurs dizaines d’années, se révélaient de moins en moins contraignantes (1). La presse officielle avait même relevé un changement de mentalité de certaines couches de la population et une véritable résistance au principe de deux enfants par famille. Un nouveau cri d’alarme vient d’être lancé officiellement qui devrait avoir des répercussions politiques au niveau régional. A l’issue d’une enquête effectuée par le service général des statistiques, dont les résultats ont été publiés le 8 février dernier (2) ; il a été révélé que le taux brut de natalité est passé de 17,5 par mille habitants en 2003 à 18,7 par mille habitants en 2004. L’indicateur conjoncturel de fécondité (nombre de naissances par femme en âge de procréer) est passé durant la même période de 2,12 à 2,23 (3). Les statistiques précisent que le taux conjoncturel de fécondité le plus élevé du Vietnam se situait sur les Hauts Plateaux du Centre-Vietnam (3 enfants par femme). Venaient ensuite le nord de la région centrale (2,6), puis le nord-ouest (2,5).

La même enquête fournit également des indications sur un certain nombre d’autres facteurs contribuant à favoriser la croissance démographique au Vietnam. On y apprend, en particulier que, depuis de nombreuses années, le taux de mortalité infantile ne cesse de diminuer. Il est aujourd’hui de 18 pour mille, la moitié du taux moyen pour les pays de l’Asie du Sud-Est. Cependant, ce taux de mortalité infantile varie en fonction des régions du pays. Il est particulièrement élevé sur les Hauts Plateaux du centre et le nord-ouest du pays (36 pour mille). On apprend aussi que le taux de mortalité au Vietnam est de 5,8 pour mille, un chiffre moins élevé que le taux moyen en Asie du Sud-Est.

Selon le communiqué annonçant les résultats de l’enquête démographique, il existe d’autres facteurs, d’ordre psychologique, susceptibles de donner une explication à cette brusque poussée de croissance démographique, qui, aujourd’hui, trouble la politique de contrôle des naissances laborieusement appliquée par les autorités vietnamiennes. Dans certains milieux vietnamiens, relativement aisés, le nombre moyen d’enfants désirés aujourd’hui par les femmes vietnamiennes est estimé à 2,4 ; alors que le chiffre moyen d’enfants imposé par la politique officielle est de 2,1. Cette orientation doit être contrecarrée, affirme le communiqué, qui ajoute que des mesures destinées à mobiliser la population en ce domaine seront prises. L’équipement et les méthodes nécessaires seront fournis dans toutes les régions, pour permettre d’« améliorer la qualité et l’efficacité du contrôle des naissances ».

Cette nouvelle orientation a des racines individualistes. Le journal électronique (gouvernemental) VNNET du 23 octobre 2004 soulignait que l’aspiration à de nombreux enfants se découvre aujourd’hui chez les riches, chez les cadres du Parti ou de l’administration à salaire élevé souvent assistés par du personnel de maison. Il citait une mère de famille de deux enfants qui s’apprêtait à en avoir un troisième malgré la réglementation. Elle affirmait : « Je peux les nourrir et les élever moi-même. Je n’ai besoin de personne pour cela. »

Selon une déclaration de Mme Trân Thi Thanh Mai, présidente de la Commission de la population, en septembre 2004, la raison principale de cette nouvelle aspiration serait à chercher dans la parution, en mai 2003, d’une Ordonnance sur la Population dont l’article 10, paragraphe a, déclarait : « Les couples ont le droit de décider du nombre d’enfants et du moment où il les mettent au monde. » Cette déclaration aurait désorienté l’opinion de la population qui s’est imaginée jouir de la pleine liberté en ce domaine. A tel point, qu’au mois de septembre suivant, la commission de la population a été obligée de préparer un décret d’application de l’ordonnance, précisant clairement : « Chaque famille n’aura qu’un ou deux enfants. »