Eglises d'Asie

Les Etats-Unis accentuent leur pression sur le Vietnam afin d’obtenir des réformes dans le domaine de la liberté religieuse

Publié le 18/03/2010




Le 28 février dernier, comme chaque année, depuis les années 1970 aux Etats-Unis, le département d’Etat a publié le rapport annuel sur la situation des droits de l’homme dans le monde. Présenté à la presse par un assistant du département d’Etat, Michael Kozak, ce rapport contient trente-trois pages consacrées au Vietnam où sont décrits, dans le détail, les progrès accomplis en ce domaine, ainsi que les privations de liberté ou de droits encore subsistantes (1).

Au titre des améliorations, le rapport met en valeur un certain nombre de résultats atteints dans le développement économique, un commencement d’ouverture dans le domaine des activités religieuses, le rôle plus important accordé à l’Assemblée nationale, la plus grande transparence adoptée par les autorités dans leurs décisions et dispositions. Le rapport du département d’Etat note également les efforts accomplis par le gouvernement dans sa lutte contre le trafic d’êtres humains, tout en remarquant l’existence du trafic de femmes et d’enfants destinés à la prostitution à l’intérieur du pays et à l’étranger, ainsi que la contrainte imposée à des femmes d’épouser des ressortissants de Chine continentale et de Taiwan.

Une grande partie du texte est consacrée à l’exercice de la liberté religieuse au Vietnam. Il relève des violations commises comme l’interdiction de se déplacer faite au vénérable Thich Quang Dô, l’illégalité dans laquelle est rejetée l’Eglise bouddhiste unifiée du Vietnam. A côté de certaines organisations religieuses officiellement reconnues, il existe beaucoup de communautés encore interdites d’existence, comme les Eglises baptiste et mennonite, les Témoins de Jéhovah, les Mormons ou encore certaines branches du caodaïsme, du bouddhisme Hoa Hao, de l’islam sunnite ou de l’hindouisme Cham. Le rapport, qui concerne l’année 2004, ne fait pas mention de la directive récente du Premier ministre, publiée le 4 février dernier, concernant les communautés protestantes dans les minorités ethniques (2). Il revient sur les manifestations d’avril 2003 et met en relief le grand nombre de participants qui ont été tués, ceux qui, blessés, se sont enfuis dans la forêt et y sont morts, ceux qui ont été arrêtés et dont on est sans nouvelles jusqu’à aujourd’hui. Avec les personnes persécutées pour leurs croyances religieuses, sont aussi évoqués les militants de la démocratie soumis à des procès souvent secrets et condamnés pour “espionnage” ou “utilisation abusive de la démocratie”. Au total, au Vietnam, vingt-deux personnes sont retenues en détention pour leurs croyances religieuses et neuf autres pour leurs opinions politiques. En fin de compte, la situation des droits de l’homme, selon le rapport du département d’Etat, est encore très insatisfaisante et des violations continuent d’avoir lieu.

Le jour même de la publication de ce rapport, paraissait une lettre ouverte sur ce même sujet, envoyée par l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch à la secrétaire d’Etat, Condoleezza Rice, lui demandant de prendre des mesures concrètes, susceptibles de contraindre le Vietnam à respecter la liberté de croyance (3). Au mois de septembre 2004, le département d’Etat avait placé le Vietnam sur la liste des pays où les violations de la liberté religieuse étaient “particulièrement préoccupantes”. Une date avait été fixée, le 15 mars 2005, date avant laquelle des améliorations concrètes devraient être apportées à la situation des droits de l’homme. Selon la lettre ouverte signée du directeur pour l’Asie de Human Rights Watch, même si le Vietnam a accompli récemment quelques gestes de bonne volonté, comme la libération de prisonniers de croyance à l’occasion de la nouvelle année lunaire (4), sous d’autres aspects, il continue de mener une politique oppressive en matière religieuse, de condamner et d’arrêter des croyants de toute religion qui veulent seulement pratiquer leur culte en toute indépendance. Aussi bien, trois mesures devraient être immédiatement imposées aux autorités vietnamienne : autoriser toutes les organisations religieuses, même celles qui ne font pas partie du cadre officiel actuel, à mener librement leurs activités cultuelles ; ajouter à la dernière ordonnance sur la religion un article interdisant aux fonctionnaires d’organiser des séances où les fidèles sont contraints de renier leur foi ; enfin, inviter un enquêteur des Nations Unies à venir contrôler sur place la situation de la liberté religieuse.

Par ailleurs, le journal officiel de la Sécurité vietnamienne, le Công An Nhân Dân (‘Sûreté Populaire’), a signalé que, depuis le 2 mars, une délégation venue des Etats-Unis, conduite par John Stamford, représentant spécial du gouvernement américain pour la liberté religieuse dans le monde, s’entretenait avec certaines autorités vietnamiennes sur des questions sensibles en rapport avec l’exercice de la liberté religieuse au Vietnam.