Eglises d'Asie – Inde
Rajasthan : des chrétiens se mobilisent pour empêcher l’adoption par l’Assemblée législative locale d’une loi anti-conversion
Publié le 18/03/2010
Revenu au pouvoir au Rajasthan en décembre 2003 à la faveur d’élections législatives (1), le BJP a fait du projet de loi anti-conversion, modelé sur des textes similaires adoptés dans d’autres Etats de l’Union, tels l’Orissa et le Tamil-Nadu (2), un axe de sa politique. Lors de la précédente session parlementaire, le ministre de l’Intérieur de l’Etat, Gulab Chand Kataria, a déclaré qu’un tel texte permettrait de “réduire” les tentatives des missionnaires de convertir des gens au christianisme. “Nous ne pouvons permettre que des conversions aient lieu dans notre Etat avait affirmé le ministre. Dans les quelques Etats de l’Union qui ont adopté de telles lois dites “anti-conversion”, la législation interdit les conversions obtenues “par la violence ou par des moyens frauduleux”.
Les responsables des communautés chrétiennes de l’Etat se sont mobilisés. Le 6 mars dernier, une pétition a été lancée pour appuyer la démarche entreprise quatre jours auparavant par un évêque protestant et deux évêques catholiques. Mgr Collin C. Theodore, évêque de l’Eglise (protestante) du Nord de l’Inde, et Mgrs Ignatius Menezes, d’Ajmer-Jaipur, et Joseph Pathalil, d’Udaipur, évêques catholiques, ont écrit au gouverneur ainsi qu’au ministre-président de l’Etat pour leur demander de retirer le projet de loi. Les responsables chrétiens mettent en avant le fait qu’une telle loi créerait “un sentiment d’insécurité et de peur” chez les chrétiens et les autres minorités religieuses, car certains acteurs de la société pourraient utiliser ce texte afin de dénoncer n’importe quel travail d’ordre caritatif comme une tentative de conversion.
Les trois évêques chrétiens notent également dans leur lettre aux plus hautes autorités de l’Etat du Rajasthan que ce projet de loi s’inscrit dans un contexte marqué par une recrudescence des attaques contre les chrétiens. Ils citent notamment l’incident survenu en gare de Kota, le 19 février dernier (3), lors duquel des militants hindouistes avaient passé à tabac des chrétiens, en majorité de jeunes aborigènes, venus assister à une session de formation sur la Bible, animée par l’organisation protestante Emmanuel Ministries International.
Par ailleurs, le 2 mars, les responsables de différentes dénominations protestantes et orthodoxes ont tenu une conférence de presse à Jaipur. Eux aussi ont exprimé leur “inquiétude” face aux attaques dirigées contre les chrétiens et ce qu’ils dénoncent comme étant l’indifférence des autorités de l’Etat quant à ces incidents et au sort des victimes. Ils ont déclaré que le ministre-président ne répondait pas à leur demande d’être reçus en audience pour expliquer leur point de vue.
Des appels ont été lancés pour que les responsables chrétiens s’organisent afin d’unifier leurs démarches auprès des autorités. Sandeep Edwin, président de l’Association de la jeunesse chrétienne de Jaipur, a exprimé l’espoir que cette unité se fasse rapidement. “Nous ne pouvons pas rester assis passivement et attendre que des fanatiques religieux et politiques persécutent notre peuple. Nous espérons que tous, les catholiques y compris, se rassembleront sur cette question a-t-il déclaré. Quelques voix se sont élevées dans l’Etat pour critiquer le peu d’empressement du Parti du Congrès et de l’Eglise catholique, qui possède plusieurs institutions éducatives renommées au Rajasthan, à se joindre aux chrétiens qui dénoncent la politique du BJP dans l’Etat. Selon ces personnes, l’Eglise catholique, à l’exception des deux évêques cités ci-dessus, ne se montre pas en pointe dans ce combat-là, car ses responsables apprécient modérément le succès Ministries International. En moins de cinquante ans, cette organisation protestante est parvenue à établir plus de 1 100 lieux de culte à travers tout le pays.