Eglises d'Asie

Vieillissement de la population : prier pour une mort paisible et rapide ou adopter un robot de compagnie qui parle ?

Publié le 18/03/2010




Dans l’ouest du Japon, non loin de la ville d’Ikaruga, des pèlerins viennent au temple bouddhiste de Kichidenji, afin de prier pour mourir plus vite ou pour rester en bonne santé jusqu’à l’heure de la mort. Par ailleurs, dans une société à la population vieillissante, où les plus de 65 ans sont près de 20 % de la population, une entreprise a lancé la commercialisation d’un robot qui parle. Selon une dépêche de France-Presse (1), le robot, destiné à retarder chez les personnes âgées les effets du vieillissement, témoigne de l’intérêt – ne serait-ce que commercial – des questions liées au vieillissement rapide de la population japonaise.

Etabli en 987 par le moine Genshin, le temple Kichidenji, où les personnes âgées verraient exaucé leur vou de mourir soit en bonne santé, soit rapidement, attire chaque année 10 000 pèlerins. Selon la légende, la propre mère du moine aurait vu son vou exaucé après avoir revêtu une tunique cousue par les soins de son vénérable fils. Aujourd’hui, le rituel consiste à déposer ses sous-vêtements aux pieds de la statue d’Amitabha (ou Amida), “Bouddha de Lumière et du Paradis occidental”, sorte de Bouddha “retardataire” qui temporise son accession au nirvana afin de continuer à accomplir le salut des êtres dans le bouddhisme du Grand Véhicule, dominant au Japon, et de prier pour mourir en bonne santé et tant que l’on est encore autonome. Le rituel est supervisé par le supérieur du temple, Shin’etsu Yamanaka, qui prie en compagnie des pèlerins, psalmodiant une phrase en l’honneur d’Amida et frappant un morceau de bois.

“Je veux partir. Je pense que de plus en plus de personnes ressentent la même chose dans une société grisonnante explique Haruko Nakashima, femme au foyer de 68 ans, venue prier pour demander à mourir plus vite. “Nos familles ne disent rien, mais elles pensent aussi qu’il vaudrait mieux que nous mourrions subitement plutôt qu’elles aient à s’occuper de nous commente sur le ton de la plaisanterie Nobuyoshi, 70 ans, l’époux d’Haruko.

La plupart des visiteurs sont des femmes, explique le moine. Elles seraient plus préoccupées que les hommes de ne pas déranger les autres lorsqu’elles meurent. “Les femmes ont travaillé dans l’ombre d’une société dominée par les hommes. Les hommes âgés sont pris en charge par des femmes, mais celles-ci ont du mal à trouver quelqu’un pour s’occuper d’elles continue-t-il.

Derrière l’esprit du pèlerinage, il y a le spectre d’une mort longue et pénible. “C’est très attristant pour des proches de voir un être cher qui est charcuté par un scalpel ou relié à des tuyaux dans un hôpital », explique Kimie Goto, 76 ans, qui a perdu son mari il y a treize ans, mort subitement d’une crise cardiaque, et qui exprime le souhait de le rejoindre “un de ces jours Le moine, lui, considère que c’est “un sentiment naturel chez les gens de vouloir une mort paisible”. Il est naturel, poursuit-il, que les enfants souhaitent que leurs parents vivent longtemps ; cependant, ils n’aiment pas l’idée de les voir se dégrader physiquement au fond d’un lit ou ne plus être capables de reconnaître leurs proches. “Beaucoup d’enfants, particulièrement les filles, viennent ici pour espérer que leurs parents seront emportés en toute discrétion là où Amitabha est dit encore le moine.

Par ailleurs, en décembre dernier, la société Dream Supply a lancé sur le marché, pour le prix de 576 000 yens (4 000 euros), un robot destiné aux personnes âgées qui répond, en japonais, à des questions simples Comment ça va ?” – “Ca va.” ; “Je m’ennuie aujourd’hui.” – “Tu t’ennuies aujourd’hui ? Surnommé “Snuggling Ifbot” (‘Robot douillet’), l’engin, qui mesure 45 cm de hauteur, a été conçu pour aider les personnes âgées à ne pas devenir séniles, sinon à retarder la sénilité. Il est prévu d’en proposer une version en anglais, mais pas pour l’exporter : pour l’enseignement des langues étrangères aux jeunes enfants.

Le Japon, avec une population de 126,82 millions d’habitants, enregistre le taux de renouvellement des générations le plus faible de son histoire. Le taux de fécondité est tombé à 1,29 enfant par femme en âge de procréer. 24,4 millions de personnes ont plus de 65 ans. 23 000 sont âgées de 100 ans ou plus. Selon une information publiée par le ministère de la Santé en novembre 2004, plus de 4,13 millions de personnes âgées réclameraient des soins partiels ou constants.