Eglises d'Asie

Moluques : à l’approche du 25 avril, les responsables religieux demandent aux autorités de préserver la paix et le calme dans la province

Publié le 18/03/2010




Le 12 mars dernier, trois responsables religieux des Moluques ont été reçus au palais du vice-président Jusuf Kalla, à Djakarta. Ils ont demandé au vice-président que le gouvernement prenne toutes les mesures préventives nécessaires afin que la date du 25 avril prochain ne soit pas l’occasion – comme l’an dernier – d’une explosion de violence aux Moluques. Entre le 25 avril et le 1er mai 2004, une flambée de violence, attribuée à des “provocateurs avait fait trente morts et deux cents blessés (1). Cette année, le Rév. I.J.W. Hendriks, responsable du Synode de l’Eglise protestante des Moluques, Mgr Petrus Canisius Mandagi, évêque catholique du diocèse d’Amboine, et Idrus Toekan, président de la section moluquoise du Conseil des oulémas d’Indonésie, ont tenu à informer personnellement Jusuf Kalla de la situation prévalant aujourd’hui à Amboine et dans le reste de la province.

Chaque année, depuis les violences intercommunautaires des années 1999-2002, qui ont fait 6 000 morts et des dizaines de milliers de déplacés, la date du 25 avril est un moment sensible. A cette date ou la veille, les quelques centaines de partisans que compte le Front de souveraineté des Moluques (FKM), une organisation interdite, hissent les couleurs de l’éphémère République des Moluques du Sud (RMS). Cette année, ils célèbreront le 55e anniversaire de cette République, disparue avant même d’avoir existé.

A Djakarta, les responsables religieux ont fait valoir que le climat est aujourd’hui assez volatile à Amboine. Le 5 mars dernier, dans le village de Lateri, à l’est d’Amboine, une grenade a été lancée parmi des personnes attendant un moyen de transport public. Trois d’entre elles ont été grièvement blessées et l’une des trois est décédée des suites de ses blessures. Quelques semaines auparavant, le 15 février, arrivés à bord d’une embarcation rapide, des hommes ont investi un club de karaoké à Hative, un quartier majoritairement chrétien d’Amboine ; ils ont ouvert le feu sur les clients, tuant un homme et une femme. Plus récemment, le 22 mars, à Amboine, des hommes à moto ont jeté une grenade dans un minibus ; un passager a eu le réflexe de rejeter l’engin hors du véhicule, mais, lors de son explosion sur la chaussée, dix-neuf personnes ont été blessées.

Selon Mgr Mandagi, “les Moluquois et leurs responsables religieux sont devenus nerveux à la suite de ces actions violentes. C’est pourquoi une démarche commune a été décidée pour demander au gouvernement central de maintenir la paix entre les communautés, en faisant en sorte que les coupables soient rapidement arrêtés”. L’évêque catholique d’Amboine a précisé que les responsables religieux sont d’accord pour dire que certaines personnes ou certains groupes cherchent à fomenter de l’agitation. “Nous sommes inquiets du fait que, dans les jours qui vont précéder l’anniversaire du mouvement pour la RMS, des provocateurs vont inciter les gens à recourir à nouveau à la violence a précisé Mgr Mandagi, ajoutant que lui et les autres responsables religieux pensent que les provocateurs sont des agents bien entraînés, tels des policiers ou des militaires, agissant en groupes de façon coordonnée.

L’espoir des responsables religieux, a encore ajouté l’évêque catholique, est que les Moluquois ne se laissent désormais plus provoquer aisément. “Ils ne veulent plus être impliqués dans des actions de guerre ou de violence, car ce sont eux qui en souffriront et y laisseront la vie a-t-il observé, estimant que cette prise de conscience était en soi “une victoire”. Les musulmans et les chrétiens à Amboine veulent désormais vivre en bonne intelligence “car ils ont réalisé qu’ils étaient les acteurs d’un scénario dicté par un certain groupe”. Pour les observateurs, le fait que cette année, contrairement à l’année dernière, n’est pas une année électorale jouera peut-être en faveur d’une certaine stabilisation de la situation.

Pour Mgr Mandagi, il était néanmoins nécessaire de remonter jusqu’au sommet de l’Etat, car “les autorités locales n’ont pas les moyens de gérer le flux continu d’explosions et d’attaques à l’arme à feu”. Selon l’évêque, Jusuf Kalla a remercié les responsables religieux de lui avoir fait un rapport de la situation ; il a promis de demander à l’armée et à la police d’accélérer les enquêtes en cours.