Eglises d'Asie

Plusieurs centaines de Montagnards ayant fui les Hauts Plateaux du Centre-Vietnam pour le Cambodge refusent de quitter le pays de leur premier asile

Publié le 18/03/2010




Paru à la mi-avril dans The Cambodia Daily, un article de Brad Adams, directeur de la division Asie de Human Rights Watch, présente les caractéristiques essentielles du nouvel exode de Montagnards qui, depuis les troubles du week-end de Pâques 2004, fuient les Hauts Plateaux du Centre-Vietnam pour les régions du Cambodge frontalières du Vietnam. Selon le responsable de l’organisation de défense des droits de l’homme, ce mouvement de réfugiés ne ressemble pas à celui qui l’a précédé, consécutif aux troubles de février 2001 dans la même région du Vietnam, pas plus d’ailleurs qu’à la plupart des exodes de demandeurs d’asile dans le monde.

En effet, comme tous les autres bénéficiaires d’un premier asile dans le monde, les précédents Montagnards réfugiés des Hauts Plateaux désiraient ardemment se réinstaller dans un tiers pays où la sécurité leur serait assurée. A l’étonnement du Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés, plus de 250 Montagnards au Cambodge, dont beaucoup avaient déjà été reconnus comme réfugiés, ont refusé l’installation dans un autre pays. Certains avaient peur de ne plus jamais revoir leurs épouses et leurs enfants. D’autres ont déclaré qu’ils voulaient attendre au Cambodge jusqu’à ce que les problèmes des Hauts Plateaux soient réglés, ce qui leur permettrait de rentrer chez eux en toute sécurité. En attendant, ils craignent les sanctions qui seraient prises contre eux en cas de retour.

Cette crainte des Montagnards a encore été accentuée par les accords du 25 janvier dernier, signé par le Haut Commissariat aux réfugiés et les gouvernements du Cambodge et du Vietnam. Ils stipulent que les Montagnards demandeurs d’asile qui n’accepteraient ni de retourner au Vietnam, ni de s’exiler dans un pays tiers, seraient reconduits de force dans leur pays. Selon ces accords, les Montagnards placés sous la protection des Nations Unies à Phnom Penh devaient, dans la semaine suivant les accords, signer un texte où ils s’engageaient au rapatriement ou à l’installation dans une autre nation. La crainte des Montagnards semble d’autant plus justifiée que le Vietnam ne permet ni aux agents du Haut Commissariat, ni à d’autres organisations indépendantes de vérifier que le retour des Montagnards s’effectue sans risque pour eux. Une clause des accords prévoit de façon vague des visites du Haut Commissariat aux rapatriés, mais n’entre pas dans le détail de leur réalisation.

Bien que le gouvernement vietnamien a promis de ne pas sanctionner les Montagnards passés au Cambodge pour leur fuite, il ne s’est en fait nullement engagé à ne pas les punir pour avoir pratiqué leur religion ou avoir exprimé librement leurs opinions politiques. Au contraire, depuis février 2001, on estime à 180 le nombre de Montagnards ayant été condamnés à des peines de prison pour leurs activités politiques ou religieuses, ou encore pour avoir fui leur pays illégalement. Les dernières condamnations prononcées datent du 6 avril dernier (1). Deux militants Montagnards, Roland Hloe, 37 ans, et Kpuih Chonh, 47 ans, étaient condamnés, respectivement, à sept ans et cinq ans de prison pour avoir organisé la fuite à l’étranger de nombreux compatriotes.

En conclusion de son article, le responsable pour l’Asie de Human Rights Watch plaide la cause des Montagnards vietnamiens réfugiés au Cambodge et ne désirant pas bénéficier d’une installation dans un autre pays. Brad Adams rappelle que la seule cause réelle de la fuite de certains habitants des Hauts Plateaux est la politique pratiquée par le Vietnam à l’égard de cette population. Malgré les très lourdes pressions exercées par les autorités vietnamiennes sur le gouvernement cambodgien, celui-ci devrait offrir un asile temporaire aux quelques centaines de Montagnards qui le demandent. Ce petit nombre de demandeurs d’asile ne saurait créer de difficultés au pays d’accueil ; d’autant plus que les charges financières consécutives à l’hébergement et à la survie des demandeurs d’asile seront entièrement assumées par les Nations Unies et diverses agences privées.