Eglises d'Asie

Avec une discrétion voulue, les autorités vietnamiennes ont mêlé leurs voix au concert d’éloges qui ont accompagné le décès de Jean-Paul II

Publié le 18/03/2010




Dans les jours qui ont précédé la mort du pape Jean-Paul II, les principaux organes de presse du Vietnam sont restés très discrets. Ainsi, ce n’est qu’à partir du début avril que le Nhân Dân, organe du Parti communiste vietnamien, a ouvert ses colonnes à d’assez larges rapports sur les derniers jours du Saint Père. Ces récits étaient généralement empruntés aux agences de presse, à la BBC ou encore aux grandes chaînes de télévision captées à Hanoi. Le ton était objectif et la déférence exprimée aussi bien dans les appellations que dans les appréciations était généralement issue de la source suivie. Aucun jugement de valeur émanant des personnalités officielles n’était encore rapporté. Ce même style sera gardé par la suite toute la semaine, y compris pour le récit des funérailles du pape, composé, lui aussi, d’extraits tirés de divers agences et médias internationaux. Dans le Nhân Dân, annoncé en première page avec une photo de Jean-Paul II, l’article de longueur moyenne se trouvait dans les pages intérieures du journal.

Il fallut donc attendre le lendemain de la mort du pape, le 3 avril (1), pour prendre connaissance de réactions venant des autorités vietnamiennes. Du contenu des condoléances envoyées, le 3 avril, au cardinal Sodano, par le Premier ministre Phan Van Khai, rien n’a été révélé. Le même jour, lors d’une conférence de presse, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lê Dung, fera ce commentaire : “A la nouvelle du décès du pape Jean-Paul II, nous exprimons nos profondes condoléances au Saint-Siège du Vatican, à la communauté catholique dans le monde et aux fidèles catholiques du Vietnam.” Par ailleurs, le président du Comité directeur du Front patriotique, Pham Thê Duyêt, a envoyé un télégramme de condoléances à la Conférence épiscopale qui remarquait que le décès du pape constituait une grande perte pour l’Eglise catholique universelle et pour la Conférence épiscopale du Vietnam. Le télégramme présentait le défunt comme un dirigeant ayant beaucoup contribué à la paix mondiale, à la réconciliation, à la dénonciation des génocides et crimes de guerre, de la pandémie du sida. Dans les jours qui ont suivi le décès, une délégation des autorités de Hanoi, conduite par la maire adjointe Mme Ngô Thi Thanh Hang, est venue à l’archevêché exprimer sa sympathie aux autorités religieuses catholiques. Une même démarche a eu lieu à Hô Chi Minh-Ville où une délégation du Comité populaire du Front de la patrie est allée à l’archevêché avec une gerbe de fleurs à la mémoire de Jean-Paul II.

Le 7 avril, les agences de presse ont rapporté une autre réaction inspirée du gouvernement et exprimée par le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Dans une conférence de presse, celui-ci attribuait au pape défunt le mérite des progrès effectués dans les relations entre le Vietnam et le Saint-Siège. “Les liens diplomatiques ne sont pas encore établis, a-t-il commenté, mais les relations entre les deux Etats se sont développées (.). Le Vietnam et le Saint-Siège ont, à maintes reprises, tenu des réunions et des entretiens à travers lesquels le respect mutuel et la compréhension réciproque se sont intensifiés.”

Dans l’Eglise, les fidèles, traditionnellement très attachés au Saint-Siège et au Souverain Pontife, ayant longtemps souhaité, mais en vain, une visite du pape dans leur pays, ont manifesté rapidement leur émotion. Dès le lendemain du décès, les messes et les sessions de prières se sont multipliées dans tous les diocèses. Selon l’agence vietnamienne d’information, pour le diocèse de Hanoi, treize églises et 42 paroisses ont organisé des cérémonies en hommage au pape défunt. Les églises étaient pleines le jour des funérailles à Hô Chi Minh-Ville, à Hanoi, où l’on pouvait suivre les cérémonies diffusée à partir d’une chaîne américaine sur un écran géant. Dans le diocèse de Phat Diêm, où des foules étaient venues à la rencontre du légat du pape, le cardinal Etchegaray, en 1990, un millier de fidèles étaient assemblés pour prier pour Jean-Paul II. A Hai Phong, les autorités civiles locales sont venues faire brûler de l’encens devant le portrait de Jean-Paul II.

Les évêques n’ont pas manqué, chacun dans son diocèse, de rendre un hommage public à leur pasteur. Mgr Nguyên Chi Linh, nouvel évêque de Thanh Hoa, a présenté Jean-Paul II comme le porte-parole de la civilisation de la vie, ayant mis le monde en garde contre la culture de la mort. Beaucoup ont rappelé la grande sympathie qu’éprouvait le pape pour l’Eglise du Vietnam, une Eglise qu’il avait appris à connaître au moment des canonisations de 1980 et à laquelle il avait toujours voulu rendre visite. La Conférence épiscopale a formé une délégation pour la représenter aux funérailles du pape. Elle était présidée par Mgr Nguyên Van Hoa, président de la Conférence épiscopale, et comprenait le cardinal Jean-Baptiste Pham Minh Mân, membre du conclave, Mgr Joseph Ngo Quang Kiêt, archevêque de Hanoi, et trois autres évêques et quelques prêtres.