Eglises d'Asie

Les bouddhistes hoa hao sont persécutés par les autorités parce qu’ils pratiquent un culte domestique, contrairement aux dispositions de l’Ordonnance sur la croyance et la religion

Publié le 18/03/2010




Au début de l’après midi du 27 avril dernier, deux adeptes du bouddhisme hoa hao ont comparu devant le tribunal populaire du district de Thai Son, dans la province de An Giang, qui est le lieu d’origine du bouddhisme hoa hao. L’un d’entre eux, Trân Van Hoang, âgé de 47 ans, a été condamné à neuf mois de prison et vingt millions de dôngs (1 500 euros) d’amende pour avoir diffusé des enregistrements d’instruction religieuse sans permission. Le second prévenu, son frère, Trân Van Thang, a été condamné à six mois de prison et à une amende de dix millions de dôngs. Ils ont été condamnés, ont rapporté les témoins, au titre de l’article 271, paragraphe 1, du Code pénal. L’article en question classe parmi les crimes la production ou la diffusion de livres et d’enregistrements en contradiction avec le règlement qui n’est pas précisé. Autour du tribunal, environ deux cent agents de police ont bloqué la circulation et empêché les fidèles hoa hao de se rendre sur les lieux du procès. Une dizaine d’entre eux ont été amenés au poste de police, après avoir vu leur véhicule confisqué ainsi que leurs papiers d’identité.

Dans une lettre envoyée, le 21 avril dernier, à diverses organisations de défense des droits de l’homme à l’étranger et à l’ambassade des Etats-Unis au Vietnam, la mère des deux victimes avait exposé les circonstances de l’arrestation de ses enfants. Ceux-ci avaient été arrêtés et conduits en prison par la police, le 25 février dernier. Les agents de la Sûreté avaient également confisqué tous les compact-discs et enregistrements de l’enseignement du fondateur de la religion hoa hao, Duc Huynh Giao Chu (Huynh Phu So). Avaient également disparu du domicile tous les appareils d’enregistrement ainsi que les ordinateurs, représentant au total une valeur de dix millions de dôngs. La mère des inculpés expliquait également dans sa lettre que l’Ordonnance sur la croyance et la religion, parue le 16 juin dernier (1), interdisait la propagation de la religion dans les domiciles privés. Cette disposition de l’ordonnance a servi de prétexte à arrêter les deux croyants et à empêcher les autres fidèles de venir écouter les exposés d’instruction religieuse à l’intérieur d’une maison ordinaire. Selon l’auteur de la lettre, l’ordonnance de juin 2004 a eu de très fâcheux effets sur la vie religieuse des bouddhistes hoa hao, la plupart d’entre eux étant des “oblats” vivant une vie religieuse dans leur propre maison. Surtout depuis le changement de régime de 1975, toutes leurs activités religieuses et leurs rencontres avec les autres adeptes hoa hao ont lieu dans des résidences privées.

Depuis le 26 mai 1999, la communauté bouddhiste hoa hao a été placée sous la direction d’un Comité de représentants patronné par le Bureau des affaires religieuses du gouvernement et le Front patriotique (2). Ont été exclus du Comité un certain nombre d’anciens dirigeants, en particulier, Lê Quang Liêm, ancien président du Comité central de la Congrégation bouddhiste hoa hao. Très régulièrement, surviennent des conflits entre les fidèles hoa hao et les nouvelles autorités religieuses. La religion hoa hao, qui compte aujourd’hui entre trois et quatre millions d’adeptes, se qualifie de bouddhiste, mais donne une grande importance au culte domestique et réunit dans une même croyance des éléments bouddhistes, animistes et confucéens. Après de premiers rapports difficiles avec le pouvoir colonial français, les dirigeants de la religion hoa hao ont fait alliance avec le Vietminh en 1945. Quelques années après, le fondateur de la religion, le prophète Huynh Phu So, accusé de trahison, fut exécuté sur ordre de ses alliés vietminh. Cet acte rejeta les dirigeants et adeptes du bouddhisme hoa hao vers les Français, qu’ils aidèrent dans leur lutte contre la guérilla vietminh. Après avril 1975, cette religion a subi une répression très sévère.