Eglises d'Asie

Pour la première fois, une personne souffrant de surdité va devenir prêtre de l’Eglise catholique en Corée

Publié le 18/03/2010




Le premier handicapé auditif profond à avoir été admis au séminaire en vue de la prêtrise est un signe d’espérance pour tous ceux qui, malgré leur handicap physique, pensent au sacerdoce. C’est ce que vient d’écrire l’un d’entre eux, Benedict Park Min-seo, dans un courrier électronique adressé à l’agence Ucanews, le 14 mars dernier. « Par la grâce de Dieu, j’ai été accepté au séminaire de l’archidiocèse de Séoul écrit Park Min-seo, 37 ans, qui vient de reprendre ses études de théologie à Songsin, le séminaire universitaire de l’Université catholique de Corée. « Honnêtement, j’ai été surpris explique Park à qui on avait toujours dit que l’Eglise catholique n’acceptait pas d’ordonner à la prêtrise des handicapés.

C’est Mgr Nicholas Cheong Jin-suk, archevêque de Séoul, qui, sur l’avis de son Conseil, a décidé l’entrée de Park au séminaire. « Une décision significative d’une nouvelle ouverture de l’Eglise commente le P. Nereus Kim Ja-mun, le responsable diocésain des vocations. Une Eglise ouverte à tous, sans discrimination, dit-il, affirmant que le cas de Park est « un signe des temps qui, assure-t-il, donne une raison de plus à l’Eglise d’être dans le monde : « Nous venons de poser la base d’une Eglise où la pastorale des handicapés se fera par les handicapés eux-mêmes. » Selon le P. Nereus Kim, il y aurait 150 000 handicapés auditifs profonds en Corée du Sud. Les Eglises protestantes comptent une cinquantaine de pasteurs sourds, alors que l’Eglise catholique n’en a aucun.

Le parcours de Park Min-seo est atypique. Baptisé à l’âge de 17 ans, il avait alors senti que Dieu l’appelait au sacerdoce. Mais, comme plusieurs prêtres coréens lui avaient dit qu’il était impossible à un sourd d’être ordonné prêtre, il était parti étudier la philosophie aux Etats-Unis en 1994, soutenu en cela par son directeur spirituel, le P. Michael Cheong Soon-o. « J’ai essayé d’oublier, mais je n’y suis pas arrivé écrit-il à propos de son appel au sacerdoce. De 1994 à 1999, Park Min-seo a ainsi étudié les mathématiques et la philosophie dans un institut spécialisé pour l’accueil des sourds et des malentendants, la Gallaudet University, à Washington DC. Une fois son diplôme en poche, il a poursuivi par des études de théologie à l’Université St John, de New York, où il a décroché une maîtrise (1).

A son retour en Corée, soutenu par le P. Michael Cheong et le P. Nereus Kim, recommandé par le recteur de l’Université St John, Park Min-seo aurait dû être rapidement ordonné diacre. Pourtant, l’archevêque de Séoul lui a demandé de patienter encore une année. Pour le responsable des vocations de l’archidiocèse de Séoul, ce délai supplémentaire imposé à Park indique que les esprits ne sont pas encore tout à fait prêts à accepter qu’un prêtre soit affecté d’un handicap physique. « Les handicapés physiques sont scrutés de plus près que les autres remarque le P. Nereus Kim, soulignant pourtant que « des désordres d’ordre spirituel peuvent être beaucoup plus gênants qu’un handicap physique ». Pour Park Min-seo, passer douze mois auprès des jeunes séminaristes est un temps dont il admet la nécessité, expliquant qu’il est important pour lui de les connaître afin de s’en faire des amis et de voir s’il sera capable de travailler un jour avec eux.

Dans le courrier électronique qu’il a adressé aux journalistes, Park Min-seo écrit qu’il pense être ordonné diacre l’an prochain en 2006 et qu’un séminariste qui connaît le langage coréen des sourds et des muets lui sert de traducteur. « Mais surtout, je lis les livres que me recommandent les professeurs. Je veux montrer aux Coréens qu’un handicapé peut être ordonné prêtre dans l’Eglise catholique romaine. Il est important pour l’Eglise de reconnaître qu’un handicapé est aussi fils de Dieu écrit-il encore.

Le nouveau Code de droit canon, promulgué par Jean-Paul II en 1983, ne contient aucune clause interdisant l’accès à la prêtrise d’un handicapé physique. C’est à l’évêque du diocèse qu’appartient la décision d’ordonner à la prêtrise un handicapé. Mais, estime le P. Nereus Kim, les préjugés à l’égard des handicapés sont profondément enracinés dans les esprits. Ce sont eux les plus grands obstacles à une ouverture de l’Eglise, souligne-t-il.