Eglises d'Asie

L’anniversaire du soulèvement populaire contre la loi martiale en 1980 est devenu, pour l’archidiocèse de Kwangju, un jour officiel de commémoration

Publié le 18/03/2010




Le 16 mai dernier, l’archidiocèse de Kwangju a rendu publique sa décision de faire du 18 mai le jour commémoratif officiel du soulèvement populaire contre la loi martiale de 1980. Le 16 mai, l’archidiocèse a célébré dans l’église de Nam-dong le 25e anniversaire du soulèvement de Kwangju (anciennement Gwangju). Pour cette cérémonie commémorative, Mgr Choi Chang-mou, archevêque de Kwangju, présidait l’Eucharistie, concélébrée avec son auxiliaire, Mgr Hyginus Kim Hee-jung, et un grand nombre de prêtres. Dans son homélie, l’archevêque a déclaré : « Le massacre du 18 mai, il y a vingt-cinq ans, a été un grand crime contre la justice, la liberté et la dignité humaine. Une page d’histoire à ne pas oublier. » Il nous faut encore, a-t-il ajouté, nous souvenir des sacrifices consentis par les victimes pour la démocratie (1).

Le soulèvement du 18 mai 1980 avait été provoqué par la détermination du général Chun Doo-hwan, alors l’homme fort du régime sud-coréen, à réprimer les manifestations des étudiants contre le gouvernement de Choi Kyu-hah. Le 18 mai, les étudiants de Kwangju protestèrent contre la loi martiale et leur manifestation fut réprimée dans la violence. Les étudiants firent alors mouvement vers le centre-ville. La manifestation prit de l’ampleur et les forces armées ouvrirent le feu. Des civils, en possession d’armes volées dans des dépôts de munitions et des commissariats de police, repoussèrent les militaires. Le 27 mai, des troupes aéroportées anéantirent ces milices. D’après le gouvernement, il y eut 191 morts et 852 blessés. D’autres sources font état de plus de 1 000 tués (2). Durant le soulèvement, des personnalités représentatives de la population, dont le P. Francis Kim Sung-yong, curé de la paroisse de Nam-dong, se réunirent pour évaluer la situation et tenter de négocier avec les militaires. C’est la raison pour laquelle l’anniversaire de ce soulèvement est célébré depuis, chaque année, dans l’église de Nam-dong.

Selon le P. Basil Son Byung-hyun, président du Comité du 25e anniversaire du 18 mai dans le diocèse de Kwangju, la célébration de cette tragédie, vingt-cinq ans après les faits, doit revêtir un sens particulier. Au-delà de l’événement historique, un sens liturgique doit être trouvé à la commémoration de cet anniversaire. « Comme Jésus a sauvé l’humanité par le sacrifice de sa vie, le peuple de Kwangju a fait grandir la démocratie et libéré la nation de la dictature militaire grâce aux sacrifices des victimes de ce soulèvement a-t-il expliqué, ajoutant : « En tant que chrétiens, c’est important pour nous de pratiquer dans nos vies de tous les jours l’esprit du 18 mai, tout en laissant à Dieu le soin de résoudre les problèmes non encore résolus. » Le P. Son espère que « dorénavant, toutes les paroisses de l’archidiocèse célébreront une Eucharistie ce jour-là pour commémorer cette tragédie et spiritualiser « le salut » obtenu grâce au sacrifice du 18 mai ». Avant cette messe du 16 mai, l’archidiocèse avait organisé une manifestation sous le titre « Kwangju, Pâques au mois de mai ».

Pour Anselmus Jun Gei-ryang, ancien président de l’Association des familles des victimes (du 18 mai 1980), la décision de l’archevêque est une bonne chose, « bien que tout cela semble arriver un peu tard si on considère le rôle de l’archidiocèse de Kwangju dans cette affaire. Néanmoins, c’est bien que ce mouvement populaire soit célébré maintenant. Pendant le soulèvement, l’Eglise catholique, notamment l’archevêque émérite, Mgr Victorinus Youn Kong-hi, a joué un rôle important et a montré qu’elle avait du poids. Beaucoup de gens se sont convertis au catholicisme après avoir été témoins du rôle de l’Eglise et des efforts des habitants de Kwangju. Pourtant, aujourd’hui, nous avons perdu le sens de ce soulèvement. Grâce à cette journée commémorative, j’espère que l’esprit du 18 mai revivra. »

L’archidiocèse souhaite proposer à la Conférence des évêques catholiques coréens que le 18 mai soit commémoré dans l’ensemble de l’Eglise de Corée.