Eglises d'Asie

Mindanao : une prise d’otages se termine sans heurts ni blessés, après qu’un évêque catholique ait offert sa médiation en acceptant d’être lui-même otage

Publié le 18/03/2010




L’incident a duré plusieurs heures, les 24 et 25 mai derniers, et s’est finalement conclu sans heurts ni blessés. Le 24 au soir, à Mindanao, un bus d’une ligne régulière de transport de passagers a été stoppé à un contrôle de routine par la police, à Sapang Dalaga, localité de la province de Misamis Occidental, dans la partie ouest de l’île de Mindanao. Lorsque la police a demandé aux hommes présents à bord du bus de descendre pour être fouillés, trois d’entre eux se sont levés et, sortant des fusils d’assaut et des grenades de leurs sacs, ont pris le contrôle du véhicule. Avec quatorze otages, des femmes et des enfants, le bus a alors continué sa route deux heures durant, avant qu’un barrage, érigé par la police, ne le stoppe, à proximité de la ville de Pagadian. Les revendications des preneurs d’otages n’ont jamais été clairement exprimées, mais l’issue pacifique de la crise a été grandement facilitée par l’action de l’évêque catholique local, Mgr Emmanuel Cabajar, du diocèse de Pagadian.

Les trois hommes ont rapidement menacé de faire sauter le bus et ses passagers, si la police ne les laissait pas libres de continuer leur chemin. Les négociations n’ont abouti à rien, les trois hommes refusant de libérer leurs otages et la police refusant de mettre à leur disposition un nouveau véhicule. Entre temps, le bus avait été immobilisé, ses pneus crevés par des tirs de la police. Plus tard dans la nuit, les autorités locales ont accepté que Mgr Emmanuel Cabajar, appelé sur les lieux par la police, prenne dans son pick-up les passagers – dont quelques-uns avaient été libérés entre temps – et les preneurs d’otages. Le transfert s’est finalement fait au lever du jour, le 25 mai.

Le chef de la police pour la région Ouest de Mindanao, Prospero Noble, a justifié sa décision, en déclarant que sa priorité, en pareille situation, est de préserver la vie des otages. Cependant, au petit matin du 25 mai, à quatre ou cinq reprises, Mgr Emmanuel Cabajar a dû stopper son pick-up pour exiger de la police et des médias qu’ils cessent de le suivre. L’évêque expliquait que les preneurs d’otages devenaient très nerveux du fait d’être ainsi suivis.

A l’un des preneurs d’otages, a rapporté plus tard l’évêque, Mgr Emmanuel Cabajar a dit : “J’ai entendu dire que vous appartenez à la NPA” (New People’s Army), branche armée du Parti communiste philippin. “Il a répondu : ‘Oui, nous appartenons à son groupe Sud.’ a raconté le prélat aux médias philippins, une fois la crise dénouée. Arrivés dans la province de Zamboanga del Sur, où la NPA a des soutiens en divers endroits, les preneurs d’otages ont peu à peu libéré les passagers, avant de finalement s’enfuir, laissant sain et sauf Mgr Emmanuel Cabajar, âgé de 62 ans, et sans avoir rien dérobé aux otages.

Selon les enquêteurs, il se pourrait que les preneurs d’otages aient été des trafiquants d’armes, pris par surprise lors du contrôle de Sapang Dalaga. Des otages ont en effet rapporté qu’ils transportaient de lourds sacs, remplis d’armes légères et de munitions. A Manille, un porte-parole de la présidence de la République a salué le courage et le sang-froid dont a fait preuve l’évêque.

Par le passé, à Mindanao, où les rébellions communiste et musulmane sont très actives, les évêques catholiques et les oulémas musulmans, travaillant ensemble pour la paix et le développement, ont demandé à plusieurs reprises au gouvernement de lutter contre la prolifération des armes dans la région.