Eglises d'Asie

L’Eglise catholique ainsi que des responsables protestants et confucéens affirment leur opposition aux recherches menées à partir de cellules souches extraites d’embryons humains

Publié le 18/03/2010




“Les embryons sont des êtres vivants. Nous étions tous des embryons.” Tel est le titre du document que la Conférence des évêques catholiques de Corée a publié le 4 juin dernier. Rédigé conjointement par la Commission pour la Doctrine et la Commission pour les Affaires sociales de la Conférence épiscopale, le texte constitue la réponse de l’Eglise catholique de Corée aux avancées des recherches menées par le professeur Hwang Woo-suk, de l’Université nationale de Séoul. Ce dernier et son équipe ont fait la ‘Une’ de la presse en Corée et un peu partout à travers le monde lors de l’annonce, le 19 mai dernier, d’une percée scientifique sur la voie du clonage d’embryons humains (1). La percée en question – une méthode particulièrement efficace de production de cellules souches embryonnaires en laboratoire par un processus de clonage – est désapprouvée par les évêques catholiques. Elle a aussi suscité des commentaires critiques de responsables protestants et confucéens.

Pour les évêques, l’avancée et les recherches du professeur Hwang vont dans une direction erronée car elles aboutissent, premièrement, à la production artificielle de vies humaines, par un processus de clonage, et, deuxièmement, à la destruction de ces vies humaines, pour en extraire les cellules souches embryonnaires recherchées. Face à cet état de fait, les responsables catholiques rappellent que le recours à des cellules souches embryonnaires “n’est pas la seule voie” envisageable pour traiter les maladies neurodégénératives du type Alzheimer. Face aux attentes suscitées chez les malades atteints de telles pathologies et chez leurs familles, “l’Eglise ne ferme pas les yeux” et partage “la souffrance des malades “mais, continuent les évêques, les cellules souches embryonnaires ne sont pas la seule voie pour traiter ces maladies incurables. On peut développer la recherche sur les cellules souches adultes”. D’après des études scientifiques, celle-ci a déjà donné des résultats cliniques positifs et ne soulève pas de problème du point de vue éthique (2).

Les responsables catholiques n’ont pas été les seuls à exprimer leurs réserves face aux recherches du professeur Hwang. Le 27 mai, l’Association chrétienne de bioéthique, une organisation protestante, avait qualifié la percée scientifique de “crime moral transgressant la loi morale universelle “Tu ne tueras pas”. Elle invitait le gouvernement à ne plus soutenir de manière unilatérale les recherches conduites sur les cellules souches embryonnaires et à rediriger les crédits publics vers les laboratoires travaillant à partir des cellules souches adultes.

Quelques jours plus tard, le 5 juin, c’était au tour d’une organisation confucéenne, le groupe Sungkyunkwan, une institution fondée il y a six siècles pour promouvoir l’étude de la pensée de Confucius, de dire son opposition aux recherches du professeur Hwang, au motif qu’elles vont “contre les lois de la nature”.

Cependant, en dépit de ces différentes prises de position, les responsables religieux ont estimé qu’ils avaient du mal à se faire entendre de l’opinion publique. Selon le président du Comité épiscopal pour la doctrine de la foi, Mgr Francis Xavier Ahn Myong-ok, l’enthousiasme – et la fierté nationale – soulevés par l’annonce de la percée scientifique du professeur Hwang “posent problème” dans la mesure où “les Coréens ne s’interrogent pas sur les méthodes mises en ouvre pour parvenir [à cette percée] ». L’évêque catholique note que les médias locaux ont accueilli de manière très positive les travaux du professeur Hwang et que quiconque soulevait une objection sur les sites de discussion en ligne, sur Internet, était très rapidement qualifié de “traître”.

Vis-à-vis des catholiques, “qui ne sont pas fidèles à l’enseignement de l’Eglise sur les questions du respect de la vie et ne connaissent même pas cet enseignement l’Eglise doit faire un effort important de formation et d’information, a remarqué Mgr Ahn. Quant au professeur Hwang, actuellement en déplacement aux Etats-Unis pour un colloque sur les cellules souches, une rencontre devrait être organisée prochainement avec Mgr Nicholas Cheong Jin-suk, archevêque de Séoul. Le 11 juin, l’archevêché de Séoul a dit que Mgr Cheong souhaitait rencontrer le biologiste. Celui-ci, bouddhiste fervent depuis vingt ans, s’est dit prêt à “rencontrer les responsables religieux”. “C’est une étape à travers laquelle nous devons passer dans le processus de notre recherche a-t-il déclaré.