Eglises d'Asie

Hanoi : malgré l’opposition du gouvernement, l’archevêque ordonne deux nouveaux prêtres

Publié le 18/03/2010




Selon diverses sources en provenance de Hanoi, l’archevêque de cet archidiocèse, Mgr Joseph Ngô Quang Kiêt, a ordonné prêtres, le 11 juin dernier, deux diacres, Nguyên Van Thât (46 ans) et Joseph Nguyên Van Phuong (34 ans) dans l’église de la paroisse rédemptoriste de la capitale du Vietnam. Cette ordination n’aurait rien eu que d’ordinaire si elle avait eu lieu avec la permission et sous le contrôle des autorités civiles. Or, malgré l’enregistrement effectué auparavant par l’archevêque, en conformité avec l’article 22, paragraphe 4, de l’Ordonnance sur la croyance et la religion, les représentants du gouvernement s’étaient opposées à cette cérémonie, avaient refusé leur approbation et proféré des menaces contre les deux jeunes gens si le sacerdoce leur était conféré. Malgré ce refus et en application du droit à mener de telles activités, qui lui était donné par l’Ordonnance, à l’article 22 paragraphes 1 et 2, Mgr Kiêt a pris la décision de célébrer quand même cette ordination.

Informé de cette résolution de l’ordinaire de Hanoi, les autorités menacèrent de “suspendre” (1) les deux nouveaux prêtres de leurs fonctions en ne reconnaissant pas leur sacerdoce, laissant entendre ainsi que les futures activités sacerdotales des deux nouveaux ordonnés rencontreraient toutes sortes d’obstacles et de difficultés. L’archevêque en informa aussitôt les deux futurs prêtres qui acceptèrent toutes les conséquences fâcheuses qui pourraient résulter de cette ordination conférée sans l’approbation du gouvernement. C’est ainsi que, le 11 juin 2005, les deux diacres sont devenus prêtres.

L’archevêque a justifié sa décision d’ordonner les deux jeunes gens en s’appuyant sur les deux premiers paragraphes de l’article 22 de l’Ordonnance sur la croyance et la religion (2), dont voici la traduction.

“1 – L’ordination, l’attribution d’un titre, la nomination, l’élection, l’élévation à une dignité dans une religion doivent avoir lieu conformément à la charte, au règlement de l’organisation religieuse et tenir compte des conditions prescrites au paragraphe 2 du présent article. Dans le cas où un élément d’un pays étranger interviendrait, une approbation préalable de l’organe central d’Etat gérant la religion serait nécessaire.

2. La personne bénéficiant de l’ordination, de l’attribution d’un titre, d’une nomination, d’une élection, de l’élévation à une dignité, doit remplir les conditions suivantes pour être reconnue par l’Etat :

a. Etre citoyen vietnamien de bonne moralité ;

b. Faire preuve d’un esprit d’union, être en bonne intelligence avec son peuple ;

c. Obéir rigoureusement à la loi.

3. (.)

4. L’organisation religieuse a la charge de faire enregistrer auprès des autorités la personne bénéficiant de l’ordination, de l’attribution d’un titre, d’une nomination, d’une élection, de l’élévation à une dignité (.)”.

L’archevêque a estimé que les prescriptions et les conditions stipulées par l’Ordonnance étaient objectivement remplies. La conformité de l’ordination avec les prescriptions du droit canon, indiquée au paragraphe 1, était évidemment assurée. Par ailleurs, au jugement de l’archevêque, les candidats au sacerdoce remplissaient les trois conditions réclamées à l’article 2 de l’Ordonnance. Enfin, l’enregistrement prescrit par la loi avait été préalablement effectué par l’archevêché de Hanoi. On peut donc penser qu’en exigeant plus que l’ordonnance rédigée par elles-mêmes et en intervenant ainsi dans les affaires intérieures d’une religion, les autorités vietnamiennes se sont mises en infraction avec leur propre loi et ont violé les conventions internationales qu’elles ont, elles-mêmes, signées et promis de respecter dans le texte de leur propre ordonnance. En effet, on trouve à l’article 38, l’observation suivante : “Dans le cas où une convention internationale à laquelle la République socialiste du Vietnam a apposé sa signature ou a donné son adhésion contient une disposition différente de celle de cette ordonnance, il faudra appliquer la disposition de la convention internationale.”

On ne connaîtra sans doute que plus tard la réaction du gouvernement à cette application stricte de la récente Ordonnance sur la croyance et la religion. Mais on peut d’ores et déjà penser que la prise de position de l’archevêque de Hanoi a constitué un acte d’une grande importance, non seulement en matière de liberté religieuse, mais également pour l’implantation des diverses congrégations religieuses encore peu représentées au Nord-Vietnam. Les jeunes prêtres ordonnés à Hanoi appartiennent à la congrégation des rédemptoristes qui est présente dans les diocèses du Nord que par quelques membres. Le recrutement du clergé séculier, lui, suscite moins d’inquiétude depuis que le quota biannuel octroyé par le gouvernement au séminaire interdiocésain de Hanoi est passé, en septembre 2004, de soixante à quatre-vingt-dix étudiants.